Aujourd’hui Le Maroc : Quel commentaire faites-vous de la non-retransmission des rencontres de la CAN 2004 sur les chaînes de télévision nationales
Karim Alem : Je voudrais commencer par attirer votre attention sur une chose très importante. Le débat concernant la retransmission des matches de la Coupe d’Afrique des Nations date uniquement de quelque temps. Cela, sachant pertinemment que les droits TV de cette compétition ont été cédés il y a plusieurs années déjà. Nous avons trop tendance à attendre la dernière minute pour essayer de résoudre des problèmes qui auraient pu être évités. Pour cela, il aura fallu que nous nous y consacrions à l’avance. Et c’est justement ce qui s’est passé avec la chaîne arabe ART. Cette dernière a négocié avec les deux chaînes nationales en étant en position de force, puisque quelques jours uniquement nous séparent du coup d’envoi de cette manifestation. La chaîne arabe a acquis les droits TV de la CAN il y a près de deux années. Au fil des négociations, la position d’ART n’avait plus un caractère commercial, mais a pris des allures de position de principe. Pas de retransmission en direct sur des chaînes arabes. Une position tout à fait légale du point de vue juridique, puisque la chaîne ne fait qu’exercer son droit d’acquéreur, mais qui n’en est pas moins scandaleuse.
Pour vous, la plus grande part de responsabilité se trouve du côté marocain ?
Pas tout à fait. Les Marocains ne sont pas les seuls à avoir été confrontés à un refus aussi catégorique de la chaîne arabe qui détient les droits de retransmission sur l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Les Algériens et les Egyptiens, dont les sélections nationales sont engagées dans les phases finales de la compétition, se trouvent dans la même situation que nous. La Confédération Africaine de Football (CAF) a également une part de responsabilité à assumer. L’instance continentale aurait pu prévoir une clause spéciale permettant aux chaînes nationales d’avoir accès aux rencontres de leurs sélections nationales engagées dans la compétition. Chose qui n’a pas été faite. D’ailleurs, lors du congrès de la CAF, tenu à Bamako en marge de la CAN 2002, et où il a été question, entre autres, des droits TV relatifs aux éliminatoires de la CAN et de la Coupe du monde. J’ai personnellement attiré l’attention de Aïssa Hayatou, quant aux modalités que comprend le contrat de cession, et qui n’était pas très bien verrouillé à mon avis.
Et la Fédération royale marocaine de football dans toute cette affaire ?
Les droits de retransmission télévisuelle de la CAN et des autres compétitions des clubs ont été concédés directement par la Confédération africaine à la société SportFive de Jean-Claude Darmon, qui entretient de très bonnes relations dans les milieux footbalistiques africains. Ceci étant, les fédérations nationales avaient également leur mot à dire. Elles devaient formuler toute réserve ou objection sur des questions pouvant porter atteinte à leurs intérêts. Elles auraient pu imposer une clause spécifique pour garantir à leur public de voir les matches en direct. Il est clair que dans le cas actuel, elles n’ont pas rempli cette fonction.
ART a en outre acquis les droits TV des CAN 2006 et 2008. Que peut-on faire pour éviter de retomber dans un scénario tel que celui de la CAN 2004?
Le refus de l’ART de vendre les droits TV de la CAN 2004 aux chaînes arabes est scandaleux. Mais, en nous refusant le droit de suivre l’évolution des Lions de l’Atlas en direct sur nos écrans, la chaîne arabe nous a mis la puce à l’oreille. Les deux chaînes nationales n’ont certes pas les moyens de payer des millions de dollars en contrepartie d’un direct, mais elles pourront au moins réfléchir à d’autres solutions et surtout s’y mettre dès maintenant. Cette situation a été un blocage positif qui nous permettra d’être plus vigilants les prochaines fois.
Peut-on espérer un déblocage de la situation à la dernière minute?
Compte tenu de la déception ressentie par le public marocain, je pense qu’il n’est pas exclu qu’une décision de très haut niveau puisse intervenir pour débloquer la situation, quitte à ce qu’il y ait arbitrage. Il est évident que derrière le refus d’ART se trouvent des considérations marchandes. Cette chaîne ne visait qu’à augmenter son parc d’abonnés au Maroc et, en passant, son chiffre d’affaires.