Selma El Bassiri, consultante en nutrition holistique & santé hormonale
Entretien
Après avoir elle-même fait le yoyo pendant des année, Selma El Bassiri s’est donné pour mission de démystifier la perte de poids saine pour toutes les personnes qui veulent transformer leur corps, leur vie et leur santé. La consultante revient aujourd’hui sur les différentes postures à avoir pour préserver sa santé lors du mois de Ramadan.
ALM : Quels sont déjà les premiers réflexes à avoir lors de la rupture du jeûne ?
Selma El Bassiri : Pendant le mois de Ramadan, notamment au moment de la rupture, il est important de ménager son système digestif ainsi que sa glycémie, un indicateur santé clé ! Après une longue période de jeûne, l’estomac, muscle capable à la fois de s’étirer mais aussi de rétrécir, n’est pas en capacité immédiate d’ingérer, en effet, une quantité importante d’aliments. Il faut donc ne pas le surcharger pour ne pas avoir cette sensation de trop-plein. Cette dernière est généralement accompagnée par une fatigue due au fait que le système digestif, face à une telle charge, va pomper de l’énergie au détriment d’autres fonctions et donc créer ce fameux coup de barre. Par ailleurs, une rafale d’aliments, surtout s’ils sont riches en glucides, entraîne une hausse soudaine du taux de sucre dans le sang et un pic d’insuline en réponse. Un phénomène généralement suivi d’un crash impactant nos niveaux d’énergie ainsi que notre humeur (la fameuse «tramdina» nationale). Le meilleur moyen d’éviter donc cela est d’entamer son repas avec des fibres et des liquides, sous la forme de légumes par exemple, qui permettent de ralentir l’absorption du bol alimentaire. Viennent ensuite les protéines et le gras, pour enfin finir avec les glucides. Bien évidemment il s’agit là d’un ordre idéal. Et dans la vraie vie, le ftour organisé de cette manière pourrait être de l’eau/lait et une datte pour rompre le jeûne, suivi d’une salade ou d’une portion de légumes. Viendra ensuite le plat principal (à base de viande, d’œufs, de poisson…) avant de passer aux douceurs sucrées. La chabakia passera donc en dernier. Sa place demeure tout de même parce qu’un Ramadan sans plaisir n’en est pas un !
Avec quel état d’esprit devrons-nous être pendant le mois de Ramadan?
Le corps et l’esprit de l’être humain sont incroyablement résilients et résistants mais également très sensibles à nos pensées. Cela veut dire que si nous donnons une connotation négative au mois de Ramadan en l’associant à la privation et à la restriction, notre esprit et notre corps par extension feront une fixette sur tout ce qui nous « manque » pendant cette période : manque de nourriture, eau, énergie, cigarette, etc. Et plus on y pense, plus on en souffre… en attendant l’heure de la rupture du jeûne pour se «lâcher». Et c’est ce que j’appelle subir son Ramadan au lieu de le choisir. J’invite plutôt à pratiquer le jeûne en pleine conscience des bienfaits de ce mois sacré, comme par exemple la détoxification profonde des cellules appelée autophagie, rendue possible par le jeûne.
Quels sont les aliments à manger avec parcimonie aux risques d’en payer les frais à la fin du mois de Ramadan ?
Les gourmandises, notamment sucrées, ont leur place à table, sauf contre-indication médicale, mais ne doivent pas constituer le socle alimentaire si l’on souhaite préserver sa glycémie et maîtriser son poids. Sellou, chebbakia et autres briouates sont à savourer certes, mais sans excès.
Quelle attitude sportive avoir pendant ce mois ?
L’idéal pour moi est de combiner marche et renforcement musculaire. La première activité est la bienvenue à tout moment de la journée et très intéressante après le ftour pour faciliter la digestion et le sommeil. La seconde, quelle que soit la forme physique de l’individu est à effectuer de préférence juste avant la rupture afin de permettre aux muscles de recevoir les nutriments nécessaires pour les réparer.
Comment équilibrer son sommeil dans un quotidien bousculé par un rituel et des coutumes installées mais en décalage avec la vie active ?
Le sommeil est toujours un gros sujet pendant le mois de Ramadan car la vie devient rythmée par plusieurs repas nocturnes, à savoir le ftour, le dîner et le shour. Sachant que le manque de sommeil a un impact très négatif sur la faim, l’humeur, la santé hormonale, la solution pourrait être de faire l’impasse sur l’un des deux derniers repas selon ses préférences. De cette manière, un sommeil réparateur devient prioritaire.
Des personnes disent perdre du poids pendant le mois sacré de Ramadan, d’autres le contraire… Pour vous quelles sont les prédispositions d’être dans l’un ou l’autre schéma ?
Je crois aux actions du quotidien plus qu’aux prédispositions. Et ce que j’observe en général chez les personnes qui prennent du poids, au-delà des quantités, est une tendance à consommer énormément d’aliments transformés ou industriels denses en énergie et pauvres en nutriments. Le corps se retrouve alors en surplus d’énergie mais affamé au niveau cellulaire, ce qui lui donne encore plus envie de manger parce que ses besoins n’ont pas été couverts. Que ce soit pendant le mois de Ramadan ou pendant le reste de l’année, une alimentation naturelle et la moins transformée possible est le meilleur allié perte de poids et surtout santé.
Quels seraient pour vous les gestes à avoir à la sortie du Ramadan pour préserver sa santé ?
Ne pas grignoter entre les repas est un super pouvoir que l’on acquiert durant cette période et que l’on peut emporter avec nous sur le reste de l’année.
Le mot de la fin peut-être…
Il est à mon sens important de savoir pourquoi on fait les choses si on veut être dans une démarche positive et bienveillante. Comprendre l’essence de ce mois ainsi que ses bienfaits est donc primordial !
