ALM : Qu’est-ce que ça vous fait d’être membre de l’Académie Française des technologies ?
Mohamed Smani : C’est une nomination qui me fait beaucoup plaisir. Je pense qu’elle fait surtout honneur à l’institution dans laquelle je travaille aujourd’hui et dans toutes celles où j’ai travaillé durant mon parcours professionnel. Quelque part je pense que ceci est dû aussi à la position et l’image que donne le Maroc à l’extérieur du pays. Pour l’Académie française des technologies, qui est constituée uniquement de membres français, le fait de choisir un Marocain, alors que l’Afrique est grande, a une signification.
Cette nomination n’exprimerait-elle pas la reconnaissance de la France des efforts que fait le Maroc dans le domaine de la recherche ?
Je pense que oui. Les membres de l’Académie suivent de près ce qui se passe au Maroc en matière de construction de la société du savoir. C’est une reconnaissance importante des efforts que consentis par Maroc pour se développer et pour lutter contre la pauvreté. Aujourd’hui, le pays est en train de relever des défis importants. Les évènements de Mélillia le montrent. Ces évènements ont choqué un certain nombre de personnes.
L’analyse qui a été faite par la suite, la position difficile dans laquelle se trouvait le Maroc, le fait que l’Europe, elle-même, se trouve assaillie un flux important d’immigrants, et avec les évènements qui se sont passés récemment dans les villes françaises, réellement, c’est prendre conscience que les problèmes sont difficiles et très compliqués et que les efforts déployés par le Maroc sont louables.
Votre élection aura-t-elle un impact sur la coopération franco-marocaine ?
Un impact dans la mesure où nous pourrons effectivement développer des capacités et utiliser ce réseau important de 260 membres qui ont des compétences multiples et variées dans différents domaines. Ce n’est qu’à travers eux qu’on peut aller vers les entreprises. Certains académiciens opèrent déjà au Maroc.
Ils apportent leur soutien à des associations professionnelles dans le domaine de leurs activités. Je suis d’ailleurs revenu de Paris avec un académicien qui partait à Ouarzazate pour travailler avec une association locale pour leur apporter tout son savoir et toute son expertise en matière d’électrification rurale.
Comment devient-on membre d’une aussi prestigieuse Académie ?
L’Académie a un certain nombre de préoccupations en fonction de ses objectifs et des missions qu’elle veut réaliser. Elle essaie de se doter des compétences nécessaires pour pouvoir le faire. Il y a un certain nombre de thématiques et c’est en fonction de ces thématiques qu’on demande aux académiciens de proposer des candidatures qui sont ensuite examinées par un comité de candidatures.
Il y a tout un travail de tri et de sélection qui se fait par la suite. La candidature retenue est soumise à une enquête qui consiste à s’informer sur le candidat, sur ses relations, sur ce qu’il a écrit ou publié de manière indirecte. On constitue ainsi un dossier en trois points : le parcours professionnel du candidat, ce qu’il peut apporter à l’Académie, puis ses références nationales ou internationales. Les académiciens passent enfin au vote après plusieurs classements.
Quel est votre parcours professionnel ?
J’ai fait l’école de Géologie à Nancy et après avoir obtenu mon diplôme d’ingénieur, j’ai fait un travail de recherche. J’avais la possibilité de rester en France, mais j’ai préféré rentrer au Maroc et commencer ma carrière à l’OCP (Office Chérifien des Phosphates). J’ai évolué dans différents services de l’office. En 1975, on m’a proposé d’être chef de projet pour la construction d’un centre de recherche pour le phosphate. Une mission qui a permis à cet organisme de se doter d’un outil de recherche et de développement important. Je suis resté à l’OCP jusqu’à mon départ à la retraite. J’ai eu ensuite la chance de diriger l’association R&D Maroc depuis son premier jour de création le 12 mars 1997.