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Réforme de la Moudawana : Les recommandations du Policy Center

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Il est primordial d’abroger la condition de perte de garde en cas de remariage de la mère.

Policy paper : Une nouvelle analyse de Policy Center s’est intéressée au code de la famille en scrutant les dysfonctionnements et les limites du régime familial en vigueur et en examinant la lente progression vers l’égalité dans les rapports familiaux.

Intitulé «Le Code de la famille marocain (Moudawana) : réalités et perspectives de réforme», ce policy paper élaboré par Nouzha Chekrouni et Abdessalam Saad Jaldi analyse les insuffisances du régime juridique de la protection des enfants et les problématiques inhérentes à l’établissement de la filiation et dégage des réformes. Le Code de la famille apparaissait à son adoption par le Parlement, en 2004, comme une révolution juridique et sociale qui consacre l’égalité homme-femme et améliore le droit des femmes au sein de la cellule familiale. Cela dit, vingt ans après sa promulgation, le texte de 2004 accuse de nombreuses limites et n’est plus adéquat avec les transformations de la société marocaine. Sa Majesté le Roi Mohammed VI avait ainsi appelé à une refonte globale du Code de la famille, en vue de parvenir à l’élaboration d’un nouveau texte compatible avec la transition sociétale qui caractérise le Maroc contemporain. Le texte de 2004 présente de nombreuses insuffisances. Celles-ci concernent essentiellement le mariage des mineurs, les ambiguïtés juridiques relatives au divorce, l’absence à la fois de prestation compensatoire et de partage des biens acquis pendant le mariage. Le Code de la famille ne prévoit pas le versement d’une prestation compensatoire en cas de divorce permettant de rééquilibrer la situation financière des époux, notamment dans un système juridique de séparation des biens. La contribution des femmes sous la forme de travail domestique, d’éducation des enfants et de soins apportés aux parents à charge n’est pas prise en considération. De plus, après le divorce, la femme, davantage que l’homme, accuse une dégradation de son niveau de vie. En présence d’enfants, l’épouse refusera de se remarier pour ne pas perdre la garde de ses enfants. Concernant la gestion des biens acquis pendant l’union, les auteurs notent que l’article 49 du Code de la famille est resté muet sur les dispositions relatives au mode de fructification et de répartition des biens acquis pendant la relation conjugale. Il ne comporte pas d’indication sur la notion du travail, source du patrimoine conjugal. En fait, l’article 49 traite du « travail de chacun des époux» sans faire référence à la nature de ce travail, à son caractère (marchand ou non marchand) comme il ne donne pas de précisions sur la mesure de ce travail : le revenu, la valeur des actifs et du patrimoine ou tout simplement le temps de travail. Par ailleurs, les auteurs soulignent que si la coparentalité est encouragée durant la vie commune, elle ne perdure pas en cas de rupture du lien conjugal. L’article 164 qui stipule que la garde de l’enfant incombe au père et à la mère tant que les liens conjugaux subsistent. En cas de divorce, l’article 163, qui régit les droits parentaux, confie prioritairement la hadana (la garde) à la mère, puis au père, puis à la grand-mère maternelle de l’enfant. À défaut, le tribunal décide dans l’intérêt de l’enfant. Le droit marocain de la famille ignore le principe de coparentalité en cas de rupture conjugale.

Les réformes à entrevoir

Parmi les réformes à entrevoir, les auteurs recommandent d’instaurer la tutelle partagée en matière de droit de garde et de tutelle des enfants. Ils estiment qu’il est primordial que la tutelle soit une responsabilité conjointe des deux parents. La tutelle partagée permettrait de valoriser le rôle parental de chaque parent et de renforcer les mesures de protection de l’enfant contre tout abus potentiel. Il est aussi primordial d’abroger la condition de perte de garde en cas de remariage de la mère. Selon les auteurs, cette règle discriminatoire doit être supprimée pour s’assurer que l’intérêt de l’enfant reste la priorité, indépendamment du statut matrimonial de la mère. Parmi les autres recommandations figure la simplification des procédures judiciaires dans la mesure où les tribunaux de la famille sont surchargés par les affaires de litiges conjugaux. Cette simplification allégerait le fardeau des justiciables, réduirait les coûts et accélérerait les processus pour le bien-être des enfants et des parents. Il est aussi question de renforcer le pouvoir des juges en accordant aux juges de la famille davantage de prérogatives et de flexibilité dans la gestion des affaires de tutelle et de garde, ce qui pourrait contribuer à une meilleure prise en compte des intérêts de l’enfant et de l’égalité entre les parents. Par ailleurs, les auteurs appellent à criminaliser la polygamie et le mariage des mineurs. Alors que la capacité matrimoniale au Maroc est fixée à 18 ans, le mariage des mineurs persiste, favorisé par le pouvoir de dérogation accordé aux juges. Or, la marge d’appréciation laissée à ces derniers se contredit avec les engagements du Maroc au regard du droit international, en l’occurrence la convention relative aux droits de l’enfant. Parmi les mesures qui peuvent être entreprises en matière de lutte contre le mariage des mineurs, figurent d’abord la fixation de l’âge minimum du mariage à 18 ans, l’abolition de la procédure de dérogation permettant aux juges d’homologuer les mariages précoces, l’instauration de l’obligation de l’enregistrement de tous les mariages, et le bannissement des mariages coutumiers.

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