Ces évacuations sont intervenues trois jours après que le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy se fut déclaré pour la fermeture de tous les squats et immeubles insalubres suite à deux incendies, les 26 et 29 août, ayant fait 24 morts et causé une vive émotion en France.
Si les propos de M. Sarkozy, connu pour ses déclarations musclées, avaient déjà suscité la polémique, c’est surtout la méthode forte employée vendredi qui a choqué les associations et l’opposition.
Tôt vendredi, jour de la rentrée scolaire en France, des policiers sont entrés sans avertissement préalable dans un squat installé dans une ancienne imprimerie de Paris, rue de la Fraternité, dans le nord-est de la capitale, en défonçant la porte.
"Si vous voulez expulser des gens, vous prévenez avant, vous envoyez des lettres, vous ne venez pas comme ça le matin (…) ils nous prennent pour des bêtes? C’est parce qu’on est noir?", a déclaré, sous le choc, M’Benin, une auxiliaire de vie de 23 ans qui habitait ce squat avec son mari et son fils.
Une soixantaine de personnes d’origine africaine squattaient cet immeuble.
Un autre squat, occupé par quelque 80 Ivoiriens dans le sud de Paris, a été également évacué par la force. Une dizaine de personnes, dont un sénateur et un député du parti des Verts, ont tenté en vain de s’y opposer. Dans la banlieue, une dizaine de Maliens ont aussi été expulsés d’un squat.
La préfecture de police a assuré avoir pris des dispositions pour que toutes les personne expulsées "puissent, en famille, être transportées dans des lieux d’hébergements décents".
"Nicolas Sarkozy est passé du discours aux actes dans les pires conditions, en faisant évacuer par la force et sans préavis deux immeubles occupés", a dénoncé un responsable du parti socialiste, Patrick Bloche.
"Nous sommes d’accord pour éradiquer les squats, mais dans de bonnes conditions, dignes. Ce matin, ce n’est pas ce qui s’est passé", a pour sa part déclaré Patrick Doutreligne, un responsable de la Fondation abbé Pierre, en relevant que "les familles refusent les solutions d’hébergement proposées et sont sur le trottoir".
Le président de l’association Droit au Logement, Jean-Baptiste Eyraud, a lui estimé que ces évacuations constituaient "une réponse dure du gouvernement à l’absence de réponses au manque de logements".
"Il y avait d’autres alternatives que les mettre dehors au petit matin. Cette opération est une aubaine pour les marchands de biens qui ont pu acheter cet immeuble trois fois rien parce qu’il était squatté et qui vont pouvoir le revendre maintenant beaucoup plus cher", a-t-il dit à l’AFP.
La mairie de Paris a recensé en 2002 un millier d’immeubles insalubres. La ville compte par ailleurs une soixantaine de "squats dangereux", selon la préfecture.
Sommé de trouver rapidement une solution à ce problème, le Premier ministre Dominique de Villepin a annoncé jeudi le déblocage de 50 millions d’euros et la réquisition de terrains en faveur du logement d’urgence.
Les causes des incendies du 26 et 29 août ne sont toujours pas connues. Un autre incendie dans un hôtel meublé du coeur de la capitale en avril avait fait 24 morts, également des Africains en attente de logements sociaux.