Interview avec Dr Anis Achargui, chirurgien orthopédiste et du sport, expert ESSKA en chirurgie du genou et du ligament croisé antérieur
Premier chirurgien en Afrique à avoir obtenu la certification ACL Expert Surgeon de l’ESSKA (European Society of Sports Traumatology, Knee Surgery & Arthroscopy), Dr Anis Achargui partage, ici, son expertise avancée dans la chirurgie du LCA, reflétant une maîtrise des techniques modernes et efficaces. Pour rappel, l’ESSKA est une référence mondiale en chirurgie orthopédique du sport. Cette certification repose sur une formation rigoureuse et une évaluation des compétences, reconnue par des experts internationaux. Cette avancée dans la chirurgie orthopédique en Afrique permettra d’offrir aux patients des traitements conformes aux standards internationaux.
ALM : Quelles sont les affections les plus courantes touchant le genou ?
Dr Anis Achargui : Les affections du genou que je traite le plus fréquemment en cabinet sont l’arthrose, les lésions ligamentaires, les déchirures du ménisque et enfin les tendinites. L’arthrose touche principalement les patients de plus de 50 ans. Cette condition résulte de l’usure progressive du cartilage, provoquant douleurs constantes, raideurs et limitation de la mobilité quotidienne. Les lésions ligamentaires existent chez le patient lors d’une rupture du ligament croisé antérieur (LCA). Cette dernière est particulièrement courante chez les sportifs, souvent causée par des mouvements de rotation, lors de disciplines comme le football, le tennis ou le padel. Cette blessure est douloureuse et nécessite souvent une intervention chirurgicale pour retrouver la stabilité du genou. Les déchirures du ménisque sont fréquentes, lors de torsions du genou. Ces lésions entraînent des douleurs aiguës et des blocages articulaires. Elles touchent souvent les patients actifs. Les tendinites résultant de l’inflammation des tendons surviennent principalement chez les personnes sollicitant beaucoup leur genou, que ce soit dans le cadre professionnel ou lors d’activités sportives répétitives.
Dans quels cas est préconisée la chirurgie du genou ?
Les situations les plus fréquentes où la chirurgie du genou est envisagée incluent la rupture du LCA, les lésions du ménisque, l’arthrose avancée et les instabilités articulaires. Pour le premier cas, la chirurgie est souvent recommandée pour les sportifs lorsque la stabilité du genou est compromise, permettant ainsi un retour sécurisé à l’activité. Pour les déchirures de grade 3, instables, ou en cas de blocage (ndlr : les lésions du ménisque), la chirurgie devient une urgence pour libérer le genou et éviter des dommages permanents. Dans le cas de l’arthrose avancée et lorsque l’usure du cartilage cause des douleurs persistantes et limite la mobilité, une prothèse totale ou partielle du genou peut améliorer significativement la qualité de vie. Dans certains cas de malformations ou d’instabilités sévères, une intervention chirurgicale est nécessaire pour réaligner et stabiliser l’articulation.
Quelles sont les dernières techniques chirurgicales dans le cadre du ligament croisé ?
La réparation du ligament croisé antérieur (LCA) repose sur des techniques mini-invasives, principalement l’arthroscopie. Cette méthode réduit les cicatrices et accélère la guérison. La procédure consiste à remplacer le ligament rompu par une greffe tendineuse, souvent prélevée sur le patient, améliorant ainsi la stabilité du genou. L’utilisation des techniques de récupération rapide après chirurgie apporte un plus avec une chirurgie réalisée en ambulatoire et retour à la maison le même jour. De plus, l’intégration d’une ténodèse latérale, technique complémentaire, renforce la stabilité rotatoire du genou, réduisant le risque d’échec de la reconstruction du LCA de 30 % à seulement 4 %.
Les sportifs sont très sujets à l’altération des ligaments du genou, quels sont les gestes préventifs pour les protéger?
Les sportifs, en particulier ceux pratiquant des mouvements de rotation ou de changements rapides de direction, sont exposés à des blessures des ligaments du genou. Pour prévenir ces blessures, les quelques gestes préventifs conseillés sont l’échauffement adéquat, le renforcement musculaire, la proprioception et équilibre, les techniques sportives appropriées, l’équipement adapté et enfin le repos pour la récupération. Un échauffement ciblé inclut des exercices de mobilité et de renforcement. Il est essentiel avant toute activité physique. Le renforcement musculaire consiste à travailler sur la force des muscles des jambes. Cet exercice aide à stabiliser l’articulation du genou, réduisant ainsi le risque de blessures. La proprioception et l’équilibre consistent à effectuer des exercices d’équilibre et de coordination améliorant la stabilité du genou. Il faut aussi que le sportif apprenne les bonnes techniques de mouvement pour réduire le risque de torsion excessive. L’équipement adapté est aussi très important. Utiliser des chaussures appropriées et, si nécessaire, des protections comme des genouillères peut prévenir les blessures. Enfin il faut éviter le surmenage et s’accorder des temps de récupération sont cruciaux pour la santé articulaire.
Que faire en cas d’altération du cartilage, notamment chez les personnes âgées ?
En cas d’altération du cartilage, surtout chez les personnes âgées, plusieurs options peuvent améliorer la qualité de vie. Déjà il faut consulter un spécialiste c’est-à-dire un chirurgien orthopédique pour évaluer l’état du cartilage et discuter des meilleures options. Les injections de PRP et d’acide hyaluronique sont des traitements qui peuvent soulager la douleur et améliorer la mobilité. Les injections de PRP utilisent les propres cellules du patient pour favoriser la guérison, tandis que l’acide hyaluronique aide à lubrifier l’articulation. Enfin, une prothèse de genou sera le dernier geste à envisager si les traitements non chirurgicaux ne suffisent pas. Cette intervention a des résultats spectaculaires, avec un taux de réussite de plus de 96 %, améliorant considérablement la qualité de vie.
Plusieurs personnes ont recours aux injections PRP. Pourriez-vous déjà nous éclairer sur ce type de traitement?
Les injections de plasma riche en plaquettes (PRP) sont une méthode efficace pour soulager la douleur articulaire et favoriser la guérison des tissus. Ce traitement utilise un concentré de plaquettes sanguines, riche en facteurs de croissance, obtenu à partir du sang du patient. Au Centre Orthopédique Orthos, nous avons acquis très récemment le dernier système de PRP qui permet d’obtenir un concentré de plus de 2 millions de plaquettes par mm³. Cette concentration élevée a démontré une supériorité en termes de résultats cliniques, améliorant la régénération du cartilage et réduisant l’inflammation.
Dans quel cas le patient qui souffre du genou aura recours à ce genre de traitement ?
Les injections de PRP peuvent être recommandées dans le cas de l’arthrose du genou, des tendinites, des lésions ligamentaires et méniscales et de la prévention chez les patients à risque. Dans le premier cas, ces injections permettent de réduire l’inflammation et favoriser la régénération du cartilage chez les patients souffrant de douleurs persistantes. Dans le cas des tendinites, elles servent à soulager les douleurs liées à des blessures tendineuses. Les lésions ligamentaires et méniscales peuvent se prêter à ce type de traitement qui améliorera la réparation des tissus et réduire le temps de récupération. Et en direction des patients de plus de 40 ans avec des antécédents familiaux d’arthrose, ils peuvent bénéficier d’une injection annuelle de PRP pour réduire de 40 % le risque de poser une prothèse totale du genou.
Quels sont les avantages de la récupération rapide après une chirurgie du genou ?
La RRAC (Récupération rapide après chirurgie), appelée aussi « chirurgie Fast Track » est un système pluridisciplinaire de prise en charge personnalisée d’un patient en phase pré, per et post-opératoire. Elle présente plusieurs avantages. Déjà, ces techniques modernes réduisent la douleur postopératoire, améliorant le confort des patients. La mobilisation précoce permet un retour rapide aux activités quotidiennes. En favorisant une récupération rapide, le risque de complications postopératoires est réduit. Les protocoles RRAC améliorent l’expérience globale des patients, avec des résultats fonctionnels optimaux. Les patients retrouvent leur mobilité et leur indépendance plus tôt, ce qui améliore leur qualité de vie.
Un dernier mot pour ceux qui souffrent de douleurs au genou ?
Ne laissez pas la douleur du genou vous paralyser. Si vous souffrez, n’attendez pas que cela devienne insupportable. Les solutions existent et elles sont efficaces. Aujourd’hui, la chirurgie du genou, qu’il s’agisse de réparer un ligament ou de poser une prothèse, permet à des milliers de personnes de retrouver une vie sans douleur.