La position du Maroc contre le prosélytisme évangéliste est ferme. Cinq ressortissants étrangers ont été expulsés, samedi 5 décembre, par les autorités marocaines pour «réunion non déclarée et prosélytisme évangéliste», selon la préfecture de police d’Oujda. Il s’agit de deux Sud-Africains, deux Suisses et un Guatémaltèque. Ces prosélytes expulsés ont été interpellés, vendredi 4 décembre, suite à une perquisition dans une maison à Saïdia. Ils font partie d’un groupe composé également de douze Marocains, arrêtés puis relâchés le même jour, affirment les services de police. Les ressortissants suisses et le Guatémaltèque ont été refoulés via le poste frontalier de Melillia, alors que les ressortissants Sud-Africains l’ont été par l’aéroport Mohammed V de Casablanca, ajoute la même source. L’expulsion des cinq prosélytes, qui n’est pas la première en son genre, a lancé de nouveau le débat sur la position des autorités marocaines à l’égard des activités de prosélytisme évangéliste. Les réactions recueillies par ALM à ce propos sont, à quelques nuances près, unanimes sur la pertinence et la légalité de la décision prise par le Maroc. Me Réda Oulamine, avocat de l’Ordre de Casablanca, affirme que «l’Islam est la religion de l’Etat» et que «les autres communautés religieuses peuvent pratiquer librement leur culte tant qu’elles ne font pas de prosélytisme». Il souligne, par ailleurs, que le refoulement des évangélistes est «une décision administrative prise avec un certain excès de zèle». Selon cet avocat, cette décision «n’est pas représentative de l’ensemble de l’opinion marocaine». Le président du Conseil des ouléma de l’Oriental, Mustapha Benhamza, indique, pour sa part, que les campagnes de prosélytisme n’ont rien à voir avec la liberté d’exercice du culte chrétien. «Les visées des prosélytes sont loin d’être purement religieuses. Les prosélytes mènent leurs campagnes dans les pays d’Afrique et n’ont pas de campagnes similaires et qui soient aussi influentes en Occident. On peut donc parler de visées politiques plutôt que religieuses», affirme ce théologien. L’islamologue Saïd Elakhal estime , quant à lui, que les activités de prosélytisme connaissent de plus en plus une intensification et une expansion au niveau de plusieurs régions. «L’intensification du prosélytisme le met à découvert et inspire désormais la panique. Ce qui oblige, ainsi, les autorités marocaines à agir», explique M. Elakhal. Cela dit, et sous un autre angle, certains observateurs ont relayé l’expulsion des évangélistes par le Maroc avec l’interdiction de la construction des minarets en Suisse. Ils se sont posé la question de savoir s’il existerait un lien entre les deux faits surtout que deux personnes expulsées sont de nationalité suisse. Sur ce point, Mustapha Benhamza affirme que ce constat «aurait été valable si le Maroc n’avait pas expulsé par le passé des prosélytes». «Le Maroc a toujours lutté contre les campagnes de prosélytisme. L’objectif des prosélytes n’est pas religieux mais plutôt politique», note M. Benhamza. Même son de cloche pour Me Réda Oulamine. L’avocat estime qu’il n’y a pas lieu de comparaison entre l’expulsion et l’interdiction des minarets. «On ne peut pas comparer le refoulement des évangélistes à l’interdiction des minarets en Suisse. En effet, l’interdiction des minarets en Suisse a été été décidée par le biais d’un référendum. Il s’agit donc de l’expression de la souveraineté nationale suisse», souligne Me Oulamine. Saïd Elakhal indique, pour sa part, qu’il ne faut pas comparer l’incomparable. «Nous ne pouvons pas établir une comparaison entre deux faits incomparables. L’expulsion des évangélistes rentre dans le cadre de la préservation de la sécurité spirituelle des Marocains. Alors que l’interdiction faite par les autorités suisses de construire des minarets a d’autres motivations qui n’ont rien à voir avec le droit des musulmans de pratiquer leur religion», explique l’islamologue.