Société

Bonnes feuilles : L’élite politique mise à l’écart dès l’indépendance (16)

Si les nationalistes avaient accepté, lors des pourparlers d’Aix-Les-Bains ou au cours d’autres contacts, une solution autre que le retour du Roi, ils auraient été obligés de participer, par la suite, à un gouvernement que le martyr Mehdi Ben Barka a qualifié de "fantoche", lors d’un meeting populaire dans la place des Oudayas, le 18 novembre 1955. Le colonialisme voulait instaurer les bases de ce gouvernement fantoche avant même le commencement des négociations d’Aix-Les-Bains. Pour toutes ces raisons, Boukhari n’a pas le droit de parler d’évènements importants dans l’histoire du militantisme national, et dire n’importe quoi en se contentant de répéter les propos de certains hommes politiques ratés.
Boukhari devrait se limiter uniquement aux détails de l’ambiance qui régnait dans les commissariats, aux techniques policières utilisées par le régime au cours des années noires et d’injustice qu’ont connues le peuple marocain, en général, et les militants, en particulier. Des injustices commises par des bourreaux responsables de la sécurité et la sûreté des citoyens.

Des taupes dans les syndicats et les partis politiques.
Avant de présenter son témoignage sur les années de plomb au Maroc à travers les colonnes du journal "Al Ahdath Al Maghribiya", Ahmed Boukhari, l’ancien agent du Cab 1, avait fait des sorties médiatiques, sur le même sujet, dans les pages de certains hebdomadaires et sur les ondes de chaînes satellitaires arabes.
A chaque fois, Ahmed Boukhari assurait que "la brigade spéciale", ou le Premier Cabinet du colonel Oufkir, plus connu par Cab1, avait réussi à infiltré des organisations de l’opposition de manière générale et le parti des Forces Populaires de manière particulière.
Cette infiltration consistait pour les services de la répression à recruter des taupes au sein du parti afin que le Makhzen soit au courant des moindres secrets de l’opposition. C’est une pratique courante dans les régimes policiers.
Il est quasiment inconcevable qu’une organisation syndicale ou un parti politique, qui représente un danger pour les gouvernements, soit à l’abri de ces infiltrations, sources de renseignements nécessaires à la préparation de rapports sur l’élite politique. Le Maroc ne fait pas exception, puisque les services secrets, à en croire Ahmed Boukhari, se sont attelés à recruter des taupes dans tous les partis politiques.
Dans ce même registre, Driss Basri, qui réside actuellement dans la capitale française, a déclaré à un de ses invités qu’il a rencontré Abdeljalil Fenjirou, pour la première fois, au printemps 1963. A l’époque, Fenjirou a été arrêté par une patrouille des Forces auxiliaires, après la campagne électorale, alors qu’il distribuait des tracts du Front pour la défense des institutions Constitutionnelles, FDIC.
Les membres de la patrouille se sont mêlé les pinceaux en croyant qu’il s’agissait d’un militant dans un parti d’opposition qui distribuait des tracts au-delà du temps légal de la campagne électorale.
Ils semblaient ignorer que le ministre de l’Intérieur, Ahmed Reda Guedira, en compagnie de Mahjoubi Ahardane, ministre de la Défense nationale, Abdelkrim El Khatib, ministre de la Santé et Ahmed Bahnini, ministre de la Justice, ont créé le FDIC, le 20 mars 1963 à Casablanca, en présence du Colonel Oufkir, directeur de la Sûreté nationale.
Et que le FDIC voulait obtenir la majorité parlementaire grâce à son leader, le ministre de l’Intérieur Ahmed Reda Guedira. Toutefois, le FDIC s’est efforcé à participer de manière normale à la campagne électorale de mai 1963, en faisant appel à des "militants" tel que Abdeljalil Fenjirou. Toutes ces données échappaient aux membres de la patrouille des Forces auxiliaires qui ont arrêté Abdeljalil Fenjirou, le "militant" du FDIC, quelques heures après la fin de la campagne électorale.
Les membres de la patrouille ont déposé le "militant" du FDIC dans le deuxième arrondissement de la Sûreté nationale de Rabat, qui était également le siège de la sûreté provinciale.
Et c’est là-bas où Driss Basri, chargé des renseignements généraux, a su que Fenjirou était arrêté. Mais avant qu’il ne soit libéré, de nouvelles relations avaient été nouées entre le fonctionnaire de la MAP et les services de sécurité. En 1964, il fut aperçu en train de couvrir le procès du "complot du 16 juillet 1963", d’abord comme journaliste, puis comme cadre technique chargé d’actionner l’appareil enregistreur lorsque le procureur Majid Benjelloun, "l’enfonceur", a voulu écouter l’interrogatoire effectué par le colonel Oufkir au principal accusé, feu F’quih Basri. La photo de Fenjirou près de l’appareil enregistreur est toujours disponible et a été publiée par la presse. C’est ainsi que tout a commencé pour Abdeljalil Fenjirou qui a réussi à gravir les échelons jusqu’à atteindre le poste de directeur général de la MAP, succédant au directeur-fondateur, Mehdi Bennouna. Et le dernier poste que Fenjirou a occupé fut celui d’ambassadeur du Maroc auprès de la République libanaise.
C’est ainsi qu’il apparaît que l’infiltration des organisations syndicales et des partis politiques a commencé très tôt, non seulement à l’égard des partis d’opposition, mais également contre les formations administratives pro-gouvernementales.
En fait, le régime policier recherche les faibles d’esprit qui passe du statut de membre d’un parti à celui de taupe qui présente des documents et des informations permettant au gouvernement, au ministère de l’Intérieur et aux services de la répression d’avoir une idée claire du climat qui règne dans les instances des partis et des syndicats.

Traduction : Abdelmohsin
El Hassouni

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