Accroître les fonds publics, promouvoir le partenariat Etat-associations…
Dans sa récente alerte, le CESE appelle à donner une nouvelle et forte impulsion à la vie associative et de redynamiser son rôle dans le développement. Il livre une série de recommandations portant sur des changements aux niveaux juridique et structurel et sur le plan financier et fiscal. Les détails !
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) vient de publier sa cinquième alerte sur l’affaiblissement de la vie associative. «La société civile marocaine est reconnue pour son dynamisme, sa crédibilité et ses actions pour faire avancer plusieurs chantiers (droits catégoriels : femmes, enfants, personnes en situation de handicap; développement humain, lutte contre la pauvreté, services de proximité, etc.). Il apparaît néanmoins qu’un certain essoufflement de la vie associative commence à se faire ressentir», constate le CESE. Il relève en effet que «plus d’une décennie s’est écoulée depuis l’ancrage constitutionnel de la société civile, le lancement de ces deux débats nationaux auxquels ont pris part plusieurs milliers d’associations et l’amorce de la stratégie ambitieuse mise en place en la matière par les pouvoirs publics, ce chantier transformateur peine à se concrétiser pleinement de manière à répondre aux attentes communes des différents acteurs et à atteindre le degré d’ambition escompté».
Dans ce sens, l’institution liste un ensemble de contraintes soulevées par les acteurs. Il y a lieu de citer, entre autres, des pratiques administratives parfois restrictives «ne favorisant pas la création ou le renouvellement des instances de gestion des associations, et ce, conformément aux dispositions juridiques relatives au droit d’association». De même, il souligne les difficultés rencontrées en matière d’exercice effectif du droit de pétition par les associations en raison de la complexité et la lourdeur des procédures, des suites réservées aux pétitions déclarées recevables par les collectivités territoriales. Il note ainsi l’accès limité à l’espace public pour l’organisation des activités et les dispositions fiscales non adaptées aux spécificités des associations et un accès limité au financement public.
Faire émerger une nouvelle génération de société civile
Selon le Conseil, il devient impératif de «voir émerger une nouvelle génération de société civile, plus forte, plus diversifiée et mieux organisée». Il appelle à mettre l’accent sur un ensemble de recommandations émises par le Conseil sur la base de son approche d’écoute, de consultation et de co-construction avec les différentes parties prenantes. Il s’agit principalement d’opérer deux grandes évolutions, la première aux niveaux juridique et structurel tandis que la seconde devrait s’opérer sur le plan financier et fiscal. Les changements de portée juridique et structurelle visent à veiller à la conformité du dahir n° 1-58-376 régissant le droit d’association, tel qu’il a été modifié et complété, avec les dispositions de la Constitution de 2011 et à adopter un statut particulier pour les fondations et les associations intéressées à la chose publique. Le CESE appelle à préciser, en matière de reconnaissance d’utilité publique, la disposition de «poursuivre un but d’intérêt général» énoncée dans l’article 1er du décret n°2-04-969, en établissant des critères explicites et opposables justifiant l’octroi ou le refus de ladite qualité.
Il plaide, de même, pour l’allégement des conditions d’obtention de l’autorisation d’ester en justice, telles qu’énoncées dans l’arrêté conjoint n°895-18, pour les associations de protection du consommateur non reconnues d’utilité publique et l’établissement d’un cadre réglementaire approprié pour encourager les associations des quartiers et des «douars» à s’organiser en réseaux, et les former/sensibiliser sur la participation citoyenne à travers les mécanismes participatifs de dialogue et de concertation au niveau des collectivités territoriales.
Adopter une classification exhaustive
Le CESE préconise de promouvoir le partenariat Etat-associations dans le cadre d’une vision revisitée des engagements de chaque partie, portant notamment sur la bonne gouvernance. Il recommande également l’accès aux financements publics, la qualité des objectifs et des actions, ainsi que le suivi et l’évaluation des résultats réalisés. Il suggère de procéder à l’adoption d’une classification exhaustive des associations, couvrant l’ensemble des finalités envisageables (plaidoyer/services ; national/ international/territorial ; qualité d’intérêt public/fondation, etc.), afin de faciliter l’établissement d’une base de données nationale simplifiée et aisément accessible à tous.
Le Conseil appelle, en outre, à déléguer aux associations de la société civile la gestion de certains services publics, en particulier les services de proximité et d’intérêt général, encourager la création de nouvelles associations en mettant à leur disposition des espaces collaboratifs dotés d’outils de travail nécessaires.
Exonérer des droits d’enregistrement et de timbre
S’agissant des changements sur le plan financier et fiscal, le Conseil recommande d’accroître les fonds publics destinés aux associations ainsi de favoriser, dans le cadre de partenariats Etat-associations, «les financements pluriannuels, avec des projets d’une durée minimale de trois ans, plutôt que des subventions ponctuelles mais également d’adopter le plan comptable spécifique aux associations et veiller à intégrer les critères de bonne gouvernance».
D’autre part, le Conseil préconise d’exonérer fiscalement, au titre de l’IS et de la TVA, les activités économiques des associations toutes catégories confondues, qualifiées de non lucratives selon les critères en usage définis par la réglementation fiscale (gestion non intéressée de l’association, caractère non concurrentiel de l’activité et de ses conditions d’exercice).
Il s’agit aussi d’encourager l’emploi associatif en élargissant le spectre des associations bénéficiaires des incitations fiscales, tout en fixant des plafonds réduits pour l’impôt sur le revenu appliqué aux hauts salaires versés aux employés associatifs, et ce, dans la perspective de la révision prévue de l’IR en 2024. Le CESE recommande également d’autoriser les donateurs, qu’il s’agisse de personnes physiques ou morales, à effectuer des dons déductibles de leurs impôts en faveur des associations ayant un ancrage territorial ainsi que des associations intéressées à la chose publique, après édiction du cadre législatif y afférent. Le Conseil se dit également favorable à l’exonération des associations des droits d’enregistrement et de timbre.