L’association Amane, organisation qui promeut le partenariat et la coopération dans le domaine social et de la protection des personnes vulnérables, a organisé, mercredi à Rabat, une rencontre avec les associations civiles au cours de laquelle il a été procédé au lancement du projet «d’appui des potentialités de la société civile et de modernisation du système de protection de l’enfance». Un projet réalisé en partenariat avec l’organisation espagnole Habitafrica et la ville de Salé.
Une réunion dont ont été absents les représentants du ministère de la solidarité, de la femme, de la famille et du développement social, ont relevé les organisateurs qui ont par ailleurs dressé un tableau relativement sombre de la situation de l’enfance vulnérable dans la région. C’est ainsi que l’unité intégrée pour la prise en charge des enfants et des femmes violentées qui relève du ministère de la santé à Salé a fait état de 107 cas de violence hospitalisés durant les années 2011 et 2012. Sur ce total, 56 de ces cas ont été signalés en 2011 et 51 en 2012.
Les statistiques de l’unité locale dédiée du ministère de la santé ont également montré que cette violence s’exerce en majorité contre les garçons et qu’elle est le fait des hommes dans la plupart des cas. Elle est néanmoins exercée à parts quasiment égales en milieu public et au sein des familles. C’est aussi le sentiment des services de la police que la violence contre les enfants va s’aggravant car ils ont enregistré 102 cas d’agressions physiques au cours de l’année dernière.
Ces mêmes services ont été saisis de 31 cas d’agressions sexuelles et 24 cas de relations sexuelles avec mineur. La plupart de ces agressions ont eu lieu dans les quartiers de Sidi Moussa, Inbiat et Tabriket. Pour la représentante du ministère de la justice, la création d’une cellule dédiée au sein des tribunaux de 1ère instance en 2004 est un progrès par rapport à la situation antérieure, mais que cela n’empêche pas de constater que le nombre des agressions et la violence vont s’aggravant, en particulier cette année. Elle a, en outre, considéré que l’un des obstacles qui s’opposent à l’efficacité de l’action dans le domaine de l’action dans la prévention et la lutte contre la violence dont sont victimes les enfants, est le flou qui entoure la législation en le domaine. La loi ne spécifie pas ce qu’on entend par violence, ni même ne précise les sanctions applicables dans ces cas. Il reste donc à affiner la loi ainsi que la procédure, a t-elle laissé entendre.
Amane est une association marocaine créée en 2009 pour lutter contre les violences sexuelles contre l’enfant et pour améliorer le système de protection de l’enfance. Selon sa directrice, Beatrice Bouron, le projet lancé mercredi a été mis en chantier en 2012 et il se propose de mobiliser le société civile pour la prévention de la violence et la prise en charge des enfants violentés. Une des études d’Amane réalisée en 2006 montre que la violence n’est pas bien connue, «pas quantifiée». Cependant cette étude qui a fondé l’action de l’organisation tire 2 conclusions de l’existant : la violence est exercée aussi bien au sein de la famille que dans l’espace public. Elle participe dans certains cas du fait qu’elle est perçue comme un moyen d’éducation. Pour lutter contre cet état de faits, Amane veut sensibiliser, former et améliorer les mécanismes de prise en charge.
C’est l’affaire de tous aujourd’hui, ce le sera beaucoup plus demain, ont considéré les organisateurs en appelant au réseautage comme moyen d’unir les efforts «par trop éparpillés». C’est en fait l’une des idées défendues par Lazrak, président du conseil de la ville, qui a regretté que les associations de la société civile ne soient pas présentes en nombre à une «réunion aussi déterminante». Il a considéré que la violence exercée contre les enfants est un problème grave et que les violences sexuelles en particulier vont s’aggravant puisqu’elles «s’exercent aujourd’hui au sein des établissements scolaires même». Il a estimé que pour faire face à cette situation, «il est temps de passer aux actes». Il a ainsi annoncé l’installation à Salé d’une infrastructure dédiée car «la ville n’est plus une ville-dortoir». Il a en outre annoncé la création d’écoles et d’unités d’éducation pour permettre aux diplômés chômeurs d’y enseigner.
Béatrice de la Calle d’Habitafrica, l’organisation espagnole partenaire, a précisé que le projet lancé couronne une année d’efforts communs. Elle a également rappelé qu’il entre dans le cadre de l’action déclinée sur 3 axes d’Habitafrica. Elle a cité le logement et les activités génératrices de revenus, la question des migrations et la protection de l’enfance.