ALM : Vous avez tenu un réquisitoire contre l’action gouvernementale et le Parlement. Qu’est-ce qui justifie cela ?
Abdelkarim Ghallab : Oui, j’ai critiqué la gestion du dossier du Sahara par le gouvernement, ainsi que d’autres sujets relatifs à des problèmes socioéconomiques. J’ai aussi pointé du doigt le Parlement, parce qu’il est issu d’élections qui ne sont pas à l’abri de tout reproche. Le gouvernement est faible et peu dynamique. Il n’y a pas de mal à le dire dans une salle de réunion.
Mais cela n’a pas plu à toutes les personnes présentes à cette réunion…
Oui, le frère secrétaire général du parti, Abbas El Fassi, n’a pas apprécié la teneur de mes propos. Il s’est emporté en affirmant que tout ce que je dis relève de l’allégation. Il a défendu l’action du gouvernement et a déclaré que les dernières élections étaient les plus transparentes du Maroc. C’est son droit le plus légitime et il est naturel qu’il y ait des désaccords au sein d’un parti politique.
Qu’est-ce qui explique vos critiques contre le gouvernement?
Les raisons ne manquent pas. Mais ce qui me met en colère, par-dessous tout, c’est la gestion par le gouvernement du dossier du Sahara. Sous prétexte que ce dossier est entre les mains de SM le Roi Mohammed VI, le gouvernement ne fait rien, absolument rien, pour s’en occuper. La Constitution du pays n’exempte pas pourtant le gouvernement de se préoccuper d’un dossier aussi important, quand bien même il serait une priorité affichée par le Roi. La reconnaissance de la fantomatique Rasd par l’Afrique du Sud est la conséquence d’un gouvernement qui n’a pas bien fait son travail. Notre gouvernement travaille mal.
Qu’est-ce qui vous fait dire cela?
Référez-vous aux communiqués relatifs aux différents conseils du gouvernement. Le dossier du Sahara n’est jamais cité à l’ordre du jour. Est-ce normal ? Pourquoi le ministre des Affaires étrangères n’a pas mis ce dossier sur la table? Pourquoi ?
Et par rapport aux élections ?
Elles ont été taillées au mètre. A tel parti, on donne tant de centimètres. A tel autre, un demi-mètre. Il est illogique que des partis forts comme l’Istqlal et l’USFP réalisent des scores aussi faibles. On a distribué des sièges à une pléthore de partis comme si on avait voulu faire plaisir à tout le monde. Et au bout du compte, nous avons un gouvernement rapiécé.
Pourquoi critiquez-vous le gouvernement, après votre démission du journal «Al Alam» ?
J’ai toujours critiqué le gouvernement. Je pense que c’est le ton qui a changé. J’ai haussé la voix, parce que l’heure n’est plus aux mots susurrés. La discussion et la polémique sont nécessaires pour dynamiser les choses.
Cela pourrait accroître encore plus vos différends avec le secrétaire général du parti…
Cela ne m’empêchera pas de dormir. J’ai parlé avec franchise, et je suis en paix avec ma conscience. Si M. El Fassi est d’accord, bienvenue (marhaba) ! S’il n’est pas d’accord, bienvenue aussi. Nous finissons toujours par être d’accord, y compris sur nos désaccords.