Les ondes de la radio et de la télévision ont encore été de service pour la retransmission, en direct, de la seconde séance de témoignages des victimes des années sombres. Un exercice dont l’objectif est d’atténuer les souffrances des victimes, de façon à pouvoir définitivement tourner la page.
Abdellah Aâgaou était l’un des intervenants. Natif de l’année 1947, il est l’une des victimes des disparitions forcées. Abdellah Aâgaou a comparu, en novembre 1972, devant le tribunal militaire. Il a été condamné à trois années d’emprisonnement pour son implication présumée dans la tentative de putsch du 16 août 1972.
Abdellah Aâgaou commença à purger sa peine dans la prison centrale de Kénitra. Le 7 août 1973, il sera enlevé dudit centre pénitentiaire à 2h du matin, puis transféré, en secret, dans le tristement célèbre bagne de Tazmamart. Là, plus aucune nouvelle et aucune information sur son sort ne filtrera, jusqu’au 29 octobre 1991, date de sa libération.
Saleh Saâdallah était, lui aussi, sur la tribune à partir de laquelle il allait livrer ses témoignages et exorciser ce qu’il a enduré en matière d’exactions. Saleh Saâdallah est né en 1934. il a été victime de détention arbitraire. Le 16 juillet 1963, il fut arrêté au niveau du siège du parti de l’Union nationale des forces populaires. Il fut incarcéré au commissariat du Maârif pendant une durée de 28 jours, avant son transfert à Derb Moulay Chérif, où il sera détenu 5 jours durant, avant d’être libéré sans avoir fait l’objet d’aucun procès. Dix années plus tard, les ennuis de Saleh Saâdallah reprendront lors de son arrestation, le 19 mars 1973, et son incarcération au commissariat de Derb Moulay Cherif où il passera tout un mois. Il sera, par la suite, transféré au centre de détention «Corbesse», à l’aéroport Casa-Anfa.
Saleh Saâdallah passera 11 mois dans ce centre de détention avant d’être transféré à la prison civile de « Ghoubeyla » à Casablanca, puis au centre pénitentiaire de «Aïn Borja», ensuite à la prison de «Laâlou», jusqu’à ce que la Chambre criminelle prononce son innocence le 19 avril 1977.
Natif de l’année 1948, Ahmed Harzenni a été victime de détention arbitraire en 1972. Arrêté le 22 février 1972 pour ses activités politiques au sein de la gauche marxiste, il est resté en détention au Derb Moulay Chérif jusqu’au 10 mars 1972. Il sera, par la suite, transféré à la prison centrale de «Ghoubeyla» à Casablanca, où il restera jusqu’au mois d’août 1973. Il sera transféré à la prison centrale de Kénitra où il restera jusqu’au 22 Août 1984.
Native de Marrakech le 12 Avril 1955, Maria Ezzaouini a été arrêtée au domicile familial le 8 juin 1977, en raison de ses activités politiques au sein de la gauche marxiste, elle a été transférée au Centre de détention secret de Derb Moulay Chérif, où elle passera six mois. Ensuite, elle séjournera successivement à la prison de Ghoubeyla à Casablanca, où elle passera un mois et, enfin, à la prison de Meknès, où elle passera près d’une année. Maria Ezzaouini devra sa libération à un non-lieu.
Mustapha Lamrani est né en 1925. Il a participé au mouvement national au nord du Maroc dans les rangs du parti démocratique de l’Indépendance (PDI). Il a été victime, au début de l’indépendance en 1956, d’un enlèvement suite auquel il sera conduit au centre de détention secret connu sous le nom de « Dar Bricha », où il a subi différentes sortes de sévices, avant d’être transféré successivement vers d’autres centres de détention secrets entre Tétouan, Al-Hoceima et Nador. Il a été libéré en 1957.
Natif de Rabat le 10 novembre 1963, Abdellah Haidou a, lui aussi, été victime de détention arbitraire. Arrêté à Mohammedia le 13 août 1983, parmi le groupe islamiste des 71, il a été détenu pendant six mois au centre de détention secret de Derb Moulay Chérif, où il a subi toutes sortes de tortures avant son transfert, avec son groupe, à la prison civile de Ghoubeyla.
Condamné à vingt ans de prison ferme, il a été libéré le 21 juillet 1994, suite à une grâce royale après avoir purgé 11 ans entre la prison civile de Safi et la prison centrale de Kénitra. Ainsi prend fin cette première étape des auditions publiques des victimes des années de plomb. Une étape importante pour les victimes en question, mais aussi pour toutes les composantes de la société, afin de pouvoir, sereinement, tourner la page d’un triste épisode de l’Histoire du pays.