SociétéUne

Lotfi Boujendar : «Il est temps d’amorcer la deuxième phase de la réforme»

© D.R

Entretien avec Lotfi Boujendar, Directeur général de la Caisse marocaine des retraites (CMR)

ALM : Pouvez-vous nous donner un aperçu sur le régime civil des pensions ?

Lotfi Boujendar : La CMR a pour mission la gestion de régimes obligatoires qui sont le régime des pensions militaires et le régime des pensions civiles. La CMR gère également un troisième régime facultatif. Globalement, nous avons 960.000 actifs cotisants entre les deux régimes obligatoires contre 805.000 bénéficiaires de pensions. Nous avons chaque année 26 MMDH de cotisations contre 33 milliards de pensions servies. En ce qui concerne la situation du régime des pensions civiles, il repose sur le principe de la répartition, c’est-à-dire que ce sont les actifs cotisants d’aujourd’hui qui payent les pensions des retraités actuels et les autres bénéficiaires. Le régime des pensions civiles totalise en réserves quelque chose comme 80 milliards de dirhams en valeur comptable mais en valeur marché, ses réserves sont de l’ordre de 95 MMDH. Ce régime a connu depuis plusieurs années une dégradation de son rapport démographique. Nous sommes alors passés de 14 actifs pour 1 retraité dans les années 80 à 7 actifs pour un retraité dans les années 90, pour atteindre actuellement 2,2 actifs pour un retraité. Plusieurs facteurs sont à l’origine de cette dégradation, notamment les départs massifs à la retraite.

Est-ce que cette dégradation était prévisible ?

Il faut préciser que cette dégradation touche l’ensemble des régimes gérés par répartition. Car au départ nous avons toujours beaucoup d’actifs cotisants et peu de retraités mais au bout de quelques années, les départs massifs en retraite conduisent à ce qu’on peut appeler une maturité du régime comme c’est le cas pour la CMR qui reste un régime ancien.

Comment faites-vous face aux défis de la CMR ?

Le système de gouvernance de la CMR ne date pas de la réforme de 2016. Depuis la réorganisation de la CMR en établissement public, cette institution a connu une évolution en ce qui concerne notamment la gouvernance. La CMR a un conseil d’administration où siège l’ensemble des intervenants, à savoir l’Etat, les associations des retraités et les représentants des cotisants. Nous avons également créé au fil du temps un certain nombre de comités issus du CA pour un meilleur suivi de l’activité de l’organisme, notamment un comité permanent qui s’assure de la bonne application des décisions du CA, un comité d’allocation d’actifs qui trace la politique à suivre en matière d’investissement, le comité d’audit et des risques qui s’assure de la sincérité de l’information comptable et financière produite à l’égard du public et des institutions et puis dernièrement nous avons créé un comité de pilotage actuariel. Nous avons également décidé d’intégrer des membres indépendants dans chaque comité pour apporter une valeur ajoutée sans oublier le rôle joué dans notre système de gouvernance par l’ACAPS et la Cour des comptes.

La CMR est en première ligne de la réforme. Qu’est- ce qu’il faut faire dans les prochains mois et années ?

Le régime des pensions civiles au sein de la CMR a bien connu des difficultés. Il est vrai également que nous avons tardé à mettre en place une réforme paramétrique. Si la décision avait été prise avant 2016, nous aurions pu «gagner» plusieurs milliards de dirhams en terme de déficit. Cela dit, la réforme paramétrique mise en œuvre reste une réforme très importante avec des changements apportés concernant l’âge de départ à la retraite, la méthode de calcul des pensions sur une durée suffisante et la tarification des droits accordés aux affiliés du régime civil devenue équilibrée. D’ailleurs, le seul régime qui existe aujourd’hui avec une tarification juste est celui des pensions civiles. Le rapport de Bank Al-Maghrib est d’ailleurs clair là-dessus. En effet, le rapport entre chaque dirham collecté en termes de cotisations et chaque dirham versé en termes de prestation est le même.

Mais la situation de la CMR est celle qui inquiète le plus !

Je vous l’accorde mais c’est essentiellement dû à l’ardoise du passé. Car nous avons accumulé de par le passé un déficit financier important qui découle d’un certain nombre de facteurs endogènes et surtout la question de la tarification. Ceci est dû à des réformes décidées dans les années 90 dont l’impact n’a pas été bien calculé puisque des avantages ont été accordés sans la maîtrise du financement.

Après la réforme paramétrique, quelle est la prochaine étape ?

Il est temps maintenant d’amorcer la deuxième phase de la réforme. D’après les conclusions des travaux de la commission nationale, il faudrait converger vers un seul système de base pour l’ensemble des Marocains même si la mise en place d’un tel système est difficile actuellement et nécessite plusieurs années de travail. C’est pour cette raison qu’il faut une étape transitoire avec deux pôles, un pôle pour le public et un autre pour le privé.

Articles similaires

UneVidéos

Vidéo. Le ministre de l’agriculture et de l’élevage du Niger salue « le soutien remarqué du Maroc »

Au SIAM, M. Sadiki s’est entretenu avec le ministre de l’Agriculture et...

RégionsSociété

CWP Global livre 15 maisons modulaires aux environs de Marrakech et Taroudant

Ces unités ont été conçues dans un souci de durabilité et dans...

ActualitéUne

Vidéo/SIAM. La recherche & l’innovation, des solutions incontournables pour le développement de l’agriculture

La recherche agricole se présente comme un allié incontournable dans le contexte...

ActualitéUne

Impôts : le 30 avril, dernier délai pour la déclaration des revenus Professionnels

La Direction Générale des Impôts (DGI) rappelle aux contribuables titulaires de revenus...