Dinandiers de Fès

La dinanderie, secteur d’activité de l’artisanat traditionnel dans la médina de Fès vivait jusqu’en 1986-87 au gré de commandes de particuliers pour les fêtes de mariages et des achats de touristes étrangers. en effet, une étude sur le secteur élaborée par une équipe d’universitaires de Fès pour la restructuration des métiers anciens de la médina indique que le travail des dinandiers se faisait uniquement et depuis toujours sur commande afin de constituer un seul petit stock pour le mois d’août, période de vacances. L’étude qui précise que le marché de la dinanderie avait une structure équilibrée et stable ne pouvait plus toutefois à partir du début des années 90 satisfaire une demande de plus en plus exigeante qui demandait une livraison immédiate.
C’est ainsi que ce secteur submergé se voit perdre sa production de qualité par la pénétration de nouveaux artisans à la qualification médiocre ou inexistante. Par conséquent note le document, la qualité et le niveau de prix ont diminué entraînant une situation de « crise » aggravée par une baisse de la demande. Aujourd’hui encore cette situation de « crise » perdure et fait que les dinandiers travaillent uniquement trois jours par semaine en moyenne. Les professionnels, qui imputent ces causes à la baisse des prix des articles qui font l’objet de dumping et au comportement de négociants peu scrupuleux, ont décidé de prendre en main les producteurs et de créer des regroupements de l’ensemble des artisans de la corporation. La corporation dans cette foulée a mis en place un dispositif d’homologation des artisans dinandiers afin de protéger les petits artisans intégrés dans le corps des artisans professionnels. l’étude relève donc que pour assainir ce secteur, la production totale actuelle sera en diminution relative d’environ 20 pc pendant une certaine période de deux ans et que la production augmentera de 3 à 4 % par an dans les 5 ans. Concernant la position des dinandiers et leur avenir, l’étude signale que la corporation compte 650 unités dont 17 utilisent le procédé de métallisation électrolytique et 110 usent de produits corrosifs comme l’acide, de soudure et de moteur électrique pour la création de leurs articles et font travailler des enfants pour le décapage sans mesure de sécurité et de protection. Ces derniers doivent être délocalisés de la médina et, seules les 500 unités qui effectuent un travail purement manuel doivent y rester.
Selon le voeu de la corporation des dinandiers, l’ensemble des entreprises devra être déplacé. Dans cette hypothèse, un déplacement vers le nouveau quartier artisanal de Ain Nokbi en dehors de la médina serait le meilleur et il y aurait donc la création de deux « sites » de travail, l’un non polluant en médina et l’autre industriel à Ain Nokbi.
Cependant, l’étude fait cas de la réticence de certains dinandiers qui craignent la concurrence et que les personnes déplacées reviennent faire des travaux annexes dans la vieille ville pour y bénéficier d’avantages fiscaux et d’anonymat comptable.
Toutefois en réaffirmant que la dinanderie est l’un des fleurons de l’artisanat fassie faisant partie intégrante du patrimoine culturel et social de Fès, l’étude recommande que les actions esquissées par les représentants des dinandiers soient adoptées et aidées afin de permettre l’élimination des non-professionnels qui pour un gain facile et immédiat mettent en danger ce patrimoine. Le document suggère également que pour assurer la protection et la bonne gestion de l’environnement, des contrats doivent être conclus entre l’Etat et la corporation des dinandiers. Le premier s’engage à appuyer par des mesures financières, fiscales ou réglementaires les actions du premier qui devra prendre en charge la protection de l’environnement et par la sauvegarde de la médina.