En tant qu’émigré partageant sa vie entre le Maroc et la Belgique, M.Seyour assure ne pas «lâcher prise pour sauver ces lieux qui se sont transformés en un véritable dépotoir et lieu de fréquentation des délinquants».
A l’instar des autres régions, la plupart des cimetières à Tanger sont abandonnés à leur triste sort. A cet effet, des représentants de la société civile et de simples citoyens se mobilisent, ces dernières années, pour faire face à l’état de délabrement de ces lieux d’enterrement publics. C’est le cas de Ridouan Seyour, un émigré tangérois en Belgique, qui s’attelle, depuis 2013, à l’entretien et au nettoyage des cimetières de Tanger. «J’ai constaté lors de l’enterrement de mon père en 2013 l’état catastrophique du cimetière Al Moujahidine», a-t-il affirmé.
M. Seyour a fait part de son grand étonnement de voir comment les tombes étaient arrangées d’une manière anarchique et des déchets qui envahissent les lieux. Il avait souhaité à l’époque un bon emplacement pour son père, qui serait très facile à repérer et y accéder, mais en vain. Le défunt a été enterré au fond, dans un coin non desservi par une quelconque allée. Les responsables l’avaient informé qu’il n’y avait pas assez de places ailleurs.
Les morts ne sont pas traités de la même façon !
A sa grande surprise, il a «réalisé peu de temps après que des personnes décédées après mon père ont pu avoir un meilleur emplacement», a-t-il dit, faisant remarquer que «même les morts ne sont pas traités de la même façon !». M. Seyour a décidé de créer un groupe Facebook et une pétition pour un meilleur sort pour le cimetière Al Moujahidine. En attendant la réaction des autorités, M. Seyour a retroussé ses manches pour se lancer dans le nettoiement et l’enlèvement des mauvaises herbes. En tant qu’émigré partageant sa vie entre le Maroc et la Belgique, il assure ne pas «lâcher prise pour sauver ces lieux qui se sont transformés en un véritable dépotoir et lieu de fréquentation des délinquants. Je souhaite ainsi faire attirer l’attention sur cette problématique et avoir, en tant que MRE, droit à une tombe décente dans mon pays d’origine», a-t-il confié.
Cette initiative vise à couvrir d’autres lieux d’enterrement à Tanger
M. Seyour a été peu de temps après rejoint par d’autres bénévoles dans cette initiative qui s’assigne actuellement comme objectif de couvrir d’autres cimetières de la ville. En tant qu’habitants du quartier Sania, «nous avons décidé en 1995 de sauver le cimetière Sania qui se trouvait dans un état de délabrement très avancé. C’est une opération de longue haleine qui a nécessité une mobilisation totale de notre part pour pouvoir en finir avec les saletés et les mauvaises herbes qui dévoraient les tombes et les allées. Nous avons décidé quelque temps après de créer l’Association Al-Mechaâl pour le développement et la solidarité qui mène plusieurs actions autres que l’entretien et le nettoiement des cimetières», a affirmé Fatima Samadi, présidente de l’Association Al-Mechaâl.
Cette militante associative a poursuivi qu’ils ont pu par la suite étendu leurs actions à d’autres cimetières tels que Sidi Amar, Bouhaja, Sidi Driss, Charf et Al Moujahidine. «Nous avons réussi, en été dernier, à faire connaissance, à travers les réseaux sociaux, de M. Seyour qui nous envoyait du matériel de l’étranger. Nous essayons de multiplier nos actions d’entretien des cimetières au cours de la semaine. Nous avons participé, en juillet dernier, à une opération de propreté au profit du cimetière Sidi Boughaleb à Ksar El Kébir, et ce par l’octroi du matériel. Nous souhaitons faire de même dans d’autres communes», a dit M. Samadi.
Des comportements à bannir
Cette dernière a déploré les mauvais comportements des familles des défunts, qui sont à l’origine de l’accumulation entre autres de bouteilles de fleurs d’oranger et de bidons d’eau. «Les familles ne prennent pas la peine de ramener avec eux, à la fin de leurs visites, ces bouteilles et bidons ainsi que d’autres objets sur les lieux. Elles y laissent malheureusement tout s’accumuler», a tenu à rappeler Mme Samadi. Les membres de la société civile appellent ainsi les responsables à doter les cimetières de conteneurs d’ordures, comme c’est le cas pour les différents quartiers et rues de la ville. Ils ont tenu de même à attirer l’attention sur quelques irrégularités commises lors des enterrements. «A titre d’exemple, une émigrée a découvert, après deux ans de son absence loin du pays, qu’une autre personne a été inhumée sur les restes de son défunt époux au cimetière Al Moujahidine. D’ailleurs, nous avons appelé à maintes reprises d’arrêter d’enterrer dans ce cimetière, qui souffre d’une forte saturation», a déploré Mme Samadi.