Le Maroc a procédé récemment à la signature d’un protocole relatif à la Convention des droits de l’enfant. Grâce à ce protocole, tout enfant ayant été victime d’une quelconque violation de ses droits peut soumettre de façon individuelle des plaintes auprès du comité des droits de l’enfant. Un pas jugé majeur dans la consécration des droits des enfants. Il y a lieu de souligner néanmoins que ce protocole ne prendra véritablement effet qu’à partir du moment où il aura été ratifié par au moins dix Etats membres des Nations Unies. Il est important de savoir aussi que le Maroc, ayant signé et non ratifié ce protocole, ne peut être juridiquement responsable devant ce comité. Il y a un peu plus d’un mois, une délégation marocaine avait participé aux travaux de la 19e session du Conseil des droits de l’Homme qui s’étaient tenus à Genève. Au cours d’une cérémonie organisée par les Nations Unies, le ministre de la justice, Mustapha Ramid, a signé le 3ème protocole facultatif à la Convention des droits de l’enfant relatif à la procédure de présentation de communications. Autrement dit, une fois ce protocole ratifié, les enfants de notre pays auront la possibilité de soumettre des plaintes concernant les violations de leurs droits au regard de la Convention des droits de l’enfant (CDE) et des deux premiers protocoles facultatifs portant respectivement sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et sur les enfants dans les conflits armés. La plainte devra être adressée au Comité des droits de l’enfant qui après examen déterminera si la Convention a été violée. Comment cela se fera-t-il concrètement? Et quelles sont les limites de ce protocole? Tel que formulé, ce protocole ne peut que faire la joie des ONG qui œuvrent pour son adoption depuis 2006. Ce nouveau protocole permet à tout enfant de déposer une communication individuelle devant le Comité des droits de l’enfant. Il faut cependant souligner qu’aucun mécanisme de dépôt de plainte individuelle n’existe à ce jour et ce sont les Etats parties à la convention qui sont tenus d’adresser de façon périodique des rapports au Comité des droits de l’enfant sur la situation de ces derniers. Pour les rédacteurs de ce protocole, «ce texte consacre la prise en compte de la parole de l’enfant. Le Comité sera guidé dans ses fonctions par le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant et gardera à l’esprit les droits et le point de vue de l’enfant». Quoiqu’en théorie, les enfants peuvent directement porter plainte au Comité, dans la pratique, la grande majorité des plaintes sera probablement adressée par les représentants légaux de l’enfant, les avocats, parents et autres acteurs. Les conditions exigées pour que les plaintes des enfants qui s’estiment lésés dans leurs droits soient prises en considération sont toutefois jugées contraignantes. En effet, pour qu’une plainte soit recevable, elle doit être formulée par écrit. L’enfant ou ses représentants doivent déjà avoir porté plainte devant une juridiction nationale et ce n’est que dans le cas où ce processus n’a pas abouti que l’enfant peut se tourner vers le Comité. S’ajoute à cela le fait que la plainte doit absolument être déposée devant le Comité dans l’année qui suit la fin de la procédure devant la juridiction nationale, elle ne doit pas être anonyme, ni infondée et ne doit pas constituer un abus de droit. Ces conditions limitent ainsi l’utilisation de ce recours, notamment celle relative aux délais pour introduire la plainte devant le Comité. Lors de l’examen de la plainte, le Comité pourra demander à l’Etat partie d’adopter des mesures provisoires pour éviter tout dommage irréparable à l’enfant et demander des mesures de protection pour éviter à l’enfant de subir des représailles, de mauvais traitements ou intimidations en raison de la communication présentée. S’il estime que la CDE a été bafouée, le Comité fera ensuite des recommandations spécifiques à l’Etat responsable de la violation. Pour rappel, sans la coalition de quatre-vingt ONG œuvrant pour le respect des droits de l’enfant dans le monde, ce troisième protocole n’aurait pas vu le jour. Avant d’être adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies le 19 décembre 2011, il fut d’abord accepté à l’unanimité le 17 juin 2011 par le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies. Le combat de ces ONG est loin de prendre fin à ce stade puisque sans ratification d’au moins dix Etats membres des Nations Unies, ce texte ne peut entrer en vigueur.