Le partage des technologies

Accélérer les efforts au niveau mondial pour apporter les nouvelles technologies agricoles aux fermiers les plus pauvres et contribuer ainsi à l’alimentation de ces pays. Tel est le premier appel lancé par les participants au Sommet international de la Terre qui s’est ouvert lundi à Johannesburg, en Afrique du Sud. «Cela ne sert à rien d’avoir des enfants en bonne santé s’ils doivent mourir de malnutrition», a ainsi souligné mardi Pedro Sanchez, ex-directeur du Centre international de recherches agro-forestières. «Il ne sert à rien d’être un écologiste avec le ventre vide», a-t-il ajouté. S’il est sûr que la santé et la protection de la nature constituent des priorités, pour les populations démunies l’urgence réside plutôt dans l’accès à l’alimentation. Une donnée qui passe par la production et donc par le développement de l’agriculture.
Cette évidence est d’ailleurs énoncée au moment où l’on parle d’une menace de famine pour 14 millions de personnes en Afrique australe et que l’agriculture zimbabwéenne, ancien grenier de toute la région, se voit réduite à néant, faute de réforme agraire cohérente. Cela fait par ailleurs plusieurs années que les pays en voie de développement tentent d’obtenir plus d’aides et un meilleur accès aux technologies, voire aux marchés occidentaux. Au cours des discussions de mardi, plusieurs délégués ont aussi critiqué le système européen d’aides agricoles, soulignant qu’il ne faisait que rendre plus difficile la concurrence pour les pays pauvres. Cette insuffisance de partage et ce fossé persistant entre le nord et le sud a accentué depuis Rio deux fléaux : 800 millions de personnes souffrent chaque année de faim, et environ deux-tiers des terres cultivables sont affectées par la dégradation des sols. C’est pour ces raisons que les délégués ont particulièrement insisté sur l’accès aux nouvelles technologies en matière de fertilisants. Selon M. Sanchez, seuls 150.000 fermiers à travers toute l’Afrique en ont à ce jour bénéficié, faute de volonté politique de la part des pays riches.
Ce dernier aspect plane toujours sur l’ensemble des travaux de cette conférence qui se prolongera jusqu’au 4 septembre. Peu d’observateurs croient en effet à un résultat concret et crédible des débats auxquels participeront quelque 104 chefs d’Etat et de gouvernement. «Cette conférence sera différente», a encore déclaré mardi Nitin Desai, secrétaire général du Sommet organisé par l’ONU.
«Nous sommes concentrés sur l’action» a-t-il assuré face aux rumeurs pessimistes et persistances d’échec. Les manifestants continuaient pour leur part mardi de gronder dans les rues et de tenir leur sommet parallèle, malgré l’arrestation de plus d’une centaine d’entre eux depuis la semaine dernière. Deux rassemblements de faible importance ont déjà eu lieu lundi dans les rues de Sandton avec environ 200 activistes éthiopiens et zimbabwéens qui ont manifesté pour dénoncer le trucage des élections par leur gouvernement respectif.
Le front anti-mondialisation entend également organiser une manifestation à quelques pas du complexe occupé par les délégués du Sommet situé dans la banlieue riche de Johannesburg, pour réclamer des actions concrètes. Ils défileront près du ghetto noir d’Alexandra où vit une population très pauvre manquant des services essentiels que les grands de ce monde ont promis de partager.