Société

Quinze clandestins portés disparus

© D.R

«Mon fils n’est pas mort ». Mailaïnine Souiyeh continue de se suspendre à cet espoir, en dépit de longs et néanmoins inutiles efforts pour retrouver son fils Laâroussi Souiyeh, disparu, depuis le 25 décembre 2005, avec quatorze autres jeunes émigrés sahraouis sur les côtes de Dakhla.  Après avoir entrepris, durant cinq mois, jour pour jour, de nombreuses démarches auprès des autorités locales, et suite au « déni » opposé par la Guardia civile, qui aurait affirmé ne pas avoir trouvé de trace des émigrés en question sur les côtes des Iles Canaries, Mme Souiyeh se trouve, depuis le 7 mai courant, à Rabat où elle a sollicité l’aide des autorités, et de quelques associations des droits de l’Homme, pour faire la lumière sur le sort de « nos enfants disparus dans des circonstances mystérieuses ».
Du côté espagnol, raconte Mme Souiyeh, porte-parole du Comité des mères des jeunes sahraouis disparus, « nos familles résidant à Las Palmas, aussi bien que les autorités espagnoles, nous ont affirmé, à la suite de multiples recherches sur les côtes des Iles Canaries, dans les hôpitaux, ainsi que dans les prisons, qu’elles n’avaient trouvé aucune trace de nos enfants ». De ce côté-ci, pas de signe de vie non plus.
«Mais où seraient donc passés nos enfants ? », s’interroge Mme Souiyeh, l’air un brin suspicieux. «Face à ce double niet, à quel saint se vouer ? », se demande-t-elle, avant d’ajouter : « S’il se trouve que nos enfants sont morts noyés, pourquoi leurs corps n’ont, jusqu’ici, pas été rejetés par la mer ?». Auront-ils, alors, été enlevés ? La réponse de Mme Souiyeh se veut sans équivoque : « Oui », a-t-elle asséné.
Reste à savoir pourquoi. Jamila Laâraïch, épouse de l’un des jeunes disparus, Ahmed Lakouara, n’y est pas allée par quatre chemins. « Les jeunes auront été interceptés par la Marine Royale, puis remis à la Gendarmerie Royale, en possession de tracts et autres CD faisant la propagande pour les thèses séparatistes du Polisario », a-t-elle reconnu, les traits un peu serrés. Cet acte, que Mme Laâraïchi veut bien mettre sur le compte d’une « incartade juvénile», serait également dû à la situation de précarité dans laquelle vivaient ces jeunes paumés.
Encore faut-il s’assurer que ces « jeunes paumés » aient été vraiment arrêtés par les autorités locales de Dakhla. Haddia El Aoud, mère de l’un des disparus, en veut pour preuve ceci : « Le lendemain du 26 mai, Mohamed Baïti, l’un des quinze jeunes disparus, avait pris contact avec sa mère à Laâyoune. Mais quelle ne fut la surprise de la mère quand, juste après avoir entendu la voix de son fils, la ligne a été coupée ». Mme Souiyeh, de son côté, évoque les « révélations» d’un témoin oculaire, selon qui « un émigré aurait péri sous la torture». «Si par malheur nos enfants seraient décédés, qu’on nous le dise.
Toute révélation, dans un sens ou l’autre, permettra de mettre fin à une longue attente. Et, du coup, abréger un feuilleton de longues recherches dont nous n’avons pas les moyens », plaide-t-elle. Sur ce point, les familles sollicitent « une intervention royale » pour les aider à surmonter cette « pénible épreuve ».


 Les noms des portés disparus


Quinze jeunes originaires du quartier « Skikina », à Laâyoune, auront disparu le 25 décembre 2005 sur les côtes de Dakhla. En voici les noms:
Ali Salem Lafdil Mahmoud Moul Eddar, Sayed Ahmed Mohamed Ahmed Lakouara, Sayed Ahmed Abdelouadoud Al Alem, Mostafa Moulay Ali Mohamed Fadel El Youssoufi, Ahmed Azmir, Saïd Laâroussi Krita, Laâroussi Moubarak Abdellah Souiyeh, Sayed Ibrahim Al Mokhtar Mohamed Fadel El Youssoufi, Hbib Sidi Mahmoud Mohamed Salem Lakhlifi, Abderrahman Sidi Mahmoud Mohamed Salem Lakhlifi, Mohamed Eddine Saleh Mohamed El Fadli Al Baïti, Essaddik Sidahmed Laâroussi Boutankiza, Khallihanna Al Bachir Mohamed Raïss, Lahbib Al Bekkaï Embirik Hellab et Abderrahman Semlali.

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