Filles mères au bord du gouffre

«Enfance volée» n’est certes pas qu’un titre de film, c’est l’expression d’une réalité, celle des humiliations de la majorité des cas de filles mères, petites bonnes qui, une fois mûres, finissent par se prostituer pour nourrir un enfant conçu d’une relation illégale avec l’employeur ou un de ses fils.
Cet état de choses renvoie à un problème aussi grave que tous les phénomènes qui menacent l’équilibre de la société marocaine, à savoir le travail des petites filles. Fragilisées par la pauvreté, plusieurs familles, principalement en milieu rural, acceptent de faire employer leurs fillettes en contrepartie d’une somme dérisoire. Les statistiques établies en 2001 par l’association «INSAF», qui s’assigne pour mission d’aider les femmes en détresse, particulièrement les filles mères, révèlent que les bonnes de moins de 15 ans se situent en tête de liste des mères célibataires avec 94 cas sur les 300 enregistrés, soit 31,3 %, suivies des ouvrières avec 85 cas, 28,33 %, les sans profession avec 53 cas, 17,67 %, les femmes de ménage avec 40 cas, 13,33 % et diverses catégories avec 28 cas, 9,33 %. Quant à la répartition des 300 cas par «sources de problèmes», l’étude démontre que les «relatons amoureuses» sont la principale cause des ennuis, avec 222 cas, 74%, suivie de loin par la prostitution avec 45 cas, 15 %, alors que les viols ne représentent que 22 cas, 7,33 %. Les agressions, les abus sexuels et les mariages sans acte se situent au bas de lise. De toutes ces sources, le viol est peut-être l’acte qui soulève, à juste titre, le plus d’indignation parce qu’il y a absence de consentement et parce que dans la plupart des cas il traduit la gêne que cause la présence de la femme dans l’espace public.