ALM : Quel commentaire faites-vous du communiqué rendu public par la Jamâa islamique pour l’unicité et le jihad au Maroc ?
Moulay Ismaïl Alaoui : Il va falloir être réservé quant à ce type de missive qui peut, en fin de compte, n’être que de très mauvaises plaisanteries. Il est en effet difficile de s’assurer de la véracité de tels communiqués véhiculés à travers les nouveaux supports de communication multimédias, dont notamment Internet. Ce dernier offre la possibilité à n’importe qui d’envoyer des menaces. Cependant, les termes qui ont été utilisés dans ce communiqué véhiculent une phraséologie d’esprits bornés empreinte de haine et de vengeance. Dans tous les cas, nous ne pouvons que dénoncer cette dérive et cette perversion.
Menacer des citoyens, qu’ils soient ministres ou simples citoyens sur la base de leurs différences religieuses ou de pensée, est un acte de terrorisme intellectuel que l’on ne pourrait que condamner. C’est à mon sens l’incarnation de cette pensée unique qui n’a aucune place dans le projet de société moderne adopté par le Maroc. Je disais donc qu’il faudrait prendre cette affaire avec beaucoup de réserve, sans pour autant tomber dans la passivité.
Le ton de ce communiqué est sévère et les insultes sont nombreuses et poussées. Quelle réaction doit-on avoir ?
Les insultes ont même concerné le symbole de notre nation. Vous savez, lorsque c’est la vie de personnes qui est en jeu, la prudence est toujours de mise. Il faudrait toujours s’armer de cette prudence qui prendrait là un sens de sagesse. Il ne faudrait pas non plus trop s’inquiéter et sombrer dans une psychose qui n’aurait finalement pas lieu d’être. C’est pour ces raisons qu’il faudrait être très vigilant et temporiser avant de prendre la moindre décision.
Les deux Marocains enlevés en Irak ont également été concernés par ce communiqué.
Les auteurs de ce document se sont même réjouis de la condamnation à mort de nos deux compatriotes enlevés en Irak. Ils se sont félicités du sort qui leur a été réservé. C’est-là le summum de la perversion et de la barbarie. Comment peut-on être aussi insensible à la douleur et la souffrance de ces innocents et celles de leurs familles ? Il ne faut pas oublier que ces deux Marocains ne sont que de simples employés de l’ambassade du Royaume. Ils y travaillaient pour faire vivre leurs femmes et enfants. Ils n’ont aucune relation avec l’élaboration de la politique générale du pays, encore moins celle d’une région du monde aussi spéciale que l’Irak et où les enjeux des différentes grandes puissances sont aussi énormes que multiples.
Ce n’est pas la première fois que ce type de communiqué est diffusé. La même Jamâa islamique a d’ores et déjà menacé Saïd Lakhal à cause de certains de ses écrits. Faut-il craindre une montée de ce genre de violence verbale ?
Non, je ne le pense pas. Il est vrai que ce n’est pas la première fois que ce genre de menaces sont proférées. Cependant, il faudrait que les services de sécurité prennent l’affaire en main. Leur rôle actuellement est de s’occuper de ce problème pour pouvoir parer à toute éventualité. Nous ne savons toujours pas si ces menaces sont effectivement l’émanation d’un groupe de terroristes ou si elles sont simplement l’œuvre de certains adeptes des plaisanteries de mauvais goût.