Société

Sursis pour le monde arabe

© D.R

Peut-on parler d’une réussite du Forum pour l’Avenir, qui s’est tenu à Rabat les 10 et 11 décembre? En fait, la réponse est à la fois positive et négative, tout dépend de quel côté on se situe. Négative, tout d’abord, car les prétentions américaines de donner un coup de pied dans la fourmilière politique arabe se sont bizarrement soldées par un échec. Le pays de l’Oncle Sam, représenté par un modéré, l’ancien secrétaire d’Etat Colin Powell, a finalement préféré mettre un peu d’eau dans son vin.
Non seulement les réformes politiques ne pourront provenir que de l’intérieur même des paysconcernés, mais ces réformes ne s’installeront qu’au rythme et conformément aux spécificités de chaque Etat.
A aucun moment les Américains n’ont fait preuve de résistance. Même l’absence d’Israël et de l’Iran est passée comme une lettre à la poste. Certes, lors de la préparation de la déclaration finale, les discussions entre experts étaient riches, mais pas du tout polémiques. Après plusieurs semaines d’intenses rencontres et consultations entre les différents pays participants (Moyen-Orient, Afrique du Nord et pays du G8), le Forum pour l’Avenir a fini par ressembler à une pâle copie du titubant Processus de Barcelone, suspendu à la résorption du conflit entre Arabes et Israéliens. En clair, nous sommes partis pour un long statu quo.
Soutenus par l’Union Européenne, les régimes arabes, principales cibles de la nouvelle vision américaine, sont sortis indemnes de ce bras de fer diplomatique. L’europe, et surtout la France, y trouve certes son compte, puisqu’elle limite (momentanément!) l’hégémonie américaine sur les affaires de la région Mena. « Ce n’est que partie remise », diraient les faucons de Washington. Personne ne les a empêchés, même en Europe où ils ont d’ailleurs déniché de précieux soutiens, d’occuper l’Afghanistan, d’y installer « démocratiquement » le président Hamid Karazai, de renverser l’homme fort de Bagdad et d’y préparer, toujours de la manière la plus « démocratique » qu’il soit, une relève politique soucieuse du respect des valeurs universelles. Le tout, sous le regard impassible des régimes arabes. Ainsi, l’échec apparent du Forum pour l’Avenir peut s’avérer être une victoire si les régimes arabes font effectivement preuve d’un pragmatisme cher à l’empêcheur de tourner en rond, Georges Bush.
Car les Etats-Unis de ce dernier ont la fâcheuse tendance à travailler en solo. En clair, le danger ne risque pas de venir d’une initiative menée tambour battant depuis des mois. Non. « Si vous exigez que la réforme vienne de l’intérieur, sachez que le danger viendra également de l’intérieur », c’est en quelque sorte le message adressé, de manière subliminale, par Colin Powell, un fin connaisseur (voire une victime) des ultra-conservateurs qui règnent aujourd’hui en maîtres absolus à Washington.
L’intérieur, c’est la société civile qui le représente. Contrairement au Processus de Barcelone, le Forum pour l’Avenir a réservé une place de choix à cette société civile, une notion floue capable d’englober n’importe quel courant politique, association, médias ou simple militant des droits de l’Homme.
Toutefois, la réussite de toute réforme politique dans le monde arabe doit être accompagnée par une solution juste et durable du conflit israélo-arabe. C’est justement la politique des deux poids, deux mesures qui fragilise la positon américaine dans le monde arabe. En tout cas, l’année 2005 devrait être celle de la réconciliation. Les résultats des élections en Palestine et Irak devraient accélérer les choses. En attendant, la deuxième édition du Forum pour l’Avenir sera organisée en 2005 à Bahreïn. Et juste avant, en avril, la capitale égyptienne devra accueillir une réunion préparatoire de ce Forum.

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