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Psychologie et après-Covid-19: Quand BDO place la santé des dirigeants au cœur du débat

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La pandémie a mis à mal l’état mental du dirigeant, encore plus celui qui est constitué en TPE, PME ou encore selon le statut de l’auto-entrepreneur. C’est dans ce cadre que BDO en partenariat avec Aujourd’hui Le Maroc et La Vie Eco a tenu, le 16 juin dernier, un webinaire où la santé du dirigeant était au cœur du débat. Le contexte actuel renvoie, en effet, à savoir si le bien-être représente un luxe, à un moment crucial lié à la reprise des activités. La culture d’entreprise devra en prendre en compte. Les arguments des expertes sont convaincants.

«La bonne santé des dirigeants, un préalable pour la reprise du business post-Covid-19», c’est la thématique retenue dans le cadre du Cycle des webinaires organisé par BDO Maroc et qui s’est déroulé le 16 juin dernier. Les organisateurs ont tenu à sélectionner, exclusivement, des expertes dans le panel, histoire de faire un clin d’œil aux défenseurs de la question du genre… Elles sont toutes venues partager leurs expériences aussi diverses mais complémentaires à bien des égards. Toutes se sont prêtées au jeu de l’intervention en ligne au service de la TPE ou la PME qui traverse, aujourd’hui, des zones de turbulence si fortes que le chef d’entreprise n’a pas le temps de s’occuper de sa santé. Et le risque est grand dans ce cas compte tenu de l’effectif très réduit dans ce type d’entreprise. Les grands groupes peuvent, en effet, remplacer un administrateur ou un directeur clé. La PME ou la TPE, encore moins l’auto-entrepreneur, ne disposent pas de cette option.

Le débat est dense. Les intervenantes se sont évertuées à apporter, à tour de rôle, un éclairage édifiant sur cette situation exceptionnelle que traverse le monde et qui impacte directement la santé des décideurs exposés à un stress constant.
Pr. Raja Aghzadi, chirurgienne plasticienne, présidente de l’association Cœur de Femmes, nommée en 2019, médecin du travail et désignée aussi en tant que membre dans la Commission spéciale sur le modèle de développement, en dira long sur la question. L’experte rappellera que l’importance de la santé s’est imposée de fait avec la pandémie qui a paralysé les économies… «Avant l’épidémie, le Maroc a su afficher sa stabilité à multiples facettes mais avec un capital humain qui n’a jamais été valorisé à sa juste valeur». D’entrée, la praticienne plante le décor et impose l’angle d’attaque. «Le domaine de la santé est le parent pauvre au Maroc», rajoutera-t-elle sans ambages! Et pour cause, les indicateurs sont au rouge dans le domaine de la santé et le budget qui lui est alloué représente à peine 5,5% de l’enveloppe budgétaire.

Le secteur manque d’infrastructures sanitaires et la couverture sanitaire est encore insuffisante. Et c’est quelque part l’épidémie qui a permis d’accélérer certaines décisions pour mettre en place des mesures qui n’étaient pas à l’ordre du jour mais qui ont permis de contenir la pandémie. Tout ceci pour dire que la santé est au cœur des plus grands débats. Celle du dirigeant également car il est le garant de la survie de l’entreprise. Il a dû faire face à une situation exceptionnelle, à prendre des décisions rapides et inédites comme l’instauration du télétravail avec tous les enjeux que cela suppose. Partant de cet état, l’experte soulignera qu’il est donc important que l’entrepreneur soit outillé pour faire preuve d’agilité et d’adaptation pour résister.

La psychiatre et psychothérapeute Nadia Kadiri en s’appuyant sur l’étude enclenchée dans les années 2000 et qui vient d’être publiée, fait remarquer à son tour que le chef d’entreprise est confronté à tous les risques suite à cette pandémie. 57% des entreprises marocaines ont été mises en effet à l’arrêt. L’impact psychologique sur ses dirigeants est direct. «70% d’entre eux vivent une détresse réelle», déplore la praticienne.
Il faut dire que l’étude nationale des troubles mentaux qui a porté sur un échantillon de 6.000 personnes et qui a été publiée dernièrement avant la pandémie avait déjà permis de démontrer que 40% des Marocains faisaient des troubles mentaux spécifiques…
Aujourd’hui, la crise sanitaire change la donne mais pas dans le bon sens !

«Le chef d’entreprise a pratiquement 30 facteurs de stress et les plus intenses de ruine et de mort de l’entreprise, qui sont les plus graves, sont ceux qui arrivent en pole position avec la crise Covid-19», explique, à juste titre, l’experte.
L’accompagnement de cette population dirigeante pour aborder la relance économique s’impose dans certains cas. L’experte coach, Amal Hihi, fondatrice du cabinet Shine Consulting, rappelle, en effet, que «personne n’était préparé à cette situation de pandémie et les dirigeants n’avaient d’autre choix que de résister pour sauver l’activité. Le télétravail est également venu changer les habitudes et a mis à évaluation la relation de confiance entre le patron d’entreprise et ses salariés. Aujourd’hui, les déclencheurs de stress sont différents. Et le dirigeant doit garantir un équilibre entre le capital santé et la pression de relance de l’activité».
La réalité est amère : le dirigeant navigue à vue.

La question de bien-être s’incruste dans le package de la reprise des activités…. Car les dirigeants doivent absolument gérer leur stress et surtout pas le transférer à leurs équipes. Le comportement du dirigeant conditionnera, en effet, la motivation des troupes !
Abire Benameur, qui après 10 ans au service de l’enseignement supérieur privé, a décidé de voler de ses propres ailes en créant son agence de communication. Positionnée, depuis peu dans le bien-être, la fondatrice de Win Life recommande l’aménagement d’espace de détente dans les locaux destinés aussi bien aux dirigeants qu’aux salariés. Un tapis de massage à la pierre de jade, c’est le concept proposé par l’entrepreneure. Ayant déjà fait ses preuves en Europe et aux Etats-Unis, ce matelas de marque coréenne est proposé pendant une période limitée dans les entreprises pour un retour d’expérience. La question est de savoir jusqu’où ira la bienveillance du manager car il s’agit d’un budget qui peut être considéré, aujourd’hui, pour certains, comme un luxe. Mais la préservation du bien-être renvoie directement à la relance de l’activité. Par ailleurs, le télétravail a engendré des douleurs musculaires dues essentiellement à la posture. La sédentarité causée par le confinement se traduit, chez certaines personnes, par des problèmes de circulation du sang. Et c’est bien pourquoi la manager recommande que «le retour dans les locaux se fasse par un accompagnement en termes d’appui favorable à l’instauration de bien-être pour relancer la machine».
Sur un tout autre registre et non des moindres, en l’occurrence la couverture sociale, Mouna Medkouri, administrateur DG EPEGA (cabinet de courtage d’assurances), déplore que «certaines catégories de dirigeants, notamment parmi les auto-entrepreneurs, n’aient pas conscience de l’importance de la couverture sociale». Pour elle, «cette catégorie de dirigeants n’a pas la culture santé et ce n’est que quand il y a un problème que l’on cherche des solutions». La problématique demeure et le législateur travaille sur une couverture médicale pour les auto-entrepreneurs.

Bref, les recommandations convergent toutes vers un recentrage sur la santé du dirigeant et par ricochet de ses salariés pour un redémarrage des activités. Les prises de décision dans ce sens supposent une intelligence collective pour fédérer les bonnes habitudes et instaurer un environnement propice à la rentabilité. Au-delà, un baromètre sur le bien-être permettrait d’avoir plus de visibilité. Mais ce que l’on retient également à la fin du webinaire c’est que le bien-être des salariés est tout aussi important que celui des dirigeants. Les écouter surtout après une longue durée en télétravail ou en arrêt permettrait justement d’instaurer cet environnement de confiance et de bien-être favorable à une reprise des activités…

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