Les Togolais ont voté dimanche pour élire un successeur à leur défunt président, Gnassingbé Eyadéma. Le scrutin majoritaire à un tour a été précédé d’une campagne agitée, marquée par des affrontements entre partisans de Faure Eyadéma, fils du défunt, et ceux d’Emmanuel Bob Akitani. Pendant la campagne, ces affrontements avaient déjà fait plusieurs dizaines de blessés. Vendredi, le ministre de l’Intérieur, François Esso Boko, avait fait encore monter la tension, en réclamant la suspension de l’élection face aux risques de "guerre civile", avant d’être limogé.
Le jour du vote, la violence s’est accentuée, suite à des accusations croisées de fraudes entre parti au pouvoir et opposition. La coalition de l’opposition et son candidat ont accusé le Rassemblement du peuple togolais (RPT) d’avoir organisé une fraude à grande échelle, afin de permettre l’élection de Faure Gnassingbé. Le RPT a, de son côté, accusé des militants de l’opposition d’avoir "bourré des urnes", et attaqué ses militants dans plusieurs localités.
Les quartiers populaires de Lomé, fiefs traditionnels de l’opposition, ont été le théâtre de violents affrontements. De jeunes opposants armés de machettes et de gourdins ont érigé des barricades à la fermeture des bureaux de vote. Ils ont affirmé que le RPT allait "voler la victoire". Le bilan provisoire des violations fait état d’au moins 3 morts, et plus de 20 blessés, dont trois par balles, à Lomé, selon des sources diplomatiques et hospitalières. Plusieurs témoignages ont fait état d’urnes emportées, parfois brûlées, par des militaires ou des inconnus, rapporte l’AFP. En même temps, la confusion a régné dans certains quartiers de Lomé, notamment ceux favorables à l’opposition, où les forces de sécurité ont tiré à plusieurs reprises. Un responsable de l’opposition a annoncé, avant le vote, que l’opposition descendrait dans les rues si la victoire de Faure Gnassingbé était proclamée.
Ce dernier a, de sa part, affiché sa sérénité dimanche. "Nous avons déjà remporté une première bataille : l’élection a eu lieu au moment prévu par la Constitution", a-t-il déclaré.
Par ailleurs, il a réaffirmé son intention de former un gouvernement d’union et d’ouverture. Répondant aux accusations formulées par l’opposition, le candidat du RPT, a déclaré que si l’opposition parle de fraude, c’est peut-être qu’elle sent déjà qu’elle va perdre.
Par ailleurs, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a déclaré qu’elle ne sera pas en mesure de donner les résultats de l’élection présidentielle avant mardi. La Commission a déclaré n’avoir recueilli lundi que 14 % des voix.
Au lendemain des élections, un climat de crainte a régné sur la ville de Lomé. Les habitants se sont enfermés dans leurs maisons par peur d’une explosion de violence à l’annonce des résultats.
Les magasins, les banques et certaines écoles sont restés fermés, alors que la date de publication des résultats du premier scrutin demeure inconnue.
Le président togolais Gnassingbé Eyadéma est mort, samedi 5 févier 2005, à l’âge de 69 ans, alors qu’il était évacué du pays pour recevoir des soins. Le général Eyadéma avait dirigé le Togo pendant 38 ans, après avoir pris le pouvoir le 13 janvier 1967 par un coup de force.
Deux heures après l’annonce de son décès, les forces armées du Togo ont nommé son fils, Faure Gnassingbe, à la présidence du pays. La Constitution prévoit qu’en cas de décès, l’intérim de la présidence soit confié au président de l’Assemblée nationale, Fambare Ouattara Natchaba. Et le scrutin présidentiel doit, en outre, être organisé dans un délai de 60 jours. Mais le général Nandja a expliqué que le président de l’Assemblée était "absent du territoire national" et que le pays se retrouvait de fait confronté à une "vacance totale du pouvoir" justifiant la nomination de Faure Gnassingé.