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Un glissement inquiétant de l’informel au Maroc

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La TVA, les ajustements du SMIG et les réglementations contraignantes ont influencé le développement du secteur

La part du commerce de détail dans l’emploi informel n’a pas subi de grands changements, sauf un transfert dans les canaux de distribution de cette branche. Ainsi, la vente en magasin est passée de 17,75 % en 1999 à 13,4 % en 2013.

La crise sanitaire a mis en exergue les vulnérabilités du secteur informel. Une étude intitulée «Le secteur informel au Maroc: principales caractéristiques et tendances d’évolution» qui figure dans les «brefs du plan» du HCP révèle que bien que ce secteur offre une solution alternative au chômage et au manque de revenu, sa structure de fonctionnement et sa productivité ne permettent pas son développement économique et n’assurent pas une protection sociale face aux crises économiques.
Pour renforcer la résilience de ce secteur et améliorer sa performance économique, une stratégie nationale dédiée aux activités informelles est indispensable. Celle-ci tiendrait compte de plusieurs dimensions dont l’accès au financement et au marché, la formation, la sécurité sociale, la réforme du dispositif fiscal (notamment la TVA), et l’amélioration de la gouvernance, surtout en matière d’allègement et d’adaptation de la réglementation en vigueur.

Au Maroc, l’informel a un poids inquiétant. Selon l’enquête nationale réalisée par l’HCP entre 2013 et 2014, la part du secteur informel dans le volume total des emplois créés s’est élevée à 28,7 %, et sa contribution au PIB a atteint 11 %. Cette étude qui présente les principales caractéristiques du secteur par référence aux résultats des trois dernières enquêtes réalisées par le HCP (1999, 2007 et 2013) montre que les créations d’unités de production informelles (UPI) se sont développées dans les secteurs des services, particulièrement la branche des transports et communications et aussi la restauration.

Le commerce représente toujours le principal vecteur de l’économie informelle au Maroc, avec une part de 50,6 % des effectifs employés en 2013.
La part du commerce de détail dans l’emploi informel n’a pas subi de grands changements, sauf un transfert dans les canaux de distribution de cette branche. Ainsi, la vente en magasin est passée de 17,75 % en 1999 à 13,4 % en 2013. En revanche, le commerce hors magasin a pris de l’ampleur, passant de 12,7 % de l’emploi informel en 1999 à 17,9 % en 2013.

La TVA, principale composante qui influence le secteur informel

Selon l’étude, la TVA constitue la principale composante fiscale qui influence le secteur informel et non l’impôt sur les sociétés. «Les chefs d’UPI s’approvisionnent en amont auprès de fournisseurs qui eux-mêmes sous-déclarent ou travaillent dans l’informel. Ceci leur permet d’acheter sans facture réglementée et donc d’échapper à la facturation en mode TVA», explique l’étude. Cette situation est attribuable à leur faible inclusion financière et au manque de liquidité, principal handicap pour ces unités caractérisées par leur fragilité et l’irrégularité de leurs recettes financières. L’étude signale que les ajustements du SMIG influencent également l’activité informelle. Une augmentation du SMIG contraint souvent les entreprises, en l’occurrence les TPE et les PME, dont les charges salariales pèsent lourdement sur le résultat net, à réduire leurs effectifs ou à ne pas les déclarer.

Et par conséquent, en l’absence de mesures d’accompagnement, le passage à l’informalité se trouve favorisé par le chômage causé par une hausse soutenue du SMIG. L’effet «revenu global» affecte aussi le développement des UPI, notamment le taux de croissance du revenu national brut (RNB) par habitant. Des écarts importants entre les taux d’informalité par niveau de revenu des pays sont généralement constatés. Il faut également signaler qu’un cadre institutionnel réglementaire complexe et contraignant favorise le développement des activités informelles.

Les indépendants plus nombreux

Les indépendants constituent la catégorie professionnelle la plus importante, avec un surplus de 489 620 actifs sur la période 1999-2013. L’auto-emploi est la forme dominante au sein de ces indépendants. En 1999, la part des UPI comptant une seule personne était de 70,47%. Elle s’est accrue pour atteindre 74,9 % en 2007 et en 2013. En contrepartie, les UPI employant plus de deux personnes ont vu leur proportion baisser, passant de 29,57 % en 1999 à 25,1 % en 2013. Par branche d’activité, il est important de relever que les travailleurs informels semblent se tourner plus vers le BTP et les services et ce en vue d’augmenter leurs revenus tout en préservant leur statut d’indépendant. Le salariat est faible au sein de ce secteur. La part des salariés informels n’a pas dépassé 9 % de la population active totale des salariés en 2013. Quant aux travailleurs non rémunérés, leur poids est resté faible dans l’informel, s’établissant à 0,59% en 2007 puis à 0,44 % en 2013. Les actifs employés dans l’informel ont également conservé leur statut d’emploi.

Cette proportion avait atteint 96,57% en 2007, puis avait connu un faible recul en 2013 pour se situer à 94,62% de l’emploi total. Par ailleurs, les caractéristiques sociodémographiques de ces travailleurs montrent que ces derniers ont en général le profil de chef de famille, la part des célibataires étant plus faible. L’emploi informel est principalement masculin, avec une part de 89,5 %, attirant de moins en moins les jeunes de moins de 35 ans.

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