Thami Ghorfi : Amine Kandil, pourriez-vous nous décrire l’activité de votre entreprise ?
Amine Kandil : Notre activité consiste en la production et la distribution d’engrais de qualité sur le territoire national. C’est ainsi que, un peu partout au Maroc, vous pouvez voir des sacs d’engrais aux logos de Charaf. Nous travaillons depuis plusieurs années pour essayer d’apporter à l’agriculteur marocain des engrais de qualité et adaptés.
Disposez-vous d’une unité de production ?
Amine Kandil : Nous avons une unité de fabrication à Jorf Lasfar dans laquelle, à partir, de matières premières qui viennent en partie du Maroc et en partie de l’étranger, nous réalisons des mélanges extrêmement sophistiqués en rajoutant des oligo-éléments pour apporter un produit calibré pour chaque région et pour chaque zone.
L’actualité de votre entreprise est l’ouverture de son capital à un fonds d’investissement international. Est-ce que vous pouvez nous parler de cette opération ?
Amine Kandil : Cette opération était prévue chez nous depuis un an et demi environ. Notre actionnariat est familial et nous avons besoin de renforcer la structure financière de la société puisque nous sommes une société qui a besoin d’investir.
C’est ainsi que nous avons été approchés par une dizaine d’investisseurs potentiels et nous sommes tombés d’accord avec ce fonds AIG (Infrastructure fund), qui est composé du principal assureur mondial par capitalisation boursière. Le fonds est également composé de Proparco, la BEI, la SFI et la BAD.
Maintenant, nous avons avec nous des investisseurs qui veulent contribuer au développement de l’agriculture marocaine.
Ce fonds a vocation d’investir en général dans les infrastructures dans les pays émergents. Comment se fait-il qu’il ait choisi d’aller dans une entreprise industrielle et de commercialisation telle que la vôtre ?
Amine Kandil : Parce que nous avons une vision commune du développement en l’Afrique du Maroc. Ce fonds est bien sûr un fonds financier qui attend un retour sur investissement et il pense effectivement que nous pourrions contribuer à développer l’agriculture marocaine, donc à développer notre marché. Notre démarche volontaire lui a plu.
Rappelons que Charaf Corporation est une entreprise familiale qui a été créée en 1989. La semaine prochaine, vous allez recevoir les dirigeants de ce fonds qui vont siéger avec vous dans ce premier Conseil d’administration, cela va être un grand changement pour vous ?
Amine Kandil : Bien évidemment, c’est un événement que nous attendons avec plaisir. Cependant, Charaf Corporation est une entreprise familiale mais qui a toujours été tournée vers les marchés, qui a toujours communiqué. C’est ainsi que depuis plusieurs années maintenant, nous émettons des billets de trésorerie. Nous avons fourni à tous nos investisseurs des informations en permanence sur la société. Je ne considère pas d’ailleurs que le fait que nous soyons un actionnariat familial ou pas est très important. A chacun de mes actionnaires, au marché financier, aux gens qui nous ont prêté de l’argent pour les billets de trésorerie que nous avons remboursés à chaque fois, ces gens méritent aussi beaucoup d’informations. Donc finalement, les nouveaux investisseurs, c’est une étape logique pour Charaf.
A quelle période et pour quel type de besoin, avez-vous commencé à vous adresser aux marchés financiers ?
Amine Kandil : C’est en début 2002, que nous avons effectivement commencé à émettre des billets de trésorerie, c’est-à-dire qu’au lieu de se faire prêter de l’argent auprès de banques nous allons sur le marché auprès d’investisseurs qui ont un excèdent de trésorerie. Nous rémunérons cet excèdent de trésorerie, ce qui nous aide pendant les périodes de pic de campagne agricoles où nous avons besoin de beaucoup d’activité et de financement.
Et vous aviez fait plusieurs levées de fonds allant jusqu’à 50 millions de dirhams ?
Amine Kandil : Pour la première levée de fonds, techniquement, nous avions eu l’autorisation de lever 50 millions de dirhams : nous avions levé 30 millions de dirhams. Ensuite, nous avons remboursé les billets de trésorerie, ré-émis, etc. et nous avons effectivement atteint un palier maximum de 50 millions de dirhams. Maintenant, nous faisons régulièrement appel au marché et les mêmes investisseurs reviennent régulièrement.
Beaucoup de dirigeants de PME ont besoin de fonds pour développer leur entreprise et de surcroît dans une entreprise familiale telle que la vôtre. Est-ce que cette démarche vous paraît compatible avec une dynamique de développement de PME ?
Amine Kandil : Bien évidemment, c’est tout à fait compatible. Ceci est souhaitable pour le développement d’une PME. Il faut simplement fournir des efforts importants en terme de communication financière et en terme de transparence. Il faut afficher ses ambitions et être clair vis-à-vis des investisseurs parce que pour vous faire confiance, il faut qu’ils sachent exactement quelle est votre situation.
Yassine Bekbachy, quels ont été les principaux évènements sur la place boursière de Casablanca la semaine dernière ?
Yassine Bekbachy : Le marché a été relativement calme la semaine dernière. Les deux principaux indices MASI et MADEX, après un début hésitant, ont enregistré des hausses hebdomadaires respectives de 0,67% et de 0,55%, ramenant ainsi leur performance annuelle à 0,9% pour le MASI et 0,52% pour le MADEX. Côté volume, le marché central a drainé un volume relativement important de 171 millions de dirhams, soit une moyenne quotidienne de 34 millions de dirhams. C’est une hausse de +19% par rapport à la semaine précédente.
Les plus fortes hausses et les plus fortes baisses par rapport à la semaine dernière ?
Yassine Bekbachy : La plus forte hausse la semaine dernière a concerné la valeur Nexans avec 9,45% d’ailleurs sur cette valeur il y a eu un bloc important de 77.000 titres à 140 Dhs. En ce qui concerne la plus forte baisse, elle a été enregistrée par la valeur Papelera de Tetuan qui est de plus de –22%. Les raisons sont simples : un chiffre d’affaires en dégradation de 61%, un taux d’impayés excessivement élevé, et un cumul de pertes représentant plus des trois quarts du capital, soit une activité pratiquement à l’arrêt.
Y a-t-il d’autres faits marquants la semaine dernière ?
Yassine Bekbachy : L’autre fait marquant concerne la forte baisse des taux dans le marché monétaire et obligataire. Cette baisse s’explique par la mise en place de la Banque Centrale d’un système de reprise de liquidité hebdomadaire au taux de 2,25% contre un taux antérieur de 3,25%.
Comment, en tant que spécialiste des marchés financiers, vous appréciez l’évolution d’une entreprise comme Charaf Corporation, une entreprise familiale qui a réalisé son ouverture de capital, en apprenant au fur et à mesure à négocier et à échanger sur les marchés financiers ?
Yassine Bekbachy : On ne le dira jamais assez, l’appel au marché financier reste le moyen le moins cher pour se financer, d’ailleurs l’entreprise Charaf est la meilleure illustration d’un financement maroco-marocain. Elle est passée d’une entreprise familiale à une entreprise qui est bien institutionnalisée. Je pense que la prochaine étape reste l’introduction en bourse.
Amine Kandil, peut-on imaginer, maintenant que vous avez en fonds propre 125 millions de dirhams, la possibilité de vous voir coter un jour en bourse et permettre aussi peut-être au grand public d’être actionnaire chez vous?
Amine Kandil : Je suis tout à fait d’accord avec ce qui vient d’être dit. C’est une évolution qui serait tout à fait logique, d’ailleurs nos nouveaux actionnaires actuels vont nous accompagner pendant quelques années et pour eux cela serait une sortie tout à fait logique dans quatre ou cinq ans.
Cette émission sera rediffusée ce soir à 22h00
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