ALM : Vous venez d’être élu à la tête du barreau du Grand Casablanca. Tout d’abord pouvez-vous nous dire comment se sont déroulées les élections ?
Maître Mouloud Bettache : Lorsqu’il y a élection dans un secteur, notamment le syndicat des avocats, ces derniers choisissent celui qui va travailler. Il ne se présente aux élections que celui qui y est prédisposé. Une prédisposition, des moyens et d’autres critères qui sont essentiels pour jouer un rôle principal dans un syndicat, qui est le plus grand syndicat en Afrique après celui de l’Egypte. Reste certaines particularités entre les candidats et ce sont les confrères qui tranchent, en prenant en considération la méthode de travail du candidat, ses idées, ses principes, son projet pour le changement, surtout que le métier, à l’instar de certains autres secteurs, connaît une crise, qui est liée à la conjoncture économique générale actuelle, et des problèmes en relation avec la situation sociale des personnes dans le secteur. Le bâtonnier, une fois élu, ne peut pas tout faire, à lui seul. Ma conviction est que le bâtonnier et le conseil en tant qu’institution issue d’élections transparentes ne peuvent entreprendre une action avantageuse pour le secteur qu’en s’appuyant sur des compétences effectives du métier d’avocat. Surtout qu’à Casablanca, le secteur des avocats est riche en compétences, aux niveaux intellectuel, social et juridique.
Vous avez parlé de critères qui sont essentiels pour jouer un rôle principal à la tête du syndicat. Quels sont ces critères ?
Aujourd’hui les élections ne revêtent plus ce caractère traditionnel qui leur est connu. Lorsque le nombre d’avocats était relativement réduit à Casablanca, la communication n’en était que plus facile. Chose qui ne l’est pas actuellement avec l’augmentation du nombre d’avocats exerçant dans la capitale économique, environ 2255, en plus des stagiaires. La communication demande beaucoup d’efforts. En plus, la compétence est devenu maintenant le critère principal. Outre la communication continue, la présence et le sentiment chez tous les avocats que ce candidat s’occupe de leurs soucis professionnels et sociaux. Les avocats voient en lui quelqu’un ayant des formules pour résoudre certains problèmes.
A Casablanca, comme ailleurs, il a été constaté que les pratiques de certains avocats dans les couloirs des tribunaux portent préjudice à la profession. Avocats rabatteurs. Que comptez-vous faire pour mettre un terme à ces pratiques ?
Ce sont des comportements exceptionnels. Cet état de choses pourrait être inexistant. Le code de notre profession est inspiré du code francophone. Dans l’exercice de la fonction, c’est un code formel. Par exemple, dans d’autre pays, notamment les anglo-saxons, l’on peut trouver que la publicité d’une profession est acceptable. Chez nous, les traditions, les moeurs et le règlement intérieur de la profession interdisent ces pratiques. Mais, il faut voir l’essentiel, quant à ces choses, leur résolution est simple dans le cas où elles existeraient. Les gens devraient voir le côté positif dans la profession et les services qu’elle rende à titre individuel ou collectif, ainsi que les sacrifices, dans le secteur juridique. Le secteur des avocats est un secteur qui emploie beaucoup, au moment où les Facultés de droit forment plusieurs lauréats et l’Etat n’a pas pris les responsabilités attendues, faute de moyens. Le secteur des avocats a beaucoup sacrifié pour résorber le chômage. Il était attendu, d’accorder beaucoup d’intérêts à ce secteur.
Mais, on voit que le syndicat à Casablanca impose plus de 70.000 dirhams, droits d’adhésion, pour s’inscrire dans la profession après le concours.
Exactement soixante-dix mille dirhams. Mais, il y a des syndicats qui ne sont pas de la taille du barreau de Casablanca et qui exigent plus. Ce n’est pas pour barrer la route aux avocats issus des classes défavorisées. Au contraire. Dans ce cas, on étudie rigoureusement le cas, et il pourrait s’inscrire selon ses possibilités, beaucoup moins. En plus, ce montant n’est pas unique. Il y a le cas des anciens fonctionnaires et celui des jeunes étudiants.
Certains observateurs disent que le syndicat des avocats est devenu politisé ?
Je crois que chaque avocat ou chaque individu devrait être politisé pour être un bon citoyen. Mais intégrer un parti politique, c’est une autre chose. Chacun est libre. Il n’a jamais été enregistré que le syndicat des avocats à Casablanca s’est influencé par un, ou des partis politiques. Le syndicat a défendu les droits des citoyens et a pris des positions sur des questions nationales ou internationales. Il y a le juridique et le politique. Il faudrait qu’il n’y ait pas de confusion. Lorsque l’avocat est partisan, c’est la profession qui profite de son expérience partisane, sans qu’il y ait un mélange de genres.
Le ministre actuel de la Justice est un avocat. Qu’attendez-vous d’un homme de votre métier ?
Tout d’abord je lui présente mes félicitations pour sa nomination à ce poste. Il s’agit d’un poste responsable dans une conjoncture effectivement difficile. Et lorsqu’un avocat est nommé dans un tel poste, je considère que c’est une victoire pour toute la famille de la justice, juges, avocats et huissiers. Un homme du métier connaît bien les rouages du secteur et ses différents problèmes.