Le ministre chargé des relations avec le Parlement, Lahbib Choubani, multiplie les bourdes. Après une première sortie maladroite au sujet du financement des associations, qui lui a valu récemment une mise en demeure de la part d’un collectif de 400 ONG et une deuxième au sujet des festivals, le ministre vient de commettre un autre impair qui ne manquera pas de mettre à mal la cohésion de la majorité. Mais cette fois-ci il est allé plus loin en s’en prenant d’un seul coup aux parlementaires (voir article page 5) et surtout à ses propres collègues du gouvernement. A la sortie du dernier Conseil de gouvernement, Lahbib Choubani a, en effet, livré des chiffres qu’il a dit concoctés par son département sur la prestation des ministres au Parlement. L’auto-évaluation et l’autocritique sont, certes, des exercices très louables, mais encore faut-il en user de manière objective, impartiale et sans visées politiques ou politiciennes. Ce qui n’est manifestement pas le cas ici. Car comment expliquer que les trois ministres qui ont été pointés du doigt par Choubani comme étant ceux qui se sont le plus absentés des séances des questions orales du Parlement soient, en même temps et paradoxalement, ceux qui ont été le plus présents et qui ont répondu au plus grand nombre de questions ? Le ministre de l’agriculture et de la pêche maritime, Aziz Akhannouch, n’a d’ailleurs pas tardé à réagir aux déclarations de Choubani en donnant les chiffres omis par ce dernier et en corrigeant ses propos. «Le document en question indique clairement que le ministre de l’intérieur, celui de l’équipement et moi-même avons été les plus sollicités par les parlementaires et nous avons répondu au plus grand nombre de questions orales contrairement à l’interprétation qui en a été faite», explique M. Akhannouch. Ce dernier rajoute que «s’il y a un vrai bilan à faire ce serait sur la base des résultats et de l’efficacité au lieu de procéder à un simple comptage des absences». Se contenter, en effet, de relever seulement le nombre de présences et d’absences des ministres sans plus est un exercice digne d’une crèche et rien d’autres.
Son collègue de la jeunesse et des sports, le haraki Mohamed Ouzzine, a également fait part de son indignation après les déclarations de Choubani. Un agissement que M. Ouzzine a qualifié carrément de contraire à la déontologie en rappelant, à son tour, que les éléments fournis dans le rapport et l’interprétation qui en a été faite sont faux et tendancieux. «En réalité, un ministre qui a été sollicité 100 fois et qui a répondu présent à 75 reprises est de loin le plus efficace qu’un autre qui a été sollicité 20 fois et qui se serait absenté à 10 reprises», explique un haut responsable gouvernemental qui estime lui aussi tendancieuse l’interprétation des chiffres présentée par le ministre Choubani.
Lors du Conseil de gouvernement, tenu le jeudi 13 septembre, le ministre chargé des relations avec le Parlement avait fait un exposé sur le bilan des deux dernières sessions. Mais étonnamment, et selon des sources bien informées, il a nié avoir remis des copies à certains médias dans une tentative d’éteindre le feu qu’il venait d’allumer. Mais pour beaucoup d’observateurs de la chose politique au Maroc, la démarche du ministre Choubani interpelle quant aux vraies motivations et les bourdes sont trop «flagrantes» et répétitives pour relever de la simple maladresse qu’on pourrait mettre sur le compte de l’inexpérience. En tout cas, de tels agissements, venant d’un ministre PJD, sèment le doute dans la tête des alliés du PJD au sein de la coalition. Et surtout, elles donnent une piètre image du degré de cohésion de la majorité.