Société

L’arnaqueur qui vendait l’Eldorado

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La Chambre correctionnelle près le tribunal de première instance de Casablanca-Anfa. Une vingtaine de suspects se tiennent aux bancs des accusés à la salle n°4, poursuivis dans leur majorité pour vol simple, trafic et consommation de drogue, coups et blessures. Seul Farid est poursuivi, lors de cette audience du mois de janvier, selon les dispositions de l’article 540 aliéna 1 du code pénal, pour escroquerie. Ce dernier stipule : “Quiconque, en vue de se procurer ou de procurer à un tiers un profit pécuniaire illégitime, induit astucieusement en erreur une personne par des affirmations fallacieuses, ou par la dissimulation de faits vrais, ou exploite astucieusement l’erreur où se trouvait une personne et la détermine ainsi à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers, est coupable d’escroquerie et puni de l’emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 500 à 5 000 dirhams.…“. Il est âgé de trente-trois ans, célibataire et sans profession. Depuis qu’il a quitté l’école avec un niveau scolaire de 7ème année de l’enseignement fondamental, Farid a tenté de trouver un job lui permettant de gagner sa vie honnêtement. Seulement chaque fois qu’il trouvait un travail, il n’y passait pas plus d’un an. Pourquoi ? Il n’en sait rien. Est-il malchanceux? “ C’est la malédiction qui me suit d’un job à l’autre“, pense-t-il. Dès qu’il commence travailler, un problème ou un malentendu éclate entre lui et l’un de ses collègues et parfois avec son patron ; aussi se retrouve-t-il dans la rue. Au fil des mois, il a fait la connaissance d’un homme, un quadragénaire, qui promettait aux rêveurs de l’Eldorado de les aider à mettre leurs pieds au delà de la Méditerranée. Ce quadragénaire, qui se prénomme Abdelouahed, l’a sollicité à chercher les candidats à l’émigration avec des faux papiers. La contrepartie ? Une commission de 500 dirhams pour chaque candidat. Effectivement, il a commencé à courir à droite et à gauche en quête d’un rêveur de l’Eldorado. A chaque fois qu’il conduit un candidat devant Abdelouahed, il empochait les 500 dirhams. Au fil des jours, Farid commence à apprendre l’abc de l’arnaque qui semble rapporter gros à son chef, Abdelouahed. “Au lieu de lui apporter le gâteau pour qu’il me remette des miettes, je dois le manger tout seul”, décide-t-il. Depuis, il a commencé à promettre aux candidats de les aider à traverser la Méditerranéenne, à destination des côtes espagnoles et à empocher des sommes allant de 20 à 35 mille dirhams pour ne plus donner signe de vie aux candidats à l’émigration clandestine. Selon le dossier de son audition par la police, il a mis plus de quinze victimes dans son panier avant d’être mis hors d’état de nuire. “Je n’ai arnaqué personne“, tente-t-il de se disculper devant le tribunal. Il lui a expliqué qu’il s’adonnait au commerce et qu’il a entretenu des transactions commerciales avec ceux qui se présentent comme victimes. Farid a précisé par ailleurs qu’il a signé avec eux des reconnaissances de dette comme garantie. Les victimes, qui ont répondu favorablement à la convocation de tribunal, ont rejeté en bloc les prétentions de Farid. Elles ont toutes confirmé au tribunal qu’elles ont été arnaquées par Farid qui leur a promis de les aider à émigrer clandestinement vers l’Europe contre des sommes allant à 35 mille dirhams. Après la requête du substitut du procureur du Roi qui a requis la peine maximale et la plaidoirie de l’avocat de la défense qui a réclamé l’acquittement de son client, le tribunal a reconnu Farid coupable pour escroquerie et l’a condamné à 18 mois de prison ferme après l’avoir fait bénéficier des circonstances atténuantes. Un jugement assorti d’un ordre de la remise des sommes arnaquées aux victimes.

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