Dorénavant, l’accès au master se fera sur dossier. Les candidatures seront examinées par les universités en fonction de critères académiques clairs, définis dans le dossier descriptif du cycle accrédité.
A la mi-août 2025, un arrêté ministériel (n° 1891.25) publié au Bulletin officiel a officialisé la suppression du concours d’accès au master, une mesure applicable dès l’année universitaire 2024-2025. Dix jours plus tard, le 28 août 2025, le Conseil de gouvernement devait examiner le projet de loi n° 59.24, texte fondateur destiné à remplacer la loi 01.00 en vigueur depuis plus de deux décennies. Il faut dire qu’entre-temps, certaines pratiques ont éclaboussé la réputation sur les pratiques d’accès aux cycles supérieurs. Mais la réforme a surtout pour objectif de repositionner l’université marocaine dans un contexte international concurrentiel. Aujourd’hui on parle d’innovation pédagogique, de digitalisation et d’inclusion du privé. Dorénavant, l’accès au master se fera sur dossier. Les candidatures seront examinées par les universités en fonction de critères académiques clairs, définis dans le dossier descriptif du cycle accrédité. Ne sera sélectionné que celui qui disposera d’une cohérence du parcours et selon les résultats obtenus, la pertinence du projet de recherche et les recommandations éventuelles. L’ancien système est banni à cause de certaines dérives malsaines. Certes, ce changement représente une rupture majeure pour les étudiants : l’élimination de l’épreuve écrite réduit le stress et la charge logistique, mais accroît aussi la compétition sur des critères académiques plus exigeants. Les dossiers devront être mieux construits et plus stratégiques, avec un accent particulier sur les stages, les mémoires et les expériences extra-académiques valorisées dans les parcours de master. Les quelque 113 articles composant le projet de loi n°59.24 parlent de gouvernance, de financement, de digitalisation, du rôle du secteur privé, de valorisation des enseignants-chercheurs et de structuration de la recherche. Autant dire une entière refonte de l’organisation de l’enseignement supérieur marocain.
Trois piliers composent le texte : modernisation, ouverture et responsabilisation. Modernisation, car il s’agit de rompre avec les inerties institutionnelles héritées de la loi 01.00. Ouverture, car le texte facilite l’implantation d’établissements privés et étrangers. Responsabilisation, enfin, car il impose aux établissements une autonomie accrue accompagnée d’un devoir de performance et de transparence.
La réforme de l’enseignement supérieur ne se limite pas aux questions pédagogiques
La réforme ambitionne de transformer en profondeur la gouvernance et le financement des universités. D’abord en renforçant l’autonomie institutionnelle. Tout établissement devra définir une stratégie claire, évaluée périodiquement par des organes de contrôle. La transparence sera garantie par des mécanismes de reddition des comptes, notamment dans la gestion des budgets et la publication des résultats. Pour le financement, le texte encourage la diversification des ressources, via les partenariats public-privé, l’amélioration des revenus propres (formation continue, valorisation de la recherche) et l’investissement privé. Autrement dit, tout en créant un cadre propice à l’innovation et à l’expérimentation, il faudrait réduire la dépendance vis-à-vis du financement public. Pour les enseignants-chercheurs, le projet prévoit des mesures de valorisation : formation continue, développement des compétences et clarification de leurs droits et devoirs. Le texte introduit aussi la possibilité, pour les professeurs du public, de contribuer à la formation dans les établissements privés, sous conditions. Cette porosité vise à fluidifier le transfert de savoirs et à combler le déficit de compétences. Par ailleurs, l’ouverture au privé et aux acteurs étrangers figure parmi les grandes nouveautés de la réforme. Les établissements privés pourront obtenir des agréments plus souples, à condition de respecter des normes strictes en termes d’infrastructures, de qualité de l’enseignement et de corps professoral. L’arrivée potentielle d’universités étrangères, via l’ouverture d’antennes au Maroc, représente un levier d’internationalisation majeur. Ce qui va permettre aux étudiants marocains d’accéder à des programmes accrédités mondialement sans avoir à quitter le pays, réduisant ainsi la fuite des talents. Toutefois, ces implantations devront être encadrées par des conventions avec l’État, afin de préserver la souveraineté académique et d’éviter une concurrence déloyale. Un autre axe structurant du projet de loi : la digitalisation. Dans un délai de cinq ans, un système national d’information devra être opérationnel pour centraliser la gestion des établissements, des étudiants et des parcours. La création d’universités numériques constitue une réponse aux défis de l’accessibilité et de la massification. Ces plateformes pourront accueillir un grand nombre d’étudiants, proposer des cours interactifs et garantir une traçabilité des parcours. Dans le même ordre d’idées, le texte encourage les partenariats public-privé pour financer les projets, transférer la technologie et aligner les programmes sur les besoins du marché. C’est dire en fin de compte à quel point la réforme change radicalement les règles du jeu. Particulièrement pour les étudiants. La suppression du concours de master élargit les chances d’accès, mais impose une plus grande rigueur dans la préparation des dossiers. L’obligation de protection sociale et la mise en place de bourses dans le privé renforcent l’égalité des chances.
Certaines mesures phares du projet
• La création d’universités numériques : Ces institutions offriront des formations en ligne de qualité, avec un système national de certification.
• L’implantation d’établissements privés à but non lucratif d’utilité publique, conçues pour élargir l’offre sans logique marchande.
• Le renforcement du rôle du secteur privé, appelé à compléter l’action publique dans la formation, la recherche et l’innovation.
• La diversification des parcours pédagogiques : Le texte consacre la légitimité des formations à distance, hybrides et en alternance.
• L’obligation de protection sociale : L’assurance-maladie obligatoire (AMO) sera étendue aux étudiants du privé, avec une obligation pour les établissements de financer des bourses.
• L’internationalisation : Les universités étrangères pourront ouvrir des antennes au Maroc, sous conditions strictes.














