Société

Laïla Bensouda : «le retour soulève un débat houleux»

© D.R

ALM : Vous avez lancé une grande enquête sur le thème du retour des cerveaux au Maroc. Pourquoi le choix de ce thème ?
Laïla Bensouda : Maroc Entrepreneurs est une association fondée et gérée par des étudiants et jeunes diplômés marocains en France. L’ensemble des membres de l’association est en ce sens concerné par la question du retour. Au-delà de ces préoccupations personnelles, le débat houleux sur le thème du retour est très palpable au sein de la communauté marocaine à l’étranger. Néanmoins, aucune étude n’a été menée pour évaluer de façon qualitative et exhaustive les flux migratoires de retour des personnes qualifiées au Maroc, ce qui laisse libre cours à toutes les spéculations.
De là est partie l’initiative de la Grande Enquête Maroc Entrepreneurs, lancée en juin dernier, et qui vise à comprendre les facteurs déterminants et bloquant le retour des Marocains de l’étranger, ainsi que leurs aspirations en matière d’intégration professionnelle et sociale.

Votre association milite pour le retour des « cerveaux », quels sont les résultats réalisés jusque-là ?
Notre ambition première est de favoriser l’échange entre les Marocains de l’étranger, les professionnels et les institutionnels marocains. Nous ne disposons pas de chiffres précis à ce jour sur le nombre de marocains retournés au pays à l’issue de l’une de nos activités. La raison principale de ce manque réside dans la complexité de la démarche de retour, qui nécessite bien souvent plusieurs remises en question et plusieurs allers-retours au Maroc. Par ailleurs, l’association n’a pas pour objectif de faire rentrer un maximum d’étudiants et de cadres marocains mais vise plutôt à les sensibiliser sur l’évolution du Maroc, sur les grands chantiers économiques et sociaux qui y sont lancés et sur les opportunités de carrières et de création d’entreprises. Mais la décision du retour reste une affaire très personnelle dont il faut être pleinement convaincu avant de franchir le pas.

Selon vous, qu’est-ce qui pourrait convaincre ces Marocains installés à l’étranger de rentrer au Maroc ?
Il est indispensable d’intervenir sur plusieurs fronts à la fois et d’adopter une démarche ciblée pour inciter les «talents» marocains à revenir au pays. Sur le plan professionnel notamment, le manque de méritocratie et de professionnalisme, l’abus de pouvoir ainsi le manque de responsabilisation sont autant de raisons, qui bloquent le retour. Un autre frein au retour réside dans le manque d’information disponible sur les opportunités de carrières au Maroc. Par exemple, il est regrettable que les grandes entreprises marocaines ne publient que très rarement sur leurs sites Internet une liste de postes à pourvoir. Bien souvent, la page «carrières/emplois» se résume à une simple adresse e-mail. Une liste de mesures incitatives plus exhaustive fera partie intégrante du rapport de la Grande Enquête Maroc Entrepreneurs sur le thème du retour qui devrait paraître courant novembre.

L’environnement actuel est-il propice à leur retour ?
Le lancement des grands projets économiques (Tanger-Med, développement de zones offshore, accroissement des infrastructures de transports…),  les avancées dans le domaine des droits de l’homme (IER), ou encore l’intérêt porté au développement social et humain (INDH, réforme du code de la famille) sont autant d’éléments qui influent, de fait, positivement mais de façon indirecte sur la tendance au retour.
Les facteurs directs, comme la création d’un régime fiscal attractif pour les entrepreneurs, les opportunités de carrières, les salaires, les perspectives d’évolution professionnelle, sont en revanche peu nombreux alors qu’ils sont a priori fondamentaux dans une décision de retour.

Avez-vous des interlocuteurs locaux pour vous permettre de mener à bien votre quête ?
Maroc Entrepreneurs bénéficie de l’appui de l’ambassade du Maroc en France. L’ambassadeur actuel, Fathallah Sijilmassi, soutient activement l’action de l’association et a notamment parrainé la deuxième édition du séminaire de financement de projets de création d’entreprises, en mai dernier. Au Maroc, nous prospectons des acteurs locaux dans le domaine de la promotion de l’investissement et de l’entrepreneuriat. Nous venons tout juste d’établir un partenariat avec le CRI de Casablanca.

L’association Maroc Entrepreneurs compte 5000 membres
Maroc Entrepreneurs est une association à but non lucratif créée en 1999 à l’instigation d’étudiants marocains en Grandes Écoles et Universités françaises. Dès sa création, Maroc Entrepreneurs a eu pour vocation de contribuer au développement économique au Maroc à travers deux principaux leviers : encourager les Marocains résidant à l’étranger, en particulier en France, à créer leurs entreprises au Maroc et inciter les "talents" marocains à rentrer au Maroc pour rejoindre une entreprise existante, ou en création. L’association a en effet pour ambition de permettre aux cadres supérieurs et aux étudiants marocains installés en France de faire mûrir leurs idées de création d’entreprise au Maroc et de les accompagner dans la concrétisation de leurs projets. Basée à Paris et à Lyon, Maroc Entrepreneurs regroupe aujourd’hui le plus grand réseau de cadres supérieurs et d’étudiants marocains en France, soit près de 5000 membres. L’association continue, par ailleurs, de drainer chaque jour de nouveaux membres sur www.marocentrepreneurs.com.

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