Solidarité et mobilisation générale sont les maîtres mots de l’opération dans laquelle s’est engagé le pays de l’érable pour recevoir et porter secours aux réfugiés syriens. Depuis le mois de décembre, ils arrivent en masse. Scolarisation, assurance-maladie, logements, soutien à la recherche d’emploi, rien n’est oublié pour les intégrer très vite. Les organismes communautaires, bien que débordés, prêtent main forte au gouvernement
Les réfugiés syriens continuent d’affluer au Canada.
Selon les récentes données du gouvernement fédéral, ce sont près de 16.000 réfugiés syriens qui ont été accueillis sur le sol canadien jusqu’à présent. «De ce nombre, 5.468 sont parrainés par le secteur privé, alors que 9.088 sont pris en charge par le gouvernement d’Ottawa et environ 1.130 ont pour leur part été accueillis dans le cadre d’un programme partagé», est-il indiqué. Au Québec actuellement, près de 3.000 personnes réfugiées d’origine syrienne sont arrivées.
L’objectif global du Québec pour 2015-2016 est de recevoir 7.300 réfugiés syriens. Malgré cette arrivée en masse, difficile pour les médias de rencontrer les nouveaux venus dans le pays de l’érable. Le département ministériel de l’immigration de la province indique que «afin de respecter les réfugiés, ainsi que ce qu’ils ont vécu dans leur pays de provenance et ce, en plus de nombreuses heures de vol, les médias n’ont pas accès directement à eux lors de leur arrivée». Aussi, nombre de journalistes ont-ils fait appel aux organismes d’accueil et d’intégration ou de parrainage pour rencontrer les nouveaux venus. «Pas le temps», «débordés», les organismes en questions ne coopèrent pas avec les médias pour les introduire auprès des réfugiés syriens.
«Ces dernières semaines, nous avons été bombardés de demandes de la part de journalistes pour des interviews, des témoignages, des films, etc. auprès des familles nouvellement arrivées. Nous manquons de temps pour coordonner toutes ces demandes. Nous devons nous concentrer sur notre mission première, soit d’accueillir et d’installer ces familles», répond clairement à notre demande un responsable d’un centre en charge de l’accompagnement des réfugiés. Après moult réponses du genre, c’est finalement grâce à un enseignant dans un collège et acteur associatif que nous réussissons à rencontrer des réfugiés syriens au sein d’un établissement scolaire. Ce sont de jeunes adolescents qui malgré leur tout jeune âge et le déchirement qu’ils vivent, témoignent d’une grande maturité de raisonnement. Ils parlent librement de la situation politique de leur pays et déplorent ce qu’il est devenu.
«C’est pour que nous puissions poursuivre nos études que nos parents ont immigré car nous n’avons plus d’avenir dans notre pays», explique Michel, l’un d’eux. Là-bas, bien avant la guerre, sa famille vivait de manière aisée. Les parents respectivement exerçaient une profession libérale et aucun d’eux n’avait jamais pensé à l’immigration. Aujourd’hui, ce qui leur manque le plus ce sont les proches et amis qu’ils ont laissés au pays. «J’aimerais tant y revenir ne serait-ce que quelques minutes pour voir mes amis et ma famille», lance Michel tristement. Ce qui le marque le plus au Québec c’est le rude climat hivernal.
Mais lui, comme les autres, apprécie grandement toute la logistique qui a été mise en place pour les accueillir et les installer.
A peine arrivés, ils ont très vite été inscrits dans un établissement où ils suivent des cours de français et de mathématiques. Un cursus de mise à niveau qui se poursuivra pendant plusieurs mois, explique une de leurs professeurs. Pour tous c’est indispensable, notamment en matière d’apprentissage de la langue car la communication avec leur environnement est encore difficile.
«Malgré ce handicap nous ne nous sentons pas étrangers, alors qu’au Liban où nous avons transité avant d’arriver au Canada, nous avons vraiment eu le sentiment de ne pas être bien considérés. Les Québécois nous traitent avec beaucoup de respect et ce que nous apprécions le plus c’est le melting-pot de la population sans que personne ne s’ingère dans les affaires de l’autre, sans préjugés sur quiconque», souligne pour sa part Line, une adolescente arrivée au Québec il y a quelques semaines. Les souvenirs, empreints de nostalgie, de la vie prospère que sa famille menait dans une zone agricole en Syrie sont encore tout frais dans sa mémoire. Aujourd’hui, ses parents ont du mal à s’intégrer dans le pays d’accueil et le train de vie qu’ils avaient dans leur pays fait partie du passé. Tous reconnaissent cependant que financièrement ils ne manquent de rien dans leur nouvel environnement pour mener une vie décente.
De plus, visiblement pour tous, seul compte l’avenir des enfants. Autour des nouveaux venus, c’est une véritable chaîne de solidarité qui s’est mise en place depuis le lancement de l’opération d’accueil. «Grâce à la générosité de tous, nous avons récolté des dons de toute sorte pour les réfugiés à ne plus savoir à qui donner, ni quoi en faire. A Laval, dans ma localité, la plupart des réfugiés syriens, nouvellement arrivés jusqu’à présent, sont parrainés par leur famille et donc déjà soutenus par leurs proches», précise un représentant d’une association. D’autres organismes se disent débordés par le grand flux des arrivées et ont demandé il y a un peu plus de deux semaines une pause dans le processus d’accueil pour mieux accompagner les nouveaux arrivants.
Aujourd’hui, l’opération d’accueil a repris et la mobilisation est quasi générale.
La préoccupation de tous est de répondre aux besoins des enfants comme de leurs parents. Si dans certaines villes, les ressources humaines et les logements manquent pour installer tous les réfugiés, le défi, malgré quelques dysfonctionnements, est tout de même en passe d’être relevé grâce à l’implication de tous. «Une véritable mobilisation qui rappelle celle des années 1980 lorsque les réfugiés vietnamiens fuyaient leur pays», note un représentant des organismes communautaires.
Logistique
Pour accueillir 25.000 réfugiés d’ici à fin février, ce sont de grands moyens logistiques que le Canada a mis en œuvre. Dès leur arrivée, ils sont pris en charge par l’État et transférés vers les villes de destination, est-il indiqué.
Ainsi, dans la province du Québec, tout nouvel arrivant reçoit par le biais de représentants gouvernementaux le certificat de sélection du Québec, une lettre de la ministre de l’immigration, de la diversité et de l’inclusion et un document d’information, ainsi qu’un numéro temporaire de la carte d’assurance maladie du Québec.
Des manteaux et des bottes leur sont aussi remis, offerts par le gouvernement fédéral, précisent les représentants du département de l’Immigration. Pour les adultes comme pour les enfants des cours de français sont également offerts. Les personnes réfugiées ont aussi accès dès leur arrivée à d’autres services tels que l’évaluation du bien-être et de l’état de santé physique, l’évaluation comparative des études effectuées hors Québec et le soutien à la recherche de l’emploi. Un grand investissement en termes de moyens humains et financiers.
A elle seule, la province du Québec a alloué un budget de 29 millions de dollars pour accueillir les réfugiés syriens.
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