Les familles devront apporter 12 milliards DH pour financer la stratégie Belmokhtar pour la formation professionnelle
Le ministère de l’éducation nationale vient de dévoiler la nouvelle stratégie de la formation professionnelle. A priori, c’est une stratégie ambitieuse, tout est nickel. L’objectif est de former 10 millions de citoyens pour un coût global de pas moins de 65 milliards de dirhams sur six ans. Il s’agit d’un chiffre trop important, vu la capacité financière du pays à mobiliser dans un laps de temps plutôt court.
Il faut dire que l’Etat ne sera pas le seul contributeur financier dans cette stratégie. D’autres bailleurs de fonds seront impliqués. Dans le montage financier arrêté par le ministère de tutelle, certes l’Etat apportera le plus gros du budget de la nouvelle stratégie de la formation professionnelle (25,9 milliards DH), mais les ménages seront impliqués aussi.
Rachid Belmokhtar, le ministre de tutelle, compte mobiliser pas moins de 10 milliards de dirhams auprès des familles marocaines. Les premiers éléments de la stratégie ne précisent pas comment cette manne sera mobilisée. Si l’option d’une hausse d’impôts ou carrément l’institution d’une nouvelle taxe paraît difficile vu le contexte socio-économique actuel, la solution la plus plausible serait l’introduction de paiements de droits pour les familles des bénéficiaires, ce qui équivaut à la fin de la gratuité de la formation professionnelle. Une autre nouveauté laisse paraître une probable remise en cause de la gratuité de la formation. La nouvelle stratégie prévoit, en effet, l’implication du secteur privé dans la formation à travers le renforcement du partenariat public-privé (PPP).
Les responsables annoncent le développement d’une nouvelle génération d’établissements de formation en co-investissement. Il est également question d’introduire l’apprentissage à distance. Le ministère veut ainsi aller vers «l’institutionnalisation de la formation à distance, en tant que vecteur d’inclusion numérique et comme mode pouvant ouvrir davantage le système de formation professionnelle aux populations des zones ne disposant pas d’infrastructures de formation dans les filières appropriées». En attendant d’y voir un peu plus clair, la nouvelle stratégie pourrait faire des mécontents auprès du patronat. Et pour cause, les entreprises seront doublement mises à contribution dans le financement de la stratégie Belmokhtar.
Ce dernier compte d’abord sur les recettes de la taxe de la formation professionnelle (12,7 milliards de dirhams). Ensuite, le montage financier actuel de la stratégie prévoit 17 milliards de dirhams supplémentaires sous forme de coûts directs et indirects provenant également des entreprises. Le ministère est-il pour autant obligé de recourir à d’autres modes de financement ? Pas vraiement, selon le ministère lui-même. Car même en l’absence de la nouvelle stratégie, la formation professionnelle aurait coûté sur la même période pas moins de 58 milliards de dirhams pour des résultats deux fois moins importants puisque le nombre des personnes formées ne dépasserait guère les quatre millions.
«Takwin» dès le primaire
En plus des jeunes âgés de 15 ans et plus concernés jusqu’à présent par le système de formation professionnelle, le dispositif prévu prendra en charge, pour la première fois, les jeunes dès l’âge de 10 ans, aussi bien ceux en cours de scolarisation que ceux en situation de décrochage scolaire. Ainsi, et dans l’objectif de réduire le niveau de déperdition scolaire et valoriser la voie professionnelle, trois mécanismes sont prévus. Le premier concerne les élèves des trois dernières années de l’enseignement primaire.
Il vise à faire émerger les vocations des jeunes pour la formation professionnelle à travers notamment leur sensibilisation et la découverte progressive des métiers et du monde de l’entreprise. Le deuxième consiste en la mise en place de parcours professionnels de 3 ans au niveau des collèges. Basé sur une formation mixte (enseignement général-formation professionnelle), ce parcours offre la possibilité aux bénéficiaires d’accéder soit pour préparer un baccalauréat professionnel, soit à la formation professionnelle, soit au marché de l’emploi. Le troisième est destiné aux jeunes en situation de rupture scolaire âgés de 13 à 14 ans. Il repose sur l’identification de ces jeunes et leur prise en charge à travers un soutien scolaire et social permettant leur réintégration dans le système d’enseignement général et/ou de formation professionnelle.
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