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Les bégaiements de l’histoire

La nouvelle n’a pas étonné les observateurs avertis. Le 27 octobre 2001, Rabat annonce le rappel de son ambassadeur à Madrid, Abdesslam Baraka, «pour consultation et pour une durée indéterminée». Le malaise couvant depuis des mois entre les deux pays voisins, était enfin étalé au grand jour et livré aux analystes de tous bords. Une chose fait l’unanimité. Le conflit entre le Maroc et l’Espagne ne date pas d’aujourd’hui. Les relations entre les deux pays n’ont cessé de se dégrader depuis l’annonce de l’échec des négociations pour le renouvellement de l’accord de pêche Maroc-Union europénne, dont l’Espagne est le principal bénéficiaire. Entre Rabat, fermement décidé à préserver ses ressources, et Madrid, qui veut le poisson marocain, tout le poisson marocain et à ses conditions, la «guerre» est déclarée. José Maria Aznar, chef du gouvernement espagnol, se retient à peine de promettre publiquement ses foudres à ce Maroc qui ose tenir tête au représentant «sudiste» de l’Union européenne. En totale impunité, les pêcheurs andalous s’en donnent à coeur joie et saccagent les convois de camions marocains en transit vers les marchés de l’Europe. En totale impunité aussi, de gros bras espagnols se rabattent sur nos MRE. La presse espagnole, infatiguable, entretient un sentiment de vindicte populaire, de haine du Moro, sur fond d’étroits intérêts. Au cours de l’été 1999, c’est l’explosion d’El Ejido et d’Almeria. Autant d’outrages aux principes de bon voisinage, ne suffisaient sans doute pas au gouvernement de José Maria Aznar. Il fallait frapper là où ca risquait de faire le plus mal. Madrid, prenant de la distance par rapport à l’Europe, s’oppose farouchement au plan de règlement du conflit au Sahara marocain dans le cadre de la réunion de la quatrième commission de décolonisation de l’ONU. Pire, un “référendum » est organisé dans huit grandes villes d’Andalousie sur la question . Il aurait été difficile d’imaginer meilleur moyen pour nuire aux relations entre les deux pays. L’ambassadeur du Maroc à Madrid est donc rappelé et les nuages assombrissent officiellement désormais le ciel maroco-espagnol. Après un étonnement peu convaincu exprimé du bout des lèvres par Josep Piqué, chef de la diplomatie espagnole, les pressions reprennent de plus belle. Madrid alterne mains tendues et voltes-face. L’accord sur la main d’oeuvre est suspendu, avant d’être officieusement remis à l’ordre du jour. Le plan de règlement de James Baker butte presque sur le soutien inattendu de Madrid. En même temps, le pavillon Maroc d’une exposition à Madrid se voit retirer un soutien promis et des journalistes et militants marocains sont expulsés comme de vulgaires clandestins. C’est la passion dans toutes ses contradictions.

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