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Rester vigilant

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ALM : Tout d’abord, quels sont les événements, aussi bien sur le plan politique qu’économique, qui ont marqué l’année 2003 et qui auront, à votre avis, une incidence sur 2004 ?
Moulay Ismaïl Alaoui : L’année 2003 a été par excellence l’année du Code de la Famille et de l’entité “Equité et Réconciliation”. Deux événements extrêmement importants qui constituent, à mon avis, le sésame de l’entrée du Maroc dans la modernité. Il y a eu également les tragiques attentats du 16 mai. Mais, à quelque chose malheur est bon, ces attentats, pour abjectes et injustifiables qu’ils sont, nous ont poussé à repenser la menace terroriste. Il en ressort que la lutte contre l’obscurantisme est une lutte de longue haleine et qui concerne toutes les composantes de la société marocaine. Economiquement, nous avons assisté à une certaine embellie de l’économie nationale. Les idées que nous avons toujours défendues concernant les grands travaux commencent à être pris en compte. Toujours est-il que l’édification des infrastructures, pour aussi importante qu’elle est, ne peut se faire sans l’implication et la mobilisation de la jeunesse dans la transformation que connaît le pays. Ce qui participera à la liquidation du chômage technique dont une large franche de la société. Une mobilisation qui doit s’ajouter à celles, théoriques : la transformation de le dette extérieure du Maroc et l’utilisation des moyens propres du pays par la force de l’épargne nationale.
Nous avons également assisté à des élections qui, somme toute, n’ont pas tenu leurs engagements. En termes de transparence, que faut-il envisager pour que l’Histoire ne se répète plus ?
Ce qui est constaté au Maroc, c’est que les élections, quand elles sont directes, se déroulent désormais dans des conditions honorables de transparence et de rigueur. Mais à chaque fois que les élections sont indirectes, la magouille et la corruption refont surface. Maintenant, il faut faire en sorte que la forme indirecte soit la plus restreinte possible. Une révision de la constitution, notamment en ce qui concerne les dispositions relatives à la deuxième Chambre, est nécessaire.
L’approche techniciste, aura-t-elle fait ses preuves en matière de gestion du pays ?
L’approche techniciste existe et existera toujours. Ce qu’il faut, c’est que le politique contrebalance cette présence. L’approche politique, à même de faire participer toutes les composantes de la société dans l’effort de développement, doit impérativement renaître de ses cendres. Au delà des personnes, l’année 2004 sera l’année du travail pour mener à terme les projets qui sont dans le pipe. A commencer par la loi sur les partis politiques que l’on doit laisser voir le jour. Ceci, dans le sens non pas d’ajouter à la multiplication constatée des partis politiques, mais celui d’en faire des pôles avec une vision par rapport à l’avenir et une visibilité à l’égard des moyens d’assurer la transition démocratique du pays. Nous agissons à cet égard dans la constitution de deux pôles. L’un de gauche et l’autre de modernité. La Koutla doit également reprendre du service.
Sur le plan économique, plusieurs faiblesses ont été constatées. A la baisse d’investissements réels s’ajoutent les privatisations, de plus en plus rares ? Quel regard portez-vous sur ces deux aspects ?
Il ne suffit plus d’appeler à davantage de privatisations, puisqu’il ne reste pratiquement plus rien à privatiser. Ce qu’il faut c’est établir un bilan des privatisations réalisées jusque-là au Maroc et dresser les points forts et les points faibles de cette politique. Le but est de remédier aux aspects négatifs de ce processus. Il ne faut plus compter à tout bout de champ sur des privatisations. D’autant qu’il existe des services publics importants qu’il faut garder aux mains de l’Etat. De manière générale, la croissance au Maroc a certes été dopée par une pluviométrie favorable, mais il faut consentir encore plus d’efforts pour aller plus loin. Cela passe inévitablement par la lutte contre l’ignorance et l’illétrisme. Pour cela, une armée du savoir s’impose.
Le Maroc a ouvert plusieurs chantiers de développement économique. Mais le gouvernement, a-t-il les moyens de ses ambitions?
La société marocaine dans l’ensemble a les moyens des politiques tracées. Ce qu’il faut, je le répète, c’est une mobilisation des masses. Je reste optimiste. Maintenant, il faut revoir certains aspects de la fiscalité nationale. Que ceux qui ont les moyens payent. Il est d’ailleurs inconcevable qu’un secteur comme l’agriculture continue à ne pas accomplir ses obligations, en termes de fiscalité, envers l’Etat et les citoyens. Certaines filières agricoles payent certes des impôts indirectes, mais une participation plus directe est plus que jamais souhaitable. Le Code du travail est une avancée historique dans l’évolution du pays. Reste à savoir comment il sera appliqué sur le terrain. Il s’agit là d’une lutte de classes, entre patrons et salariés, qui va prendre les devants de la scène.
L’année 2004 aura également été celle des procès, notamment depuis le 16 mai…
La loi est faite pour être appliquée. Mais toute loi ne peut s’appliquer que dans le cadre du respect des droits de l’Homme. L’une ne va pas sans l’autre et c’est sur cette équation qu’il faut veiller.

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