ALM : On a l’impression que l’agriculture marocaine n’était pas représentée au Sommet OMC de Hong Kong ?
Mohand Laenser : En fait, il faut dire que cette rencontre s’inscrit dans un cycle de commerce et non de production. Il y avait néanmoins dans la délégation officielle marocaine, le secrétaire général du ministère de l’Agriculture et des Pêches maritimes. Compte tenu, des enjeux, on ne pouvait ne pas être présent à ce Sommet.
Concernant justement les enjeux, qu’est-ce qui a été obtenu de fondamental pour les pays en développement et le Maroc ?
Il est encore trop tôt pour passer en revue tous les aspects de l’accord vu qu’il a été conclu seulement hier (NDLR, dimanche 18 décembre) à 19 heures. Pour tous les pays membres, l’enjeu principal était d’obtenir un consensus pour pouvoir relancer les négociations. C’est l’aspect positif de ce Sommet. Le cycle est donc remis une nouvelle fois sur les rails, mais les résultats obtenus sont maigres. Ceci dit, notons que 90% des exportations des pays les moins avancés pourront entrer dans les pays développés sans restrictions, libres de droits de douane. Il y a aussi cette date 2013 pour la fin des subventions. Auparavant, 2008 offre aussi une possibilité de réduire les droits de douane. Mais il ne faut pas se leurrer, les subventions à l’exportation ne représentent qu’une faible partie des subventions en général. En Europe, ces aides à l’exportation sont de 3 milliards d’euros contre une enveloppe globale de plus de 40 milliards d’euros destinés à la subvention interne.
Ne craignez-vous pas, comme le pensent certains producteurs qu’avec l’abaissement des barrières douanières, le Maroc se transforme en passoire ?
Les gens exagèrent un peu. Il s’agit de négociations multilatérales. Le cycle de Doha avait posé trois piliers : fin des subventions à l’exportation, fin des subventions internes et réduction des droits de douane.
Il y a un quatrième pilier qui concerne les pays en développement, lesquels ne seront pas soumis à la même cadence du démantèlement. De plus, il y aura aussi à établir une liste des produits sensibles.
L’accord comporte donc beaucoup d’aspects qu’il faudra examiner d’abord.
Si l’Europe, principal partenaire du Maroc, arrête les subventions, le secteur de l’agriculture marocaine s’en ressentirait-il ?
Avec l’Union européenne, nous continuerons dans le cadre de nos accords bilatéraux à contingenter nos exportations jusqu’en 2012. Il est encore trop tôt de se prononcer sur la compétitivité de tel ou tel produit par rapport aux subventions.
Pourquoi les agriculteurs marocains ne sont pas associés à ces négociations de l’OMC ?
C’est prévu. L’année 2006 sera une année de concertations. Les listes des produits sensibles se feront avec les opérateurs. Mais il faudrait d’abord achever les deux autres volets du cycle de Doha, lesquels concerneront les subventions internes et les droits de douane. Maintenant, il faudra que l’OMC aille vite.
Quelles conséquences sur l’ALE conclu avec les USA ?
L’accord avec les Etats-Unis est un plus par rapport à l’OMC. C’est une négociation bilatérale qui nous a permis de négocier les délais de démantèlement et des clauses relatifs à certains produits.
Ces différentes échéances de 2008 et 2013 obligent le Maroc à accélérer la mise à niveau de son agriculture. Où en est-on aujourd’hui ?
La mise à niveau reste notre priorité. Il y a plusieurs efforts à fournir. Le programme nécessite aussi beaucoup de crédits et des réformes sur le foncier, le financement. Il faudra qu’on revoit les modèles de culture et qu’on améliore la productivité. A ce propos, notre politique de reconversion a démarré à Meknès il y a quelques semaines sous la supervision de SM le Roi Mohammed VI. Nous allons accélérer le programme d’arboriculture qui repose sur des disponibilités en plants et en subventions.