Plusieurs milliers de manifestants ont dénoncé, mardi à Tunis et en province, la présence à des postes-clés de ministres du président déchu Ben Ali dans le gouvernement de transition formé lundi, également critiqué par la gauche et la mouvance islamiste. La puissante centrale syndicale tunisienne UGTT, qui a joué un grand rôle dans les manifestations ayant provoqué la chute du président Zine El Abidine Ben Ali, a affirmé qu’elle ne reconnaissait pas le nouveau cabinet. L’Union générale des travailleurs tunisiens a appelé ses trois représentants au gouvernement à s’en retirer, a indiqué son porte-parole, Ifa Nasr, soulignant que ceux qui s’y refuseraient ne représenteraient qu’eux-mêmes. Des milliers de manifestants sont par ailleurs descendus dans les rues en province et à Tunis pour protester contre la composition du nouveau gouvernement. Dans la capitale, la police a violemment dispersé un millier de manifestants, parmi lesquels des islamistes. Des Tunisiens avaient lancé sur Internet des appels à manifester à Tunis mais aussi à Sousse dans la région de l’ex-dictateur et à Sfax, la deuxième ville du pays (centre-est). Les ministres ayant servi sous le régime Ben Ali et maintenus dans le gouvernement tunisien ont «les mains propres» et «une grande compétence», s’est défendu, mardi, le Premier ministre Mohammed Ghannouchi sur la radio française Europe 1. «Ils ont gardé leur portefeuille parce que nous avons besoin d’eux dans cette phase» de construction démocratique, avec la préparation d’élections dans six mois, a affirmé le chef du gouvernement, soulignant le «grand enjeu de la sécurité» dans cette période de transition. Il a aussi affirmé avoir eu «l’impression» que Leïla Trabelsi, la femme du président déchu Zine El Abidine Ben Ali, dirigeait le pays à la fin du règne de l’ex-homme fort de Tunis. L’ex-première dame et son entourage sont accusés de s’être arrogés les richesses du pays en usant alliances, corruption, menaces et prébendes, selon des experts. Lundi, Mohammed Ghannouchi a formé un gouvernement d’union nationale de 24 membres, dont trois chefs de l’opposition légale, huit ministres de l’ancien gouvernement et des représentants de la société civile. L’équipe sortante y conserve les postes clés de l’Intérieur, la Défense, les Affaires étrangères et les Finances notamment.