Les parlementaires pakistanais ont élu samedi le très controversé Asif Ali Zardari, veuf de Benazir Bhutto, à la présidence de la République Islamique du Pakistan, en plein chaos politique et économique et en proie aux violences des combattants islamistes proches d’Al-Qaïda.
Un nouvel attentat suicide, à la voiture piégée, a d’ailleurs fait au moins 16 morts et plus de 80 blessés samedi à un poste militaire dans un marché fréquenté du nord-ouest.
M. Zardari a recueilli plus de 70% des suffrages des élus du Parlement et des quatre assemblées provinciales, a annoncé la commission électorale. Cette élection se déroulait 20 jours après la démission du chef de l’Etat Pervez Musharraf, poussé vers la sortie par la nouvelle coalition au pouvoir, issue des législatives du 18 février, et emmenée par le Parti du Peuple Pakistanais (PPP). Ce mouvement est dirigé par M. Zardari depuis l’assassinat, le 27 décembre 2007 dans un attentat suicide, de l’ex-Premier ministre Benazir Bhutto, alors leader de l’opposition. Les deux autres candidats, le magistrat Saeed-uz-Zaman Siddiqui et Mushahid Hussain, un proche de Musharraf, n’ont recueilli respectivement que 22 et 6% des voix du collège électoral. Asif Ali Zardari, 53 ans, connu jusqu’ici à l’étranger seulement pour sa réputation sulfureuse, est encore largement affublé de son sobriquet «M. 10%» dans son pays. Il demeure un symbole de la corruption au sommet du pouvoir dans les années 90, quand son épouse, dont il était ministre, dirigeait le pays. Il est demeuré impopulaire parmi les 168 millions de Pakistanais, mais il a pris la tête du PPP à la surprise quasi-générale au lendemain de la mort de son épouse, puis a été désigné candidat à la présidence malgré des remous au sein de cette formation. Quatre généraux putschistes se sont proclamés président et ont dirigé le Pakistan durant plus de la moitié de ses 61 ans d’existence. Et l’armée a perdu, depuis 2002, plus d’un millier de soldats dans des combats avec les islamistes proches d’Al-Qaïda et des talibans afghans qui, selon Washington, ont reconstitué leurs forces dans les zones tribales frontalières avec l’Afghanistan. Les forces américaines en Afghanistan ont lancé mercredi leur première intervention militaire directe connue sur le sol pakistanais depuis l’Afghanistan. Au moins 15 civils ont été tués, selon Islamabad, dans un village frontalier. Washington refuse de commenter, mais n’a pas démenti.
• Emmanuel Giroud (AFP)