Société

A Bab El Had, le coeur vivant de Rabat

Une majorité de Rbatis convergent le soir, après la rupture du jeûne, vers le marché de Bab El Had. Les centaines de mètres qui vont du marché central à « Souk Sebbat » -le marché de la chaussure– sont le champ, chaque soir, d’un imprescriptible manège. Tout paraît réglé comme du papier à musique. Quelques minutes avant la fin de la prière d’Al Icha, une dizaine d’hommes et de femmes, la mine ferme et le geste alerte, se tiennent aux aguets. Ils portent sur leur dos ou laissent traîner à même le sol de grands sacs de plastique parfois bleus, souvent noirs. Ils se dissimulent derrière les étalages garnis des magasins de la rue. Ils semblent à l’affût d’un arbitre qui va siffler le début d’une compétition. Vingt heures passée de quelques minutes. Le ballet commence. Dans une course effrénée, les uns et les autres se bousculent, s’injurient, jouent des coudes et finissent tant bien que mal par étaler leurs marchandises au beau milieu de la rue. Les derniers arrivés cherchent désespérément une place. Ils piétinent alors ceux qui ont déjà établi leurs quartiers. Alors, les jurons fusent, et le ton monte jusqu’à friser la bagarre générale. Les vendeurs se mettent à appâter les personnes qui sortent de la mosquée Moulay Slimane et les badauds qui s’aventurent à Bab El Had, par des cris rauques. Leurs voix s’entremêlent, dans un boucan énorme, à la musique qui monte des enceintes puissantes des chaînes Hi Fi des vendeurs de cassettes. « Eh j’ai crié crié Aline… » crie à son tour la sono stridente de l’un d’entre eux. « Ramadan est un mois de piété et de miséricorde » lui renvoie la sono du magasin d’en face. Depuis le début du mois sacré, la voix mielleuse d’un Cheikh égyptien semble avoir remplacé, à pied levé, les sempiternelles litanies du Chaâbi, déversées à longueur de journée. Il est vingt et une heures. La foule est de plus en plus dense presque compacte. Les passants souffrent pour se frayer un chemin. Hamid Morji dit «Sliek», assis sur ses genoux, s’excite devant ses vestons estampillés «Chevignon». Il les fait venir de Mellilia. Le voyage lui prend une journée entière. Hamid ne se plaint pas. Diplômé en électronique, il a quitté l’année dernière, sans remords, l’entreprise où il travaillait à Salé. Maintenant il roule pour son propre compte. C’est vrai qu’au début, il a galéré parce qu’il ne connaissait pas encore les filières de la contrebande. Résultat, ses vestons saisis par la gendarmerie et 10.000 DH volatilisés. A sa droite, un homme, la quarantaine passée, vend des horloges et des minicassettes «Made in Taïwan». A sa gauche, une femme, drapée dans une djellaba noire, essaie de fourguer aux passants des foulards «de soie de Chine», crie-t-elle à tu-tête. A onze heures, les gens se font rares et les vendeurs commencent à remballer leurs sacs. La rue se vide peu à peu et le calme règne à nouveau. Seuls quelques vendeurs de sandwichs sont encore là.

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