Fidèle à ses rendez-vous intellectuels, la Fondation Attijariwafa bank vient de dédier sa dernière rencontre philosophique au thème: «Gratitude, pardon et don de soi : retour sur quelques enseignements de la pensée mystique musulmane».
Un choix qui rime bien avec la spiritualité du Ramadan comme le précise cette structure qui a invité Ali Benmakhlouf, professeur des universités, Université Paris-Est Créteil, pour animer cette rencontre en ligne dans le cadre du cycle «Échanger pour mieux comprendre». Lors de cet événement, il était question de définir les trois vertus de la gratitude, du don de soi et du pardon, leurs interactions et leurs bienfaits, en puisant dans la sagesse des philosophes mystiques musulmans.
«Dans le contexte actuel de pandémie doublé d’une crise socio-économique, la gratitude revêt une grande importance car elle figure au cœur de la sagesse et de la spiritualité», estime la fondation à l’issue de cet événement. Pour cette structure, cette vertu lève le voile de l’ingratitude pour accueillir la grâce divine. «Mais pour l’atteindre, il est important de travailler sur ses propres résistances, en adoptant une hygiène de vie basée sur des exercices spirituels», ajoute la même source qui cite les érudits mystiques. Pour ceux-ci, cette valeur peut être cultivée en continu grâce à la récurrence de l’appel à Dieu qui soulage le cosmos de ses vicissitudes et décharge l’homme de ses angoisses. «En parallèle, l’apprentissage permanent de la gratitude est possible à travers la pratique d’exercices spirituels comme l’Eveil, l’Examen de conscience et la Résipiscence», poursuit la fondation.
Quant à la gratitude, elle suppose de garder l’espoir et la détermination, même en situation de déséquilibre que suscite la crise actuelle. «Quelle est la frontière entre gratitude et fatalisme ?», s’interroge la structure. A son sens, les mystiques musulmans parlent de l’acceptation du destin, sans y être entraîné. «Cela renvoie à l’un des principes du stoïcisme : l’acceptation n’est pas résignation, car l’acceptation s’accompagne de détermination», ajoute la même source. Cependant, le don de soi doit être perçu d’un point de vue cosmique. Pour Abu Al Abbas Sebti, le don affecte et nourrit l’existence et entraîne un effet vertueux. «Mais cette pratique est-elle aisée en temps de crise et d’adversité? Oui car le don de soi est toujours possible si nous nous plaçons dans un faisceau de vies, en faisant appel à la solidarité. Plus tard, Descartes confortera cette conviction en affirmant : Ce qui nous coûte peu, profite beaucoup à l’autre». «Certes, en donnant, nous sommes en disposition de recevoir, mais il n’y a aucune obligation de retour. Ne demande pas, donne !», avance la fondation.
Le pardon, lui, est l’une des vertus les plus importantes en Islam. Pour preuve, toutes les sourates du Coran invoquent Dieu miséricordieux, à l’exception de la sourate 9 (sourate At Tawba). Pour les mystiques musulmans, si Dieu est miséricordieux, alors l’Homme, qui possède en lui tous les attributs divins, peut pardonner. «Le pardon humanise car il est en interaction dynamique avec l’amour. Plus je pardonne, et plus j’accueille l’amour», tempère la même source. En revanche, demander pardon peut être perçu comme une démarche «intéressée». «Selon Rabia Al Adaouya, si nous demandons pardon, nous devons nous faire pardonner de notre demande. En définitive, le pardon c’est la prière», conclut la fondation.