Amnesty International Maroc a accusé le gouvernement d’incapacité à traduire dans les faits les avancées réalisées au niveau de l’adoption des principes et des conventions de défense des droits de l’Homme.
Ce gouvernement qui est venu à la suite d’attentes populaires explicites que la Constitution de juillet a consignées en les amplifiant, s’est montré inapte à ancrer les progrès réalisés dans la réalité des faits, a déclaré en substance le secrétaire général de cette institution, mardi à Rabat, durant la traditionnelle conférence de presse annuelle au cours de laquelle est présenté son rapport sur la pratique des droits humains dans le monde. Mohamed Sektaoui, qui avait à ses côtés le président Driss Haider et la vice-présidente Fatiha Dryef, a jugé que le gouvernement avance sur cette question des droits humains «non seulement avec lenteur, mais suivant une démarche antinomique».
Il a, en effet, estimé qu’en avouant une adhésion en apparence spontanée et sans frein aux grands principes, l’Exécutif est contredit par le peu d’usage qu’il en fait. Répondant à une question d’ALM, le SG d’Amnesty International Maroc a jugé que ce comportement est plus net quand on compare la situation en 2012 par rapport à celle qui a prévalu en 2011.
Et même qu’au vu de la répression des mouvements protestataires pacifistes, au retard apporté à l’égalité des genres, à l’abstention du Maroc à voter l’abolition de la peine capitale et la recrudescence des atteintes à la liberté de la presse, la situation s’est détériorée, a-t-il déclaré en substance. Amnesty International Maroc a néanmoins considéré le fait que le Royaume ait sursis à l’exécution des 7 condamnations à mort prononcées par ses tribunaux est un moindre mal. Mais, en parallèle, des cas de torture ont été signalés, des enlèvements dénoncés, des condamnations pour délit d’opinion prononcées tandis que l’égalité entre les genres avance à reculons, a-t-il ajouté. Il a conclu que ces différents retards font que la période qui a suivi la création de l’Instance pour l’équité et la réconciliation est la plus faste pour ce qui est du respect des droits de l’Homme au Maroc.
Amnesty International Maroc a fait de l’état des droits de l’Homme dans le monde au cours de l’année dernière un rapport mi-figue, mi-raisin. La guerre civile en Syrie, la poursuite des troubles en Tunisie, en Egypte et au Yémen, l’éclosion de nouveaux foyers de tension et de conflits en Afrique et en Asie, ont fait, d’après les rédacteurs du document, que 2012 a été une année d’aggravation de la répression des droits. Ils estiment que les pouvoirs centraux de Damas et Israël se sont rendus coupables- le 1er en Syrie et le second à Gaza- de crimes de guerre, voire de crimes contre l’humanité. «Il a y a jusqu’à aujourd’hui en Syrie près de 4 millions de déplacés et un million d’expatriés réfugiés dans des pays voisins dans des conditions souvent déplorables sans que l’ONU soit capable d’y mettre fin», a déclaré le président d’Amnesty International Maroc. Il a précisé qu’il y a quelque 15 millions de réfugiés dans le monde, 215 millions de migrants «corvéables et taillables à merci» et qui, chassés par la misère ou l’insécurité dans leur pays d’origine, ne trouvent plus que porte close dans les pays développés. Sa vice-présidente a déclaré, pour sa part, que sur les 159 pays suivis, 112 ont torturé, 101 ont réprimé la liberté d’expression, 57 ont emprisonné pour délit d’opinion et 80 ont mené des procès iniques. Fatiha Dryef a conclu que les sécuritaires ont commis des homicides en temps de paix dans 50 pays, que dans 31 pays, des personnes ont été victimes de disparition forcée et que 12 millions d’apatrides ont été recensés en 2012. n