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Amal Zerrak : «Les traitements ne sont pas accessibles à tous les patients»

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ALM : Comment peut-on définir la polyarthrite rhumatoïde ?
Amal Zerrak : La polyarthrite rhumatoïde (PR) est le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires chroniques. C’est-à-dire qu’il s’agit d’une maladie articulaire qui s’accompagne d’une inflammation de la synoviale et qui va durer. La synoviale est la membrane qui tapisse l’intérieur de la cavité articulaire et qui a pour fonction de sécréter le liquide articulaire qui lubrifie l’articulation. Au cours de la PR, cette membrane est le siège d’une inflammation. Elle s’épaissit et sécrète une quantité trop importante de liquide qui s’accumule dans l’articulation. Celle-ci gonfle et devient douloureuse. Si l’inflammation de la membrane synoviale persiste, des conséquences sur tous les éléments de l’articulation (cartilage, os situé sous le cartilage) mais aussi sur ceux qui l’entourent (ligaments, tendons) vont survenir ce qui entraînera des déformations articulaires de la douleur et une incapacité fonctionnelle. Dans le cas de la PR, plusieurs articulations sont touchées, c’est pour cette raison que l’on parle de polyarthrite. Elle est classée parmi les maladies dites «systémiques» car elle ne touche pas que les articulations mais aussi divers organes notamment le cœur, les poumons, les reins, l’œil… Elle fait partie des maladies auto-immunes, car dans son déclenchement et dans sa pérennisation intervient un dérèglement de l’immunité avec formation d’auto-anticorps.

Quels sont les symptômes de cette maladie ?
La PR se caractérise au début par l’installation progressive de douleurs articulaires inflammatoires, c’est-à-dire en fin de journée, s’accompagnant le matin au réveil de raideur articulaire. L’examen révèle un gonflement douloureux d’une ou plusieurs articulations des doigts, hormis les interphalangiennes distales, des poignets, des coudes, des talons-pieds et des genoux. Ces atteintes s’associent à une fatigue et une fièvre. C’est à ce stade qu’il faut diagnostiquer précocement la maladie grâce à ce faisceau d’arguments cliniques, biologiques (VS et CRP pour évaluer l’importance de l’inflammation, anticorps antipeptiques citrullinés) et d’imagerie médicale (radiographie, mais surtout échographie et imagerie par résonnance magnétique ou IRM pour la détection précoce des lésions ostéo-articulaires). C’est à ce seul prix que l’on peut espérer un traitement rapide et un contrôle de l’évolution de la maladie. Si la PR évolue sans traitement, l’inflammation persiste et les articulations se dégradent progressivement du fait des lésions du cartilage, de l’os, des ligaments et des tendons. C’est ce qui se voit le plus souvent. Ces dégâts et déformations articulaires sont la principale source du handicap majeur qu’engendre cette maladie. A ce stade de la PR évolutive s’installent les atteintes extra-articulaires (cardiaques, rénales, pulmonaires, oculaires, cutanées, neurologiques, musculaires, hématologiques, etc.). C’est dire toute l’importance d’une prise en charge rapide de cette gravissime pathologie et cela pour conserver la fonction articulaire, éviter les déformations et l’atteinte des organes nobles, maintenir l’autonomie et améliorer la qualité de vie des patients atteints.

Cette maladie touche-t-elle beaucoup plus les hommes ou les femmes ?
La PR survient principalement chez la femme entre 35 et 60 ans, particulièrement en période périménopausique. A cet âge, la prépondérance féminine est très marquée, puisque quatre femmes pour un homme sont touchées. Toutefois, elle peut se voir à tout âge et également chez les hommes.

Les traitements de cette maladie sont-ils accessibles pour tous ?
Non, ils ne le sont pas. Tout d’abord par manque d’information de ces derniers par rapport à la maladie et aux possibilités thérapeutiques, et en second lieu par difficulté de financement du coût des bilans et des traitements que supporte le patient en l’absence de couverture médicale adéquate et de remboursement équitable comme toutes les autres affections de longue durée (ALD). Il était temps que l’on se penche sérieusement sur cette maladie, pour qu’elle ne soit plus le parent pauvre des ALD, et que les patients qui en sont atteints ne vivent plus dans la fatalité.

Concernant la prise en charge médicale, à combien les médicaments prescrits sont-ils remboursables ?
La PR est une affection de longue durée (ALD) dont le traitement demeure onéreux. A titre d’exemple, Arava coûte 11.525 DH/an, Mabthera 61.776 DH/an, Remicade entre 137.168 DH/an et 205.752 DH/an, etc. Et cela sans compter les bilans biologiques et radiologiques, les traitements locaux, la kinésithérapie, l’appareillage, la chirurgie et l’hospitalisation. Les médicaments sont remboursables à 90-95% par la CNOPS, et à seulement 70% par la CNSS, ce qui contraint les patients à supporter les 30% du ticket modérateur imposé par la CNSS, sachant que le taux de couverture a été révisé pour d’autres ALD et a atteint les 98%. Dans l’incapacité de payer ce tiers, les patients n’ont d’autre choix que d’arrêter leur traitement. En ce qui concerne les autres organismes, le taux de remboursement varie entre 80 et 90% selon les conventions.

Traitement de la polyarthrite rhumatoïde

Le traitement de la polyarthrite rhumatoïde repose sur l’association de plusieurs éléments, dont l’importance est variable selon chaque cas. Il est donc facile de comprendre qu’une prise en charge correcte nécessite l’intervention d’une équipe pluridisciplinaire : le rhumatologue hospitalier ou libéral pour coordonner la stratégie des soins, l’infirmière, le kinésithérapeute, le médecin de rééducation fonctionnelle, le chirurgien orthopédiste, l’assistante sociale, le psychologue, la diététicienne, l’orthésiste, et bien d’autres.
1- Les traitements médicamenteux généraux sont de deux types, les traitements symptomatiques, qui ne sont pas spécifiques de la polyarthrite rhumatoïde et qui agissent uniquement sur les symptômes et les traitements de fond qui bloquent plus spécifiquement l’évolution de la maladie.
2- Les traitements locaux, c’est-à-dire au niveau des articulations atteintes sont les ponctions évacuatrices et les infiltrations de corticoïdes, les synoviorthèses, les lavages articulaires et les synovectomies arthroscopiques.
3- L’éducation et l’information délivrées sur la polyarthrite rhumatoïde consistent à délivrer des informations sur la maladie et les traitements pour mieux faire face à la maladie en étant partie prenante dans la gestion du traitement.
4- L’approche médico-psychologique ne doit pas être négligée car il est normal que par moment les douleurs et la gêne retentissent sur le moral.
5- La réadaptation fonctionnelle est très importante quel que soit le stade de la maladie, mais elle doit être modulée par le kinésithérapeute et l’ergothérapeute en fonction de l’évolution. Elle permet de limiter la survenue des déformations, d’assurer le maintien de la qualité des muscles, et de lutter contre l’enraidissement.
6- La chirurgie fonctionnelle a pour objectif de rétablir la fonction et l’indolence.
Les bonnes règles sont une concertation entre rhumatologue et traumatologue orthopédiste, un regroupement des interventions pour diminuer la durée d’hospitalisation, et une réadaptation fonctionnelle post-opératoire.

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