Moubarak monte les enchères

Seulement deux semaines séparent les Égyptiens de la date du scrutin présidentiel qui aura lieu le 7 septembre prochain. C’est la première fois que les Égyptiens seront appelés à élire un président directement par suffrage universel. Une nouvelle expérience pour le Raïs qui brigue un cinquième mandat de six ans. Dès le début de sa campagne électorale, Hosni Moubarak a choisi de s’attaquer au volet économique. Dans un pays où les indicateurs sociaux sont alarmants, Moubarak a opté pour la lutte contre le chômage comme cheval de bataille. Le Raïs a promis de créer des millions d’emplois une fois qu’il sera réélu. 
«L’un des principaux défis est de créer 700.000 emplois par an pour ceux qui entrent sur le marché du travail année après année,»  a-t-il déclaré.
«J’affirme devant vous que la création de nouvelles opportunités d’emplois a été et reste le défi le plus sérieux et le plus important auquel j’ai fait face, à vos côtés, au cours de ces dernières années,» a lancé le Raïs à la foule.
Le chômage, estimé à 9,3 % selon les chiffres officiels et à plus de 20 % selon d’autres estimations, «continuera d’être le défi le plus important que j’affronterai avec vous,» a souligné le président.
Le programme du Raïs prévoit notamment la facilité d’octroi de prêts à des jeunes et à des femmes, chefs de petites ou moyennes entreprises. Une mesure qui pourrait coûter 63 milliards de livres égyptiennes (11 milliards de dollars) sur les six prochaines années et qui permettra de créer un million d’emplois au cours de la même période, a-t-il ajouté.
Moubarak a également dévoilé un plan pour construire 1.000 usines censées fournir un emploi à 1,5 million d’Egyptiens, tout comme il entend développer le secteur agricole en fournissant des terres à des jeunes Egyptiens. En résumé, c’est un programme musclé qu’a présenté le président égyptien.
Pendant que Hosni Moubarak mène une campagne intense avec son programme pharaonique, ces rivaux l’accusent d’abuser de la machine gouvernementale de propagande. Ces deux principaux adversaires, en l’occurrence Aymane Nour, chef du parti Al-Ghad, et Noumane Gomaa, président du parti Wafd, sont montés au créneau en multipliant les accusations contre lui. Ces derniers l’accusent de "violations répétées" du code électoral.
Mercredi, le quotidien indépendant Al-Masri Al-Yom a publié un encadré sur le nombre de mots consacrés lundi aux candidats, par les trois principaux journaux gouvernementaux. Le résultat se passe de tout commentaire : Moubarak a reçu une couverture de 13.878 mots, alors que ses neuf rivaux ont eu 3.000 mots au total.
De son côté, le journal indépendant Al-Doustour a accusé le président d’avoir profité de son poste pour gonfler son crédit auprès de la population, en inaugurant au cours des derniers mois plusieurs hôpitaux, ponts et centrales électriques. Selon l’AFP, l’attitude de Raïs a poussé environ 300 Egyptiens, dont des artistes connus, a protesté mardi dans le centre du Caire. "Non à la dictature ! À bas Moubarak le dictateur ! Oui à la liberté d’expression et de création"! ont-ils écrit sur une banderole. "Non à un cinquième mandat", réclamait une autre. Moubarak, au pouvoir depuis 24 ans, devra affronter neuf autres candidats lors de la première élection présidentielle pluraliste de l’histoire du pays, mais il fait figure d’archi-favori.
La protestation s’est déroulée à l’appel d’une nouvelle organisation, Ecrivains et artistes pour le changement, qui s’est ralliée aux appels demandant le départ de M. Moubarak. «Les élections sont symboliques. C’est honteux que les partis de l’opposition y participent», a déclaré l’écrivain Mohammed al-Boussati. «Nous devons boycotter le scrutin, c’est une comédie. Nous sommes là pour appeler les Egyptiens à boycotter les élections», a souligné un artiste, Mohsen Helmy.