Société

Les Marocains, la fleur et la Saint-Valentin

© D.R

Partout dans le monde, la Saint-Valentin est synonyme d’amour. À cette occasion, tout le monde veut offrir des roses à son (sa) bien aimé(e). Les Marocains ne font pas exception. Chacun selon ses moyens, on a le choix entre la petite rose de Béni Mellal ou la grosse rose de Colombie. On peut opter pour une fleur à mettre dans un vase et qui parle toute seule, ou pour une composition florale spécialement faite pour l’élu de son cœur.
 
La rose rouge, la star qui se fait rare

A Casablanca, au boulevard Zarktouni, au marché central, ou au quartier Beauséjour, les fleuristes se préparent. Tout doit être prêt pour ce 14 février. Ils se sont approvisionnés de milliers de fleurs, une semaine à l’avance. Debout, mains nues, ils bichonnent leurs boutons, arrosent, coupent, enveloppent, cisellent, composent leurs bouquets… Ils affichent leur plus beau sourire à l’approche de tout client potentiel. Leur activité atteindra son pic ce samedi. Il y a même des sites internet qui fleurissent pour assouvir l’envie des romantiques.
Et comme à chaque saison, la star c’est la rose bien rouge.
Mais cette année, la star, elle se fait rare, elle fait sa diva. Et pour cause ? La vague de froid qu’a connue le Maroc ces derniers temps n’a pas été très favorable aux récoltes. Pour Ahmed, fleuriste, «il y a moins de fleurs que l’année précédente». Il explique: «Les fleurs sont capricieuses, elles aiment la chaleur. Dès qu’il fait froid, paresseuses, elles peinent à sortir leur bout du nez». Avec la forte demande locale et mondiale, ce sont autant de raisons qui font exploser les prix pendant cette saison.
 
Même si les prix explosent, les Marocains disent «je t’aime» fleur à la main  

En période normale, la fleur coûterait chez le grossiste deux à trois dirhams. Mais durant cette fête de l’amour, le prix a atteint chez le fournisseur 7 à 8 dirhams. Des coûts pas toujours à la portée des fleuristes. Ces derniers, chacun selon sa clientèle et son budget, se sont procuré leur lot. «Cette semaine, j’ai acheté 6.000 fleurs, dont 2.500 sont des roses rouges», confie Said, vendeur au boulevard Zerktouni. Ainsi, les amoureux de dernière minute achèteront cher la fameuse fleur, à 15 DH jusqu’à 30 DH. Chez certaines sociétés le bouquet d’une trentaine de roses rouges peut facilement atteindre les 800 DH. Un bouquet en forme de cœur, lui, frôle les 1.500 DH. Mais peut importe ce qu’on débourse quand on veut dire «Je t’aime». En effet, de l’avis des fleuristes, les Marocains sont de plus en plus romantiques. La culture d’offrir des fleurs s’est développée ces derniers temps.

Toutefois, pour Youssef Bennani, propriétaire de la société Fleuritel, distributeur de fleurs, une semaine Saint-Valentin représente trois à quatre fois le volume d’une semaine normale, pas plus. «Même si l’on veut alimenter encore plus le marché, même si la demande est dix fois plus grande que la normale, des contraintes nous empêchent de proposer plus de fleurs aux Marocains», explique-t-il. Il pointe du doigt la limite de la capacité de production nationale, ainsi que les prix de la fleur qui s’envolent pendant la Saint-Valentin, aussi bien au niveau des agriculteurs au Maroc qu’au niveau de l’importation.

Ainsi le dirigeant de cette boîte estime le nombre de Marocains qui achèteront des roses en cette période à quelque 50.000. Un chiffre dérisoire, dit-il, par rapport à la France où un supermarché peut à lui seul vendre quelque 5 millions de fleurs en cette journée.
 La culture des fleurs chez les Marocains est aussi peu développée pour ce qui est des décorations de mariage, estime Zineb Bennani, fleuriste à Fleuritel. Mme Bennani qui collabore avec une équipe de fleuristes régulièrement formés à l’étranger dans le domaine de la composition florale souligne: «A l’étranger, la décoration et les compositions florales faites par des professionnels accaparent 15 à 20% du budget d’un mariage, alors qu’au Maroc on oublie ce côté très important qui met en valeur la cérémonie».
   
Elles sont marocaines, parfois colombiennes ou même hollandaises

Mais d’où viennent les fleurs qu’on trouve chez les fleuristes au Maroc ?
Les roses, les œillets… proviennent principalement des serres de Beni Mellal, Agadir, Marrakech, Tit Mellil, ou encore d’Azzemour. Un secteur où un hectare fait travailler 10 à 15 personnes. Il y a aussi les fleurs sauvages, notamment les Iris qui ne poussent que dans les montagnes du Rif. Elles sont cueillies par les populations locales puis vendues avant d’être acheminées de Tanger à Casablanca.
Pour ce qui est des fleurs exceptionnelles, elles sont importées avec tout ce que cela comporte de contraintes et de frais supplémentaires.
Les roses, gros boutons de 7 cm, aux tiges coriaces viennent d’Amérique du Sud, principalement de l’Equateur et de la Colombie. Les orchidées, les Gerbera, lis, glaïeuls entre autres produits d’autres hémisphères viennent souvent de Hollande. «L’importation constitue 10% de nos produits», explique ce grand fleuriste de la place.
Toutefois, selon ce dernier, il y a un mal qui frappe la profession, particulièrement les établissements bien structurés. Il s’agit de la concurrence déloyale de l’informel qui use de plus en plus d’importations de contrebande. «Un tiers des fleurs consommées au Maroc est issu de la contrebande», déplore-t-il.
 
Quand il fera plus chaud, les prix seraient moins chauds

La fleur gardera sa cote élevée durant les mois de février et de mars 2015, notamment à cause de la Saint-Valentin, la fête de la femme le 8 mars, mais aussi à cause du froid. «Après ces dates, et avec des températures plus clémentes, il y aura plus d’offre et les prix seront plus accessibles», indique Khalid, fleuriste, pour qui l’été est une autre saison importante avec son lot de fêtes de mariage et de fiançailles.

Toutefois, Khalid dont la boutique se situe à Zerktouni non loin des Hôpitaux, conserve jalousement, à l’instar de ses confrères, une clientèle bien définie. Il s’agit de quelques sociétés, quelques restaurants, certaines familles aisées qui changent de fleurs une fois par semaine, les personnes qui visitent leurs proches à l’hôpital, et enfin quelques rares amoureux qui n’attendent pas la Saint-Valentin pour exprimer leur flamme.
 
Des fleurs marocaines, contre du fuel algérien

 Par ailleurs, il n’y a pas que les Marocains qui sont friands de fleurs marocaines, des grossistes algériens se déplacent régulièrement au Royaume pour s’approvisionner en fleurs. Selon les fleuristes rencontrés par ALM, ces Algériens, pas très regardants sur la qualité, créent parfois des pénuries de fleurs par leurs achats massifs. Pour l’anecdote, on raconte même qu’il n’y a pas très longtemps des mulets transportant des fleurs marocaines s’échangeaient clandestinement dans les frontières contre des bidons de fuel algérien.

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