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Le syndicalisme en mutation

L’Union marocaine du travail est le premier syndicat du Maroc. Chronologiquement en tous cas. A ce titre de doyen, l’union a connu toutes le péripéties de la vie politique nationale. Depuis l’époque du protectorat, au cours de laquelle il avait joué un rôle de premier plan, en étant la première organisation vraiment structurée à lutter pour l’indépendance. Une action qui avait commencé depuis l’exil de feu SM Mohammed V en 1953, jusqu’à ce que le royaume recouvre son indépendance.
L’UMT a donc été cette centrale syndicale, profondément ancrée dans la dimension ouvrière de la société marocaine, qui a suivi parfois en protagoniste de premier plan et parfois en témoin, même insuffisamment immunisé contre les remous de la vie politique. Une qualité de doyen qui fera accuser à l’UMT le contre-coup des différents brassages politiques du pays. La centrale était là quand, après la scission de l’UNFP, le parti de l’Istiqlal tint à avoir son propre syndicat en créant l’UGTM. L’UMT était encore là, quand l’USFP, nouveau parti, prenant la voie du parti de l’Istiqlal, créait la CDT. L’UMT est toujours là aujourd’hui, alors que le maelstrom du mouvement syndical national tourne à sa vitesse maximale avec quasiment une vingtaine de syndicats, plutôt d’étiquettes syndicales déposées auprès des pouvoirs publics, fleurissant au rythme des naissances de partis.
De tous ces remous, forcément, l’UMT ne pouvait ne pas accuser le coup. Subir les conséquences d’une syndication en pleine crise. Essayer tant bien que mal de maintenir l’hégémonie que suppose sa préséance chronologique, dans une société où aucune des trois principales centrales syndicales ( UMT, CDT et UGTM ) ne peut se targuer d’être honorablement représentée dans l’ensemble des secteurs d’activité. Si des bastions, «plutôt fluctuants», n’ont toujours pas changé de détenteurs, l’UMT conserve haut la main les siens.
L’Union est toujours la principale centrale syndicale représentant les masses dans des structures comme l’ONE, la CNSS, la RAD ou encore dans des secteurs comme les mutuelles, les oeuvres sociales. Une inamovibilité à laquelle l’on tient et qui demeure la principale carte de visite de la centrale. Cet état de fait s’illustre à chaque 1-er mai. L’occasion pour la doyenne des centrales syndicales marocaine d’aligner ses troupes dans ses secteurs de prédilection, essentiellement les PME et PMI, et tous les secteurs où le travail manuel est une donne de base, comme les textiles, l’industrie alimentaire, les cosmétiques etc.
Ce faisant, l’UMT se démarque tout à fait des autres centrales, la CDT en tête, qui reste confinée plutôt dans le secteur de l’enseignement et quelques secteurs semi-publics. En même temps, l’UMT s’accordent à dire les observateurs, n’aura pas, en chantre du syndicalisme indépendant et autonome, joué le rôle d’opposition qui lui revenait de droit sous l’ère de l’alternance. Elle a plutôt mal accompagné cette phase de transition, justement parce que la centrale elle-même, confient des spécialistes, vit aussi une transition axée sur la relève. Une transition qui marque quelque peu le rythme de l’action de la centrale, et en atténue la portée, sans toutefois complètement occulter son poids en tant que paramètre de base de toute composition politique au pays. Sur le plan international, l’UMT reste imbattable. La doyenne des centrales syndicales marocaines est membre fondateur de plusieurs unions syndicales. Entre autres, l’Union syndicale panafricaine, ou encore l’Union internationale des travailleurs libres.
Le leader Mahjoub Benseddik a été à deux reprises membre du comité exécutif du Bureau international du Travail ( BIT) lequel est l’organe exécutif de l’OIT. De plus l’UMT est membre fondateur du Bureau arabe du travail (BAT), dont la présidence a été pendant une dizaine d’années assurée par un responsable de l’union, feu Hachmi Bennani. En accueillant aujourd’hui le congrès de l’Union internationale des syndicats des travailleurs arabes, l’UMT se replonge dans son substrat de base et confirme une dimension internationale jamais démentie. Egalement une légitimité historique jamais remise en cause. Autant de signes, que la « léthargie » actuelle de la centrale de Mahjoub Benseddik, et chantre du syndicalisme autonome, ne saurait être qu’une transition. A l’image de la donne politique du pays.

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