ALM : Comment se présente la campagne électorale à Rabat ?
Driss Laghgar : La campagne est longue et dépasse, dans sa durée, toutes celles qui l’ont précédée, y compris les consultations législatives. Ceci est un premier point. Ensuite, le cumul des déficits au niveau de la gestion communale ne motive pas les gens et ne les incite pas à participer massivement à cette opération. Les espoirs affichés par les citoyens, suite à l’adoption de la Charte communale de 1976 qui retire certaines prérogatives aux agents de l’autorité, en faveur des élus, ont été déçus au fil des ans. A cela, s’ajoutent les manoeuvres de banalisation de l’action politique partisane et les falsifications des élections. Pour remédier à cette situation, nous plaçons en tête de nos préoccupations la question de la mobilisation des citoyens pour la participation aux échéances consultatives.
Sur le terrain, nous constatons que la campagne est terne et que le mode de scrutin de liste provoque des réticences de bon nombre de citoyens.
D’abord, il faut comprendre que le citoyen est, aujourd’hui, plus exigeant vis-à-vis des partis politiques. Il n’attend plus les discours des leaders pour constituer une opinion sur ce qui se passe autour de lui. D’où l’extinction progressive des grands rassemblements et des manifestations de masse. De nos jours, la campagne se fait dans le calme et dans des milieux restreints. Deuxièmement, le mode de scrutin de liste a rendu difficile la survie des entités partisanes artificielles qui ne disposent de programmes politiques ni de vrais militants. Cela n’est pas le cas pour l’USFP.
Mais, c’est l’administration qui détient l’initiative ?
Il est certain que beaucoup de choses positives ont été faites dans le sens de la consolidation des acquis démocratiques, et il est clair que le Maroc d’aujourd’hui diffère de celui d’hier. Nous entamons ces échéances sur la base d’un potentiel d’un million et demi de jeunes ayant entre 18 et 20 ans qui participent pour la première fois au Maroc aux élections, d’un nouveau code électoral et d’un nouveau régime de gestion locale permettant aux villes de retrouver leur unité, et partant d’échéances législatives libres et intègres qui se sont déroulées, il y a une année déjà. L’intégrité est devenue partie prenante du comportement des sphères compétentes, d’où le gel d’activités de 217 d’agents d’autorité et la condamnation d’un député pour falsification de signatures. Grosso modo, je crois que l’interventionnisme de l’administration, souvent nuisible à la démocratie relève du passé. Après une phase de neutralité passive, nous assistons, aujourd’hui à une nouvelle étape de neutralité active.
Pourquoi l’effort n’est-il pas visible aux partis politiques ?
La date du 12 septembre constitue, sans doute, un événement d’une grande importance pour le développement et le progrès du pays, dans la mesure où les observateurs du monde entier vont s’enquérir du degré de mise à niveau de notre champ politique partisan et des élites locales du Maroc. Nos villes ne sauraient faire face à la mondialisation sans une mise à niveau politique à même de baliser le terrain à l’attraction des investissements et au développement économique et social.
Ce que vous dites ne concorde pas avec le fait que 50% des candidats ont un niveau d’instruction ne dépassant guère le certificat d’études primaires…
Cela confirme la complexité des moments de transition démocratique. Il n’est pas dû à un simple hasard que SM le Roi insiste dans tous ses discours sur la nécessité pour le pays de faire appel aux compétences confirmées et de mettre un terme aux différents aspects de conservatisme, de népotisme, de pillage et d’abus de pouvoir. Bien entendu, les efforts déployés pour la démocratisation et la modernisation du pays continuent de rencontrer des résistances, notamment de la part de certains agents d’autorité qui préfèrent avoir des interlocuteurs faibles pour pouvoir les dominer et les mettre sous leur tutelle.