Saddam Hussein prisonnier de guerre. Capturé le 13 décembre, six mois après la fin officielle de la guerre, l’ancien maître de Bagdad bénéficie d’un statut dont n’a pu bénéficier les 650 prisonniers de la célèbre base de Guantanamo. La nouvelle, intervenue presque en même temps que l’annonce d’un tribunal fédéral de se pencher sur le cas d’un prisonnier saoudien détenu aux USA, en sol américain, dans les mêmes conditions juridiques que les pensionnaires de l’île cubaine, est tombée samedi à Bagdad et semble avoir surpris tout le monde, y compris les autorités intérimaires qui ont exprimé vivement leur surprise. Elle met fin à une grande incertitude sur le statut de l’ex-Raiss. Le Pentagone aurait fait l’annonce sans consulter visiblement le Conseil du gouvernement irakien. D’où la prompte réaction du ministre irakien de la justice, Hachim Abdel-Rahman, pour qui, c’est aux irakiens de décider du sort de Saddam Hussein. La décision de Washington d’accorder au président déchu le statut de prisonnier de guerre est, selon le ministre, «une décision politique» et non «juridique». Une indignation loin d’influencer l’Oncle Sam pour qui, Saddam Hussein, en tant qu’ancien commandant en chef de l’armée irakienne, a droit au statut de prisonnier de guerre, et aux protections garanties par la convention de Genève. Le statut permet un éventuel procès pour crimes de guerre. La charge de déterminer les procédures légales à l’encontre de Saddam Hussein reviendrait à la puissance occupante, d’après un haut responsable du Comité International de la Croix Rouge (CICR). Pour le moment, les interprétations de cet acte sont nombreuses. Le statut de prisonnier de guerre permet à Saddam d’être jugé comme combattant, ne pouvant pas donc être accusé d’avoir fait la guerre. L’homme fort de Bagdad devra à répondre toutefois de crimes contre l’humanité, distincts en droit international des crimes de guerre. Personne, encore moins le conseil de gouvernement irakien n’est en mesure de dire aujourd’hui quand et où se tiendra le procès. A l’heure où nous mettions sous presse, la Croix Rouge n’a toujours pas obtenu sa requête formulée dès l’annonce américaine, à savoir rencontrer le prisonnier Saddam. Celui-ci a un droit de traitement convenable et à la visite des délégués du CICR d’après les conventions de Genève. En théorie, aucune information ne devra lui être arrachée sous la contrainte. Pour le moment, d’après un haut responsable britannique, Saddam Hussein est peu communicatif depuis sa capture le 13 décembre. Il pourra désormais prolonger son mutisme en s’abritant derrière la troisième convention de Genève, adoptée le 12 août 1949 et relative au «traitement des prisonniers de guerre». Cette disposition précise dans son article 18 qu’un «prisonnier de guerre qui refuse de répondre à des questions ne peut être ni menacé, ni insulté, ni soumis à des traitements déplaisants ». Il ne peut pas non plus « être soumis à des tortures physiques ou mentales ».Pour le moment, la bataille juridique ne fait que commencer. Stratège, le président Bush est resté jusque-là assez réservé sur les statuts de milliers de prisonniers entre les mains des forces américaines. Le cas du prisonnier Saddam sonnera-t-il le déclic ?