ALM : Récemment une vingtaine de cas humains de grippe aviaire ont été recensés en Turquie. L’Europe est en état d’alerte maximale. Qu’en est-il du Maroc ? Sommes-nous toujours à l’abri d’une éventuelle contamination ?
Youssef Alaoui : Je confirme que le Maroc est à l’abri de ce fléau. Le ministère de l’Agriculture, les Eaux et Forêts et celui de la Santé publique n’ont pas attendu que les choses s’aggravent pour mettre en place un dispositif visant à prévenir une éventuelle contamination. Le comité d’urgence suit de très près l’évolution de la situation. À partir d’avril 2002, il n’y a eu aucune importation de poussins. L’ensemble de la production locale vient du Maroc. Cela témoigne du caractère préventif du plan d’action gouvernemental. En matière de prévention, la politique préventive du Maroc a déjà porté ses fruits. Il suffit de rappeler le cas de la vache folle. Grâce aux actions de l’Etat, le Maroc a été fort heureusement épargné. Aucun cas de vache folle n’a été déclaré sur le territoire marocain.
Les récents développements qu’a connus la maladie de la grippe aviaire ont-ils eu un impact sur l’activité avicole au Maroc ?
Malheureusement, oui. Personne ne peut nier l’impact négatif qu’ont eu les derniers développements. L’activité a connu, en effet, une baisse de l’ordre de 20 %. Il s’agit d’un impact psychologique qui n’a pas lieu d’être. On a tous vu les photos à la télévision des enfants atteints en Turquie. Mais ce qu’il faut savoir, c’est que cette maladie se transmet par les voies respiratoires et non pas par la consommation. Il y a donc un amalgame. S’il y avait un quelconque danger à manger du poulet, on l’aurait dit. C’est bien sûr la vie de nos enfants qui est en jeu. On ne va pas s’amuser avec. Aujourd’hui, la baisse de la consommation marocaine touche plus les petits éleveurs. Beaucoup de gens vivent de cette activité. Et cette psychose injustifiée les pénalise énormément.
D’après vous, quelles sont les mesures à prendre pour faire face à la grippe aviaire ?
Aujourd’hui, les mesures sont déjà prises. Une surveillance des oiseaux migrateurs est en court. Tous les sites sont sous haute surveillance. Sur le plan sanitaire, il y a tout un dispositif.
Rappelons que le législateur avait mis au point en 1999 la loi 48/99 qui régit la production agricole, les modes de contrôle et qui oblige à une mise à niveau sanitaire. Pour vous dire que rien n’est laissé au hasard. Même sur le plan sanitaire, les autorités marocaines se veulent très exigeantes.
En parlant d’oiseaux migrateurs, vous ne trouvez pas qu’ils représentent un danger pour les élevages ?
Il faut savoir que dans notre pays, on n’a pas une culture d’avoir par exemple des canards ou des oies. C’est vrai que la prolifération de cette maladie au niveau international est favorisée par le mouvement des oiseaux migrateurs. Mais, au Maroc, l’absence d’élevages intensifs de palmipèdes (oies, canards…) réduit considérablement les risques d’une transmission du virus entre les oiseaux migrateurs et les élevages avicoles. Enfin, le virus d’influenza ne peut pas infecter directement l’homme. Il faut qu’il passe par le porc. Et là encore, l’absence d’élevages intensifs de porc rend cette éventualité très minime.
Quel message adressez-vous aux consommateurs marocains ?
Notre message est basé sur la transparence. S’il y avait le moindre problème, on l’aurait fait savoir. C’est une question de santé publique. On ne peut pas jouer avec la vie de nos enfants. Aujourd’hui, les consommateurs doivent se montrer solidaires avec le monde rural. Beaucoup de gens vivent de leur élevage et il serait malheureux de les pénaliser sur la base de rumeurs. Surtout, lorsque ces rumeurs ne sont pas fondées.