ALM: Situez- nous le bizutage dans son contexte psychosocial ?
Nabil Ghazouane : Il est utile de noter que chaque groupe «humain» fournit à l’individu certains éléments nécessaires à son développement psychosocial. Ainsi, ces éléments ne s’assurent que par l’appartenance à un clan et le partage. Le fait que l’individu puisse partager avec les siens lui donne une certaine maturité et forge son identité. De ce fait, le bizutage est considéré comme rituel d’insertion dans un groupe donné. Ce rituel vient marquer un changement. L’étudiant rompt avec son enfance et entame une nouvelle étape de sa vie .
Pourquoi cette pratique est souvent synonyme d’humiliation et de violence ?
Chaque changement est accompagné de violence. Cette dernière est ressentie lorsque l’individu est mal préparé à toute phase transitoire. Par contre, l’humiliation est le but primaire du jeu. Elle permet à la personne bizutée d’affronter son entourage et se préparer pour d’éventuelles surprises pouvant croiser son chemin. L’humiliation et la violence dans le cas du bizutage sont anodines vu qu’elles sont vécues par des individus du même statut et qu’un jour, l’étudiant bizuté sera en position de force et conduira à son tour ce rituel
Le bizutage pourrait laisser des séquelles psychiques ?
Effectivement. Tout acte d’apprentissage est accompagné d’une émotion et d’un désir de refaire l’expérience ou pas. Ainsi le bizutage pourrait marquer à jamais sa vie. Le bizutage peut être à la fois positif et négatif. À travers l’expérience du bizutage, l’étudiant mettra le doigt sur ses faiblesses et travaillera davantage pour pallier à ces tares. Par contre, si cette expérience n’est pas verbalisée, elle pourrait être traumatisante. Cette appréhension relève du caractère paranoïaque de la personne bizutée. Il faut souligner que chaque personne d’entre nous a vécu de mauvaises expériences. De ce fait, il ne faut pas garder ces mauvais souvenirs pour soi car, dans le partage, on pourra trouver la quiétude.