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Le message codé de Youssef Fikri

Youssef Fikri n’a pas froid aux yeux. Il n’a pas non plus à craindre le châtiment qu’il encourt suite aux crimes qu’il a commis ou ordonné. Bien plus, il reconnaît avoir agi de la sorte dans le cadre de ce qu’il appelle le Jihad. Un jihad qui à ses yeux n’a aucune signification autre que de perpétrer des actes de barbarie et de mutilation de personnes dont le seul tort est d’avoir été sur sa route…
Dans sa lettre publiée par l’hebdomadaire arabophone Assahifa, il énumère sans sourciller les fetwas qu’il a lancées contre les victimes. « En 1998, écrit-il, nous étions dans la ville de Youssoufia, avec quelques frères, pour le travail de moralisation dans une ville où la débauche et la prostitution étaient florissantes. C’était une action que nous menions pacifiquement et qui a permis de réduire ces actes. Notre action a connu un succès tel que la police a commencé par nous traquer et a arrêté certains de nos frères. (…) J’ai opté depuis pour la clandestinité et deux mois après nous sommes revenus à la ville pour laisser un message à la police: tuer le dénommé Omar el Ferrak».
Pire, Fikry raconte comment ils ont fait pour réduire au silence celui qu’il qualifie de homosexuel notoire. Celui qui selon le justicier Fikry avait un homme comme femme et qui n’a pas voulu revenir à la bonne voie.
«On a beau essayer de le raisonner, mais rien à faire. Sa conception de la liberté individuelle froisse les sentiments des Musulmans et dépasse toutes les limites de l’acceptable. Nous avons appliqué les préceptes du prophète». Juste après ce forfait, le sieur Fikry et ses acolytes ont quitté Youssoufia pour Nador. Ils ont loué une chambre avec un certain Mohamed. «Je n’ai jamais vu quelqu’un qui haïssait autant que lui l’Islam. Il injuriait dieu et n’arrêtait pas de se moquer du prophète. Il a fallu répliquer», écrit-il. La sentence est connue : Mohamed a été tué. Dans sa lettre, Fikry ne nie rien de ce qu’on lui reproche. Il met tout sur la nécessaire réplique aux forces de l’ordre et aux ennemis de l’Islam. «Trois après, un de nos frères a été arrêté et nous avons appris ce qu’il a enduré et la torture qu’il subie. Nous avons donc décidé de réagir et c’est Abdelaziz Azadi qui prétendait être procureur du Roi alors qu’il était notaire qui est tombé entre nos mains. Il a payé le prix », ajoute Fikry… Difficile de revenir sur tous les crimes commis par la bande de Fikry. Difficile de faire remuer le couteau dans la plaie des familles des victimes. Sauf que le pire est à craindre.  La lettre de Fikry donne froid au dos quand il parle de l’obligation de poursuivre la lutte contre les athées et les impies. Une lutte par le sang afin de laver l’image de l’islam. Il appelle carrément aux meurtres et aux mutilations. Pour lui, il n’est pas acceptable qu’on laisse faire les ennemis de dieu et les ennemis de l’Islam. La messe est dite. «Nous continuerons à nous battre jusqu’au triomphe de la loi de Dieu sur les imposteurs et les pseudo-musulmans», lance-t-il en guise de menace. On parle même que la lettre comportait des messages codés par lesquels Fikri ordonne à ses acolytes de passer à l’acte.
La lettre de Fikry n’est pas un document sans importance. Au-delà des menaces à la démocratie qu’il profère, au-delà des professions de foi, on est en droit de dire s’il ne s’agit pas d’un détraqué mental. Mais là est une autre histoire.
Ce qui est sûr maintenant c’est que l’affaire Fikry dès son déclenchement ne présageait rien de bon. Il fallait la prendre à sa juste mesure en son temps. Elle préfigurait ce qui s’est passé à Casablanca le 16 mai. Les aveux d’un tueur en série ne sont pas légion. Fikry l’a fait. Il ne s’agit pas d’un polar ou d’un film d’horreur. Il s’agit de faits réels que le criminel reconnaît par voie de presse. C’est original. Mais c’est dangereux.

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