Décidés à empêcher le déroulement des élections locales du 10 octobre prochain, les animateurs du mouvement de contestation en Kabylie ont convenu d’organiser une marche de protestation le 5 octobre et une grève générale de deux jours les 8 et 9 octobre. Le dispositif d’empêchement du scrutin démarre à l’occasion de l’anniversaire des émeutes d’octobre 1988, date à laquelle de jeunes Algériens étaient descendus dans la rue afin de dénoncer le système des généraux. Partie de Kabylie, la révolte des jeunes en colère s’est vite étendue à toute l’Algérie, malgré une répression qui a provoqué en deux mois une centaine de morts.
Depuis, les manifestations de mécontentement ne se sont plus arrêtées. Toutes les occasions sont bonnes pour dénoncer un régime corrompu, arrogant et opaque par une jeunesse débordante de colère, dont la puissance ébranle bien des conforts. Pendant ce temps, le débat en Algérie continue de se focaliser sur les luttes de clans qui opposent le président Abdelaziz Bouteflika au pouvoir réel des généraux, qui ont confisqué les institutions du pays pour les mettre au service de leurs intérêts sans se soucier du peuple. Alors, la rue finit de détruire ce qui reste du service public en s’attaquant aux bureaux des impôts, aux caisses d’assurances, aux bureaux de poste, aux caisses de retraites publiques. En s’en prenant à toutes les expressions matérielles de l’Etat qui l’a abandonnée, la foule des laissés-pour-compte réclame à coups de cailloux le droit à la vie. La campagne électorale se poursuit dans l’indifférence générale et les rares candidats approchent les électeurs potentiels avec appréhension tant les stigmates de la forte abstention lors des dernières législatives sont vivaces. Même le FLN, parti majoritaire, souffre d’un déficit de légitimité laissant les citoyens, qu’il est censé représenter, sans voix et livrés à leur triste sort. C’est bien pourquoi, la contestation à travers l’émeute maille les jours algériens qui se ressemblent et ce, dans toutes les régions du pays.
Les élections locales risquent cette fois encore de connaître une forte défection des électeurs en raison notamment des bilans négatifs des assemblées précédemment élues. Les structures de proximité censées répondre aux besoins des citoyens sont les plus éloignées de leurs préoccupations en raison de la cupidité vorace de la plupart des élus. Comme pour illustrer la déliquescence du pouvoir algérien, la justice française vient de débouter l’ancien homme fort du régime, le général Khaled Nezzar, qui poursuivait l’auteur d’un livre pour diffamation, estimant que l’Histoire jugera si «les généraux ont tué des milliers d’Algériens».